Hier midi sur les ondes de Radio Réunion

Protestation unanime devant la gravité de la crise de l’habitat

7 septembre 2005

Tous les participants à l’émission “Questions d’actualité” ont mis l’accent sur la nécessité pour l’État d’assumer ses responsabilités face au droit des Réunionnais au logement. Ils ont également souligné qu’il est nécessaire que tous les acteurs réunionnais s’entendent et agissent ensemble pour obtenir du gouvernement des mesures adaptées à nos besoins.

Depuis la rentrée et l’instauration de la nouvelle grille des programmes sur Radio Réunion, plusieurs problèmes cruciaux de La Réunion ont été évoqués et ont fait l’objet d’échanges intéressants entre les invités de la station du Barachois dans le cadre de l’émission “Questions d’actualité” diffusée après le journal de la mi-journée. Ce fut encore le cas hier, où fut abordée la question de la grave crise que traverse la politique de l’habitat social dans notre île. Même si durant la vingtaine de minutes consacrées à l’émission, le problème ne put être traité de manière exhaustive, les différents invités ont mis le doigt sur quelques aspects essentiels.
C’est ainsi qu’une jeune mère de famille a exprimé toute sa détresse devant le fait d’être privée de logement. Elle a également expliqué devant les difficultés de voir ce droit respecté, elle a fini par occuper un logement vide. "Je savais que c’était illégal, mais je n’avais pas d’autre choix pour mettre mes enfants à l’abri", a-t-elle déclaré en substance.

"Rencontrez-vous !"

Cette maman a reçu le soutien de l’association “Momon Papa lé la”, dont le porte-parole a une nouvelle fois souligné le manque de moyens mis en œuvre pour permettre aux personnes les plus fragiles de se loger décemment. Soulignant qu’il était ni le partisan ni l’opposant d’aucun responsable politique, il a notamment déploré qu’il y a une insuffisance de travailleurs sociaux à l’écoute des familles en difficultés.
Patrick Savatier a lancé un cri d’alarme en direction de tous les décideurs : "Nous devons tous ensemble, citoyens et politiques, entrer en guerre contre la misère. Les politiques doivent arrêter leurs batailles de clochers. Arrêtez de vous battre les uns contre les autres. Rencontrez-vous ! Levez-vous pour qu’il n’y ait plus d’enfants qui meurent brûlés dans un appartement privé d’électricité !"

"Manque de soutien aux collectivités"

Sur un autre ton mais avec autant de conviction et en s’appuyant sur les terribles chiffres de la construction de logements sociaux, Michel Oberlé a confirmé que La Réunion traverse une des plus graves crises de l’habitat social en raison des carences de l’État. Le délégué de l’ARMOS (Association réunionnaise des maîtres d’œuvre sociaux) rappelait qu’au début de cette année, les huit bailleurs de logements sociaux avaient enregistré 25.000 demandes à jour. Ils espéraient pouvoir reloger 5.000 foyers durant cette année, soit un millier dans des logements neufs et 4.000 par rotation, c’est-à-dire par l’accès de locataires sociaux à des logements de meilleur standing dont ils deviennent propriétaires. "Or, à la date d’aujourd’hui, nous en sommes à seulement 2.800 et peut-être nous atteindrons seulement les 4.300 d’ici la fin de l’année", a déclaré Michel Oberlé.
Le représentant de l’ARMOS a souligné qu’en raison notamment de l’insuffisance du nombre des constructions neuves et des moyens financiers des ayants droit, le taux de rotation diminue et peu de locataires sociaux peuvent sortir de leur logement pour accéder à un autre habitat. Il a également déploré les effets pervers de la défiscalisation au niveau du coût du foncier et des constructions. De même, il a déploré "le manque de soutien aux collectivités pour l’aménagement des terrains à bâtir".

"Des moyens insuffisants"

Enfin, Michel Oberlé a rappelé que les locataires des départements d’Outre-mer sont victimes d’une discrimination au niveau de l’aide personnalisée au logement (APL) par rapport à leurs homologues de l’hexagone.
Le quatrième et dernier invité de RFO-Radio était Ibrahim Dindar, vice-président (UMP) du Conseil général. Celui-ci a d’abord reconnu que "les moyens du Département sont insuffisants" et que les crédits versés par l’État ne correspondent pas aux besoins de La Réunion en logements sociaux (voir encadré) .
Évoquant tour à tour la maîtrise du foncier, la prise en charge de l’aménagement des terrains à bâtir et le coût de la construction, le représentant du Département a souligné que "ces trois maillons de la politique de l’habitat social sont en panne" et qu’il y a "une responsabilité collective à tous les niveaux dans la crise du logement social". Il a ajouté que "de nombreux courriers avaient déjà été envoyés au gouvernement à ce sujet par la présidente du Conseil général, Nassimah Dindar", mais que l’action de la collectivité dans ce sens "n’est pas suffisante".

"Agissons pour obtenir des moyens suffisants"

Commentant l’occupation illégale d’un logement vacant par la mère de famille citée plus haut, Ibrahim Dindar reconnaît "des circonstances atténuantes à ces personnes qui portent atteinte au droit de propriété".
Devant les carences criantes de la politique de l’État en matière d’habitat social, l’élu UMP tente bien sûr d’atténuer la responsabilité de la majorité gouvernementale. Mais c’est pour aussitôt ajouter : "il faut que les gens sortent des sentiers battus et se remettent en question. Notre société de consommation, avec les bagnoles, le beau linge etc... masque la réalité de la misère. Allons ouvrir les yeux, soyons solidaires entre nous. Arrêtons la politique politicienne. Agissons pour obtenir des moyens suffisants".
Pas étonnant alors, qu’après l’appel lancé par le représentant de “Momon Papa lé la” aux élus à travailler ensemble, Ibrahim Dindar ait répondu : "j’applaudis des deux mains à ces propos".

Les paroles et les actes

Les lecteurs de “Témoignages” connaissent les campagnes d’information et d’alerte menées par notre journal sur ce problème de l’habitat pour les plus défavorisés. Ils savent également que diverses organisations politiques et associations ont mené de nombreuses actions pour faire respecter le droit du Réunionnais au logement.
Ils se souviennent en particulier de la plate-forme issue de la Semaine réunionnaise du Logement tenue en avril 2003 ou encore des dernières propositions émises en ce sens par le Parti communiste réunionnais et adressées au gouvernement.
On ne peut donc que se féliciter du contenu de ces échanges d’hier midi sur Radio Réunion. Ils montrent que l’intérêt pour ce problème est très partagé.
Il convient à présent de faire en sorte que les paroles ne soient pas contredites par certains actes et que se renforce l’action commune en faveur d’une politique du logement social adaptée aux besoins spécifiques de La Réunion.

L. B.


Le gouvernement va accentuer sa pression sur les budgets locaux

Selon le Premier ministre, les dépenses publiques sont "supérieures" à ce qu’elles devraient être et il a de nouveau souhaité que ces dépenses soient "mieux maîtrisées".
À cette fin, son gouvernement a déjà tiré la sonnette d’alarme sur la "dérive" des finances des collectivités locales et des dépenses sociales. Pour l’avenir, "nous ferons tout pour tenir nos engagements", a déclaré Dominique de Villepin.
En fait, pour les collectivités locales, il ne s’agit pas d’un déficit mais d’un besoin de financement, comme l’a rappelé le rapport de l’Observatoire des finances locales sur l’état des lieux des finances locales en 2005.
On observe en 2004 un "besoin de financement" de 1,9 milliard d’euros. Cela pose tout le problème des moyens d’investissement des collectivités - en particulier à La Réunion - et de l’aggravation de leurs difficultés en fonction des transferts de compétences.


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