Droit au logement

« Il faut un engagement politique pour répondre à ce problème »

25 janvier 2007, par Manuel Marchal

« 50.000 logements sociaux à La Réunion, et 26.000 demandes en attente. 22.000 habitations insalubres » : le constat dressé par Christian Ballet mardi sur les ondes de KOI rappelle l’ampleur du chemin à parcourir pour que le droit au logement soit une réalité pour tous les Réunionnais.

Au lendemain du décès de l’Abbé Pierre, Christian Ballet, Délégué régional de la Fondation Abbé Pierre, était l’invité de l’émission "Alon kozé" sur Kanal Océan Indien.
Christian Ballet a tout d’abord rendu un hommage appuyé à l’action de l’Abbé Pierre. « Le combat va se poursuivre avec Emmaüs, la Fondation abbé Pierre, les associations et l’opinion ». Il a poursuivi en évoquant largement le thème du logement, domaine dans lequel intervient notamment la Fondation abbé Pierre.
Lors de sa venue dans l’île, le fondateur d’Emmaüs a été frappé « par la subsistance, à La Réunion, Département français d’Outre-mer, d’une situation intolérable, en particulier sur le logement et le mal-logement ».
Le responsable régional de la Fondation abbé Pierre rappelle le constat : « 50.000 logements sociaux à La Réunion et 26.000 demandes en attente. Ces demandes sont éligibles, c’est-à-dire que des familles et des personnes montent des dossiers qui sont examinés. Après examen, il ressort que ces familles ont droit à un logement social ».

Les données du mal-logement

Face à cette demande, Christian Ballet note que l’« on construit entre 1.500 et 2.500 logements par an. On voit le chemin qui reste à faire ».
« Cette situation de pauvreté, de retard a beaucoup frappé l’abbé Pierre », poursuit-il. Car au-delà du logement social, c’est aussi la persistance du mal-logement à La Réunion qui est intolérable. « L’habitat indigne est très développé à La Réunion. Il se trouve notamment dans les Hauts et autour des villes. Il prend trois formes : l’absence de logement, le bidonville et l’habitat diffus insalubre des hauts avec des maisons dépourvues du moindre confort ».
Et pour Christian Ballet, les bidonvilles sont en augmentation. Citant une enquête de l’AGORAH datant de 1999 et prenant comme champ d’étude une vingtaine de communes, le responsable de la Fondation abbé Pierre cite le nombre de 22.000 habitations insalubres à La Réunion. « Une étude en cours de réactualisation », précise-t-il. Christian Ballet explique la croissance du mal-logement par un accès au logement de plus en plus compliqué « même pour les classes moyennes ». De plus en plus de salariés ont un travail précaire, mal payé, sous forme de contrat à durée déterminée. Ils n’ont pas de revenus suffisants pour faire face aux exigences des bailleurs, même des bailleurs sociaux, explique en substance le délégué régional de la Fondation abbé Pierre. Parallèlement, « les aides au logement ne suivent pas l’évolution des loyers, nous demandons un rattrapage », ajoute-t-il.

Faire appliquer les lois existantes

Interrogé sur l’annonce par le gouvernement d’une loi "abbé Pierre" rendant le droit au logement opposable, le délégué régional de la fondation rappelle que le droit au logement est reconnu par la loi de 1990 dite "loi Besson". « Elle était chargée de mettre en œuvre le droit au logement. Les lois successives depuis ont permis des avancées », souligne-t-il tout en constatant « que l’on [est] obligé de promulguer une nouvelle loi en 2007 pour rendre ce droit opposable devant les tribunaux ».
Pour Christian Ballet, « cette loi ne règle pas le problème de fond car il faut construire des logements sociaux ».
« Le problème du logement a pris une telle ampleur en France et à La Réunion que ce n’est pas aux associations seules de régler le problème », explique-t-il en se référant à la ligne d’action de l’abbé Pierre. « Il faut un engagement politique. C’est d’abord à l’État et aux collectivités territoriales d’apporter une réponse à ce problème. Il manque des logements sociaux en France et à La Réunion ».
La Fondation abbé Pierre « demande des dispositifs spécifiques et des moyens pour faire appliquer les lois existantes », précise son délégué régional qui déplore les engagements pris mais pas tenus dans ce domaine.
Il souligne que le prochain Rapport sur le mal logement, présenté le 1er février prochain, sera le jour même soumis aux partis qui présentent un candidat à l’élection présidentielle. L’objectif est de faire du droit au logement un enjeu de la campagne électorale. Ce document sera présenté en avril prochain à La Réunion.

Manuel Marchal


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