Augmentation de 61 % en 8 ans, selon le Comité départemental de l’habitat et de l’hébergement

Près de 45000 familles en demande de logement social à La Réunion

22 mars, par Manuel Marchal

Près de 28 000 demandes de logement social en 2017, près de 44 000 en 2023. C’est un indicateur d’un système à bout de souffle. La compétence du logement est exercée par Paris à La Réunion. Cette augmentation durable est inquiétante du nombre de demandeurs de logement social est le résultat de sa politique. Les conséquences sont dramatiques à La Réunion, et ce sont les pouvoirs publics locaux qui sont contraints de gérer la pénurie qui s’aggrave.
Cette responsabilité pourrait être transférée aux Réunionnais, avec l’enveloppe financière que l’État consacre au logement à La Réunion. Le résultat sera sans doute meilleur car les Réunionnais sont les premières personnes concernées par la crise du logement à La Réunion.

Le rapport du dernier Conseil départemental de l’Habitat, daté de mars 2024, fait apparaître les informations suivantes :

« Au 31 décembre 2023, près de 44 500 familles en demande de logement social sont enregistrées dans le SNE. L’augmentation du nombre de demandes est de 14 % sur l’année et de 61 % en 8 ans. L’accélération importante des trois dernières années risque de se poursuivre du fait de la faible production (mises en chantier) de logements locatifs sociaux neufs, malgré l’atteinte des objectifs de financement ou de programmation (objectifs du PLOM 2019 à 2023). »
« Ce qui caractérise la demande de logement social à La Réunion est la grande précarité des demandeurs. En effet, une très large majorité, soit 88 %, est éligible au logement locatif très social (LLTS), soit un pourcentage qui reste constant ces dernières années. »
« Jusqu’en 2022, les attributions prononcées bénéficiaient majoritairement aux demandes dont l’ancienneté était inférieure à 1 an. En 2023, il est observé une baisse de ce taux, qui est passé sous la barre des 50 % avec 49,7 % de l’ensemble, soit - 7 points par rapport à 2022. Les attributions portent à près de 75 % (contre 82 % en 2022) sur des demandes datant de moins de 2 ans. Ces chiffres peuvent laisser penser que les délais d’attribution restent relativement brefs. Pourtant, de nombreuses nouvelles demandes sont en réalité le fait d’anciens demandeurs n’ayant pas renouvelé leur demande dans les délais impartis. »

Impasse de la défiscalisation

Ces données montrent une aggravation de la crise du logement à La Réunion. Dans une récente tribune publiée dans les médias, le président de la FRBTP déplorait une chute importante de la construction de logements neufs, aux environs de 1000 en une année.
Toutes ces nouvelles constructions ne sont pas des logements sociaux. La pénurie va donc augmenter.
Ce problème n’est pas nouveau. Depuis plusieurs années, les collectivités revendiquent un grand plan de constructions. L’État a mis en œuvre des dispositifs pour favoriser la construction, mais ils n’atteignent pas leurs objectifs et ils font reposer le coût sur les contribuables. Depuis plus de 30 ans, c’est la défiscalisation qui est privilégiée par Paris comme mode de financement, plutôt que de prioriser l’aide directe aux constructeurs de logements sociaux.
La question du coût de production est également en cause. Un moyen d’augmenter le parc social est de racheter à des opérateurs privés des logements qu’ils n’arriveront pas à louer au tarif prévu, ce sont les VEFA. C’est une manière d’aider les riches qui ont défiscalisé mais qui ne pourront pas tirer les revenus qu’ils escomptaient de leur investissement. Or, le risque fait partie du capitalisme et tout investisseur doit s’attendre à perdre le capital misé.
Le logement est en voie d’achèvement, cet investissement ne pourra pas quitter La Réunion. Pourquoi ne pas envisager un mode de rachat plus juste pour l’intérêt public, par exemple à l’euro symbolique ?

34 000 logements vacants

L’augmentation durable très inquiétante du nombre de demandes de logements sociaux confirme que le mode actuel de production n’est pas adapté.
L’objectif de la politique du logement doit être de trouver les moyens de rendre disponible 50 000 logements sociaux. 34 000 logements sont vacants à La Réunion. Des dispositifs existent pour qu’une partie puisse être habitée par des demandeurs de logements sociaux. Des aides pouvant aller jusqu’à 80 % du coût des travaux permettent de réhabiliter un logement vacant, à condition qu’il intègre le parc social pendant la durée de la convention avec l’État. Ceci pourrait permettre une réponse partielle à l’urgence.

Tout remettre à plat

Mais pour la durée, les données du dernier Conseil départemental de l’habitat appellent à tout remettre à plat.
Le mal-logement est une urgence sociale et la France est un des pays les plus riches du monde. Paris a la compétence dans le domaine du logement à La Réunion. Il lui importe de débloquer les fonds nécessaires pour construire suffisamment de logements sociaux pour répondre à la demande.
Si Paris n’en est pas capable, alors cette responsabilité pourrait être transférée aux Réunionnais, avec l’enveloppe financière que l’État consacre au logement à La Réunion.
Etant les premiers concernés par la crise du logement, les Réunionnais sauront sans doute trouver le moyen d’y répondre en étant accompagné par l’État et l’Europe.

M.M.

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