Plus de 180.000 logements à construire en 25 ans

Proposer le volet logement de ’Réunion 2030’

8 avril 2008, par Manuel Marchal

Dans son discours vendredi dernier, le président de la République évoque des réformes et avance des propositions tenant compte des problèmes rencontrés par la France. Or, La Réunion a une situation spécifique qui n’est pas celle de la France. Engouffrons-nous dans la brèche pour nous rassembler afin de proposer ensemble des propositions concrètes pour la modernisation des politiques publiques. Cela peut être par exemple revendiquer un volet logement du projet ’Réunion 2030’, élaboré à partir de propositions réunionnaises.

En France, Nicolas Sarkozy propose depuis l’an dernier une série de mesures pour faire face à la pénurie de logements. Ces propositions sont dans la continuité du programme pour lequel il a été élu. C’est par exemple la déduction fiscale des intérêts des prêts.
Vendredi dernier, il a fait de nouvelles annonces lors de son discours sur la modernisation des politiques publiques. D’après lui, les HLM ne jouent pas leur rôle. Il met le doigt sur des inégalités territoriales. Il propose également une réutilisation du 1% Logement.
Sur la question du logement social, Nicolas Sarkozy constate qu’en France, 70% des familles sont éligibles. Autrement dit, cela voudrait dire que 70% de la population de la quatrième puissance économique mondiale relèvent de critères sociaux. Le président de la République dit qu’il va réformer. Les propositions seront à nouveau débattues au mois de mai.

25.000 logements d’urgence

À La Réunion, la crise du logement atteint des sommets. Plus de 25.000 familles sont sur la liste d’attente d’un logement social, des dizaines de milliers vivent dans l’insalubrité ou la sur-occupation. Ces chiffres sont récurrents. Ils traduisent le caractère structurel de la crise.
La semaine dernière, l’INSEE a présenté ses nouvelles projections démographiques. En 2030, c’est-à-dire dans 23 ans, la population dépassera le million d’habitants, selon le scénario intermédiaire. Cela signifie qu’il faudra 468.000 logements, soit 188.000 de plus qu’en 2005.
Maintenir pendant 25 ans un rythme annuel de construction supérieur à 7.500 logements pendant 25 ans, avec une part largement majoritaire de logements sociaux, est sans doute un des plus grands défis de l’Histoire de La Réunion. Ce défi est devant nous.
Les acteurs du logement à La Réunion ont tout intérêt de se saisir du contexte actuel pour proposer un programme d’investissement lourd qui pourra s’intégrer dans le projet Réunion 2030. En effet, le gouvernement veut réformer, autant s’engouffrer dans la brèche et anticiper.
Le moment est venu pour que La Réunion formule ses propositions concrètes pour la modernisation des politiques publiques. Une rencontre d’urgence de tous les acteurs pourra définir des premières propositions pour atteindre cet objectif de plus de 180.000 logements en moins de 25 ans en s’appuyant sur le droit au logement opposable.

180.000 logements d’ici 2030

Créé dans le cadre de cette loi, le Comité national de suivi a publié l’an dernier un rapport dans lequel il préconise une série de mesures spécifiques pour l’Île de France, car cette région est en France la plus concernée par l’application de ce texte (voir encadré).
La Réunion a aussi une situation spécifique. L’urgence impose ici la mise en œuvre d’urgence de mesures spécifiques pour faire face à la crise et anticiper sur les chantiers à venir.
Elle appelle également à une remise à plat de toutes les politiques menées jusqu’ici. Un audit pourrait être mené afin de faire le bilan de la gestion de la politique du logement à La Réunion afin d’identifier précisément des causes structurelles de la crise.
Ces propositions pourraient être soutenues par la future loi-programme. Ce texte serait un levier pour lancer cette dynamique. Dans le "Nouveau contrat social", le PCR avait fait des propositions. Pendant la campagne de l’élection présidentielle, l’Alliance avait fait également des propositions dans le domaine du logement social (voir encadré). Les candidats à la Présidentielle avaient répondu par écrit au président de l’Alliance, Paul Vergès. Le futur président de la République affirmait une « convergence de vue » sur la plupart des « mesures urgentes et prioritaires » développées par l’Alliance. Parmi elles, le logement, au sujet duquel Nicolas Sarkozy évoquait « la défiscalisation du logement social ».
Au moment où ce dernier annonce qu’il va de toute façon réformer, il est important d’aller au-devant avec des propositions réunionnaises. Engouffrons-nous dans la brèche !

Manuel Marchal


Logement social : Les propositions de l’Alliance

Dans le document approuvé par les candidats à la Présidentielle de 2007 figurent les propositions de l’Alliance pour le logement social. Nicolas Sarkozy avait fait part de sa « convergence de vue ».

1 - définir une programmation pluriannuelle de la LBU à la hauteur des besoins ;
2 - construire - en plus de ce qui est programmé actuellement - 25.000 logements en 3 ans par appel à projets ;
3 - recenser les disponibilités foncières des collectivités, les espaces des villes et des bourgs pouvant être densifiés, préservant ainsi les terres agricoles du mitage ;
4 - renforcer les fonds du FRAFU ;
5 - recenser les sites proches de l’itinéraire du tram-train afin d’y implanter les nouveaux logements, conciliant ainsi besoins de déplacements et de logement ;
6 - défiscaliser le logement social ;
7 - taxer la plus-value foncière afin de prévenir les opérations purement spéculatives et préserver ainsi l’aménagement du foncier à vocation sociale ;
8 - lancer un concours international d’architecture haute qualité environnementale (H.Q.E.) pour le logement social notamment et portant sur les 200.000 logements à bâtir.


Ile de France : mesures exceptionnelles pour situation spécifique

Dans son premier rapport, le Comité pour l’application du droit au logement opposable appelle à prendre en compte les spécificités de la Région Ile de France.
C’est en effet dans ce territoire d’un peu plus de 11 millions d’habitants que sont concentrés 40% des recours en justice potentiels. Le Comité y constate « une situation de crise particulièrement aiguë ». Cette situation s’illustre par « environ 72.000 logements attribués par an tous contingents confondus pour 230.000 ménages concernés ». Il appelle à « mettre en place un "Plan Marshall" du logement pour l’Ile de France sous l’autorité du ministre du Logement ». Face à « une situation d’une gravité exceptionnelle », « un plan d’urgence doit donc être mis en place sans attendre, et sans que l’Etat hésite à recourir à des moyens exceptionnels ».
Ce Plan fixe une production annuelle de 30.000 logements pendant 5 ans. Pour atteindre ce résultat, le Comité cite des moyens exceptionnels, notamment : nommer un "Préfet logement" concentrant l’ensemble des prérogatives liées à l’application du droit au logement opposable, « autoriser l’Etat à préempter les terrains et immeubles nécessaires à la réalisation du plan d’urgence », « mandater des organismes pour réaliser les logements sociaux sur le territoire des communes ayant fait l’objet d’un constat de carence dans l’application de l’article 55 de la loi SRU ».


Logements : une offre structurellement inadaptée

Comme le confirme "Le Quotidien" d’hier, la défiscalisation arrive à bout de souffle. Dans certaines villes, l’offre de logements défiscalisés dépasse largement le nombre de locataires potentiels. C’est le signe d’une inadaptation structurelle et d’un dispositif qui arrive en bout de course pour les investisseurs privés.
Étant donné la situation sociale à La Réunion, rares sont ceux qui peuvent entrer dans les critères permettant d’accéder aux logements construits grâce à la défiscalisation.
C’est tout le problème de l’inadaptation de la structure de l’offre à La Réunion.
Elle existe également au niveau du logement social neuf. L’effondrement du rythme de construction des logements locatifs très sociaux (LLTS) a pour résultat qu’un tiers des familles réunionnaises ayant droit à un logement social n’ont pas les moyens d’y accéder, car pour ces familles, les loyers du parc HLM neuf sont trop élevés.
Manque d’offres dans les LTS et dans le secteur dits "intermédiaires" sont deux caractéristiques de la crise du logement à La Réunion.

Les atouts de La Réunion

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