Une situation dramatique dénoncée

Les Saint-Paulois ne peuvent plus habiter Saint-Paul

19 septembre 2005

Saint-Paul, peut-être plus qu’aucune autre ville, illustre la situation dramatique que connaît La Réunion en ce qui concerne le manque de logements sociaux. Huguette Bello et Jean-Marc Gamarus déplorent l’absence de politique d’aménagement de la part du Conseil municipal et pire, dénonce un refus du maire de vouloir s’engager à agir dans ce domaine.

Madame X témoigne : elle s’est séparée de son mari qui lui faisait violence. Elle a appelé le 115 et a été orientée un premier temps vers la résidence les Jonquilles. À la demande d’un logement social pour elle et ses enfants, elle l’aurait obtenu depuis le premier avril comme le lui confirme un courrier, mais elle attend toujours. En instance de divorce, elle risque de perdre la garde de ses enfants si elle n’a pas de logement. Ce cas particulier montre combien la situation du parc du logement social est particulièrement dramatique.
Entre autres chiffres, la députée Huguette Bello souligne que 7 communes réunionnaises ont obligation d’avoir 20% de logements sociaux, et parmi celles-ci, seules Sainte-Marie, le Tampon et Saint-Paul ne respectent pas la loi et devraient s’acquitter d’une amende de 152 euros par logement manquant. Outre l’inexistence de logements sociaux, Huguette Bello souligne "la vraie difficulté rencontrée même par les classes moyennes pour trouver un logement adapté" et fait remarquer que "le manque d’action politique dans ce domaine conduit aux logements sans permis, au mitage des terrains et perturbe les jeunes en âge de fonder une famille".

Les pauvres, hors de la ville ?

Le principe qui doit orienter toute réflexion sur l’urbanisme est celui de la mixité sociale pour éviter la formation de ghetto. À Saint-Paul, devant la multiplication de riches résidences à digicode, la députée se demande si bientôt il n’y aura pas aussi un vigile armé ? Elle regrette que la politique actuelle à Saint-Paul consiste à "rejeter hors des centres-villes et des quartiers résidentiels les plus pauvres". Elle constate "un rejet de la mixité, une résistance à la construction de logements sociaux" comme le disent les constructeurs eux-mêmes. Or, souligne la députée, "le politique a un rôle à jouer, en limitant par exemple les taxes foncières, car aujourd’hui, nombreuses sont les familles qui, à cause de la flambée des prix du terrain, ne peuvent plus s’acquitter de cette taxe". Il faut pour elles, de toute urgence, "essayer de réaménager l’espace, d’améliorer les logements existants qui connaissent une détérioration encore plus grande, comme à Sans Souci où rien n’a été fait depuis 20 ans, malgré les promesses toujours renouvelées".

L’exclusion sociale à perpétuité

"Les collectivités ont un rôle important dans l’épanouissement des personnes. Un enfant qui grandit dans un bidonville a moins de chance de réussir, et s’il réussit, c’est au prix d’un grand mérite", souligne Huguette Bello. "Les disparités du logement marquent les inégalités des revenus et des chances, perpétue l’exclusion sociale de génération en génération". Pour faire face à ce scandale, l’État ne fournit que des moyens ridicules (66 millions d’euros) et prétextera n’avoir pas d’argent, en se réfugiant derrière le trou de la sécurité sociale, mais la députée rappelle que entre 2000 et 2005, les plus riches ont été exonérés de 50 milliards d’euros en baisse d’impôt, 10 fois le budget du logement en France. Une seule interrogation : "Combien de taudis, de bidonvilles, de squats pourrait-on réaménager ?"
Elle poursuit : "Alain Bénard, l’alter-mondialiste d’occasion, foule la charte de Porto Allègre allègrement en matière de spéculation : le prix du mètre carré de terrain à Rocquefeuil est passé de 300 euros à 791 euros, les prix ont augmenté de plus de 125% en centre-ville. Le petit fonctionnaire qui a des enfants ne pourra jamais acheter, c’est une situation dramatique".

28 logements par an pour 7.000 demandes

Pour Jean-Marc Gamarus : "La cohésion sociale c’est la famille, la famille c’est le logement. Si on veut redonner un sens à la politique, il faut agir dans ce domaine. Les habitants de Saint-Paul souhaitent accéder enfin au minimum : un logement salubre. Les bailleurs sociaux signalent les oppositions à la construction sociale. Pourtant, 7.000 demandes de logements sociaux sont enregistrées dans la commune. Est-ce la construction moyenne de 28 logements par an qui résoudra le problème ?". Il termine : "La municipalité n’a pas su gérer son territoire. Il n’y a aucune réserve foncière pour faire face à la flambée des prix, même agricole. Quel agriculteur a les moyens de s’installer à Saint-Paul ? Cette situation est aggravée par la défiscalisation, des gens de Métropole achètent les terrains sur catalogue, construisent et louent leurs appartements aux gens de La Réunion" ?.
Pour Huguette Bello, "face à ce scandale innommable, il faut réduire fortement le prix du foncier, procéder, comme le conseille le gouvernement, par réquisition, pour l’intérêt général".
Faut-il rappeler que La Réunion compte 22.000 logements insalubres ? Que pour Saint-Paul, il faudrait un rythme minimum de 800 logements sociaux par an, au lieu de 28 logement en 2003 ?.

Eiffel


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