Rapport annuel 2008 Fondation Abbé Pierre : “L’état du mal-logement en France”

En France, près de 6 millions de personnes vivent dans des logements précaires

2 février 2008

Édité chaque année, “L’État du mal-logement en France” est devenu un ouvrage de référence. Ce n’est pas un hasard puisqu’il est l’objet d’un travail de collecte d’informations, de réflexions et d’analyses poussées de la part d’un groupe de chercheurs parmi les plus pointus du monde du logement. Si ce rapport annuel est remarqué, c’est également grâce aux données chiffrées sur lesquelles s’appuient ses argumentations. Indispensables à la rigueur scientifique à laquelle la Fondation Abbé Pierre s’attache tout particulièrement, ces chiffres sont avant tout, pour nous, des situations humaines souvent dramatiques.

En France, près de 6 millions de personnes vivent dans des logements précaires, en situation de « réelle difficulté ». Dans son treizième rapport annuel, la Fondation Abbé Pierre tire la sonnette d’alarme. Et souligne que le mal-logement va bien au-delà de la question des sans-abris. De manière générale, les ménages aux ressources moyennes ont de plus en plus de mal à trouver un toit.

Six millions de personnes en situation de « réelle fragilité ». Trois millions trois cent mille personnes mal-logées. Un million vivant dans des logements indignes. Cent mille sans-abris. Ces chiffres sont sans appel. Dans son treizième rapport annuel, la Fondation Abbé Pierre s’alarme. Et de détailler la liste des personnes concernées : SDF, occupants d’habitation de fortune ou de centres d’insertion sociale, personnes hébergées par des tiers, vivant en situation de surpopulation ou encore en instance d’expulsion pour impayés de loyer.

Cette année, la Fondation Abbé Pierre met l’accent sur les ménages modestes, qui gagnent en moyenne 2.500 euros par mois. Ces derniers ont de plus en plus de mal à trouver un logement. Principales raisons : des moyens financiers insuffisants et l’absence d’une offre immobilière bon marché. Ainsi, chaque année, près de 4 millions de ménages sont à la recherche d’un toit. Soit près de 15% du total des ménages. Si 2 millions trouvent dans le parc privé - avec des loyers de plus en plus élevés -, dans le parc social, la situation s’aggrave.

Seulement 30.000 logements sociaux par an

Seuls 400.000 ménages trouvent en effet un logement social. Soit un tiers seulement des 1,3 million des demandeurs de logements sociaux. « Le logement social constitue une porte de plus en plus difficile à ouvrir, même pour les ménages très modestes », note l’association dans son rapport. Un problème notamment lié à la faible progression du parc social en France : seuls 30.000 nouveaux logements sont ainsi construits chaque année.

Pire, selon la Fondation, le nombre de locations de logements sociaux « est à son niveau le plus bas depuis une douzaine d’années à cause du recul de la mobilité résidentielle », c’est-à-dire du nombre de logements sociaux libérés par des ménages pouvant accéder au parc locatif privé. Selon l’association, on est ainsi passé de 500.000 logements sociaux mis en location en 1999 à 430.000 en 2006. Et de craindre que la situation n’empire, avec la baisse du parc « pour la première fois depuis la création du logement social (...), avec le projet de vente de 40.000 logements sociaux par an », souhaité par le gouvernement.

Dans ces conditions, l’association doute de l’application effective de la loi sur le droit au logement opposable (Dalo), entrée en vigueur le 1er janvier dernier. La reconnaissance de la loi Dalo, « qui constitue incontestablement une avancée », estime la Fondation, « risque de se heurter à l’insuffisance (...) de logements à loyer accessible puisqu’elle ne repose que sur la mobilisation du contingent préfectoral ». Six cent mille ménages remplissent en effet les critères de priorité imposés par la loi, mais le contingent préfectoral ne permet de reloger que 60 à 65.000 d’entre eux par an.

Dans ce contexte, la conclusion de l’association est claire : « 87% des ménages ont le sentiment qu’il est aujourd’hui difficile de trouver un logement en France ». Une situation également due au type de nouveaux logements construits, majoritairement destinés aux ménages aisés. « Alors que la construction a retrouvé un niveau de production qu’elle n’avait pas connu depuis longtemps, les logements livrés sont le plus souvent inaccessibles aux ménages modestes », note ainsi la Fondation. Une situation à laquelle le plan pluriannuel - récemment présenté par le gouvernement après concertation avec les associations, dont la Fondation Abbé Pierre -, qui prévoit une enveloppe de 250 millions d’euros pour le logement -, ne mettra pas fin dans l’immédiat. Pour l’association, trouver un logement en France relève aujourd’hui du parcours du combattant.


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