Accueil > Social > Droits humains
« Unissons-nous et ne nous laissons pas tromper par de tels discours »
Sylvie Mouniata, présidente du Collectif Non au racisme Respekt a nou
jeudi 9 février 2012, par
Ne stigmatisons pas nos frères et sœurs, quelle que soit leur origine et ne nous laissons pas perturber par des discours qui prônent la division, tel est le point de vue de la présidente du Collectif Non au racisme Respekt a nou après les propos du ministre de l’Intérieur et la visite de Le Pen à La Réunion.
Que vous inspire la déclaration de Claude Guéant sur la prétendue inégalité des civilisations ?
- Ces propos suscitent l’indignation. On sent bien qu’il y a une stratégie pour faire peur, et pour tenter de ramener à son parti toutes les personnes vulnérables à ce genre de message.
Ce discours est encore plus dangereux en période de crise. Nous ne devons pas nous laisser influencer par de tels arguments.
Quand on pense combien à La Réunion le combat est difficile pour conscientiser, pour faire face à l’ignorance… de tels propos ne vont pas dans le sens des intérêts de la population.
Que pensez-vous de la visite de Marine Le Pen à La Réunion ?
- Marine Le Pen est arrivée mardi à La Réunion. Elle est venue en tant que candidate à la présidentielle. Il est clair que les citoyens ont le droit de faire connaître notre position vis-à-vis déclarations extrémistes et xénophobes de l’extrême droite.
Marine Le Pen a été fidèle à la réputation du Front national en insultant les Réunionnais. Elle dit que ceux qui ont manifesté contre elle « en étaient à plus de trois bouteilles de rhum et 800 pétards ». C’est cela le racisme, car cela commence par ne plus respecter son prochain parce qu’il est différent.
La présidente du Front national est venue semer le trouble à La Réunion avec de tels discours, stigmatisant les plus vulnérables d’entre nous.
Quand on connaît la fragilité de notre tissu social et économique, le chômage et les tensions que cela entraine, nous ne pouvons pas accepter des discours de division.
Pour cette raison, notre collectif soutient tous les mouvements de protestation contre le Front national. Nous ne pouvons pas tolérer la mise à mal de notre vivre ensemble par quelqu’un qui attaque notre métissage.
La Réunion porte bien son nom, c’est La Réunion, et il nous faut combattre ce genre de comportement de division.
Un autre point, c’est l’objectif de sa visite. Elle vient chercher des voix, sans qu’elle soit intéressée par un projet pour le développement de La Réunion. Il faut arrêter de considérer notre île comme un réservoir de voix.
Comment expliquer que des Réunionnais s’affichent aux côtés de Marine Le Pen ?
- À La Réunion, le racisme est un vrai problème. Rappelez-vous des propos scandaleux tenus par un enseignant pour justifier des faits délictueux : « je suis blanc et de toute façon, ici c’est des nègres et toutes des p…. et c’est comme cela qu’il faut faire ». Si de tels propos peuvent être tenus, c’est bien parce qu’il existe malheureusement un contexte qui le permet. Vous avez aussi le racisme contre ceux qui arrivent dans notre pays parce qu’ils espèrent y avoir droit à de meilleures conditions de vie que sur la terre qu’ils ont dû quitter.
Ce racisme est là pour nous diviser, et les idées propagées par Marine Le Pen sèment la division.
Quand j’entends des gens à la radio dire qu’ils vont voter pour elle, je dis : ne nous trompons pas de politique. Il reste encore beaucoup de chose à faire pour notre pays, alors ne nous laissons pas tromper par de tels discours.
Car l’essentiel, c’est que les Réunionnaises et les Réunionnais s’emparent du problème pour lutter contre la crise qui traverse notre pays. Nous devons chercher à nous unir pour combattre le chômage qui touche tout le monde et en particulier les jeunes. Nous avons une jeunesse pleine de qualité qui n’a pas de travail, ce n’est pas le racisme et le discours de l’exclusion qui vont régler la crise. C’est l’union de tous qui permettra de valoriser cette jeunesse.
Et à ceux qui se montrent aux côtés de Marine Le Pen je leur demande : comment voient-ils la société réunionnaise de demain ? Et comment en sont-ils arrivés là ? Souffrent-ils d’une méconnaissance de l’Histoire de La Réunion ?
Propos recueillis par M.M.