Xavier Emmanuelli, ancien secrétaire d’État à l’action humanitaire du gouvernement Juppé

Le droit au logement relève du devoir de l’État

25 janvier 2006

Le docteur Xavier Emmanuelli était vendredi dernier l’invité d’une émission de France Inter, Café Bazar. Les auditeurs réunionnais qui auront croisé radiophoniquement sa route, un peu avant 14 heures, auront dressé l’oreille à ses propos, en pensant à notre situation de crise du logement à La Réunion. Une affirmation en effet est ressortie avec force de son intervention : l’État est investi pleinement et sans restriction de la responsabilité du logement social sur le territoire de la République. Une vérité qu’il est bon d’entendre rappelée par une personne qui est en quelque sorte un “orfèvre en la matière”.

Qui est Xavier Emmanuelli ?
Médecin, pionnier du SAMU, secrétaire d’État chargé de l’action humanitaire d’urgence dans le gouvernement d’Alain Juppé, fondateur du SAMU social de Paris, il fait autorité en matière de lutte “sur le terrain” contre l’exclusion sociale.
Les déclarations qu’il est amené à faire le sont toujours sur un ton très mesuré, le ton d’un homme qui a été confronté tout au long de sa vie professionnelle et politique aux réalités des quotidiens les plus critiques, souvent cachés, souvent niés même par notre société. Ses prises de position sont celles d’un homme d’action qui a toujours orienté sa réflexion vers des propositions constructives et novatrices.

Qu’a donc dit Xavier Emmanuelli vendredi dernier sur France Inter ?
Quelque chose à la fois d’évident et d’étrangement brouillé souvent aux yeux de l’opinion. Quelque chose de fondamental dans notre démocratie, une vérité qui clarifie les grands domaines de responsabilité de l’État, une vérité incontournable que chacun doit garder présente à l’esprit dès lors qu’on parle d’exclusion et en particulier de droit au logement. Droit fondamental, à la fois droit élémentaire de survie et droit au respect de sa dignité pour chaque citoyen.

"Le droit au logement opposable"

L’émission Café Bazar met les auditeurs au contact de l’invité, qui réagit à chaud à leurs interventions. Vendredi, une femme a raconté - en termes sobres et retenus - la détresse dans laquelle elle est plongée : "Je vais être expulsée le 31 mars. Il n’y a pas de solution. Il me faudrait un logement plus petit et moins cher. Mais aucun logement ne se libère. Je ne peux plus faire face au paiement de ce loyer. Et je vais me retrouver dehors à cause de ça".

Voici la réponse que lui a apportée Xavier Emmanuelli. Les Réunionnaises et les Réunionnais en mal de logement décent en pèseront la portée, au niveau des principes tout d’abord, au niveau ensuite des luttes à mener pour le respect de nos droits :
"Avec ma casquette de président du Haut Comité pour le Logement des Personnes Défavorisées, (je vous dirai que) nous nous battons pour le droit au logement opposable.
Pour les cas comme celui-ci, qu’il y ait une instance à laquelle on puisse réclamer son logement - quand réellement on est de bonne foi, quand on est sur cette liste d’attente -, que cette instance soit responsable et si on ne trouve pas de logement dans des conditions dignes et dans un délai court, qu’on puisse se retourner contre l’État. Mais ce n’est pas encore gagné, le droit au logement opposable à une instance, c’est une lutte et c’est là-dessus que je me bats".

L’affirmation d’un responsable

Vous avez bien lu cette phrase : (...) "qu’on puisse se retourner contre l’État". Une telle affirmation n’a pu être lancée à la légère par le président du Haut Comité pour le Logement des Personnes Défavorisées, ancien secrétaire d’État du gouvernement Juppé.
C’est l’affirmation d’un responsable, à la fois médecin et homme politique, sur la brèche depuis des décennies, au contact des exclusions les plus sévères, en particulier celles causées par le manque insupportable de logements sociaux adaptés aux besoins.

"Se retourner contre l’État"

Si les victimes de ce rejet inacceptable sont fondées à "se retourner contre l’État", c’est bien que le logement, le droit de chacun au logement relève du devoir fondamental de l’État. Et Xavier Emmanuelli explore logiquement les implications de ce droit et de ce devoir, en faisant de ces recours des exclus du logement contre l’État l’objectif même de sa lutte militante : "c’est là-dessus que je me bats".

Cette prise de position, exprimée avec une telle clarté, ne peut que renforcer, s’il en était besoin, la conscience de la légitimité des revendications réunionnaises qui exigent le respect du droit intangible des Réunionnais à un logement décent.
Or on connaît la situation de crise sans précédent de la production de logements sociaux dans notre île (1) . Les besoins sont immenses, les blocages inquiétants, le fossé entre les objectifs et les résultats est béant, mais des solutions ont été avancées - par les acteurs même de la filière - : elles doivent être d’urgence mises en pratique.

Alain Dreneau

(1) Voir à ce propos les 2 derniers articles traitant de ce sujet dans “Témoignages” du 19 janvier 2006 et “Témoignages” du 20 janvier 2006.


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