Impasse dans la production de logements sociaux

Tout un système est en train de s’écrouler

22 septembre 2012, par Manuel Marchal

La garantie demandée au Conseil général par les banquiers qui prêtent aux bailleurs sociaux révèle l’ampleur de la crise. La confiance est morte. Alors que les emprunteurs disposent d’un capital immobilier conséquent et d’actionnaires solides, le prêteur exige une caution supplémentaire qui pénalise les capacités d’investissement d’une collectivité et met la production en retard.

Le débat autour de la garantie que doit donner le Conseil général pour permettre le lancement de la production de centaines de logements sociaux est une nouvelle illustration de l’impasse dans laquelle nous nous trouvons. Ce serait même ubuesque s’il n’y avait pas la gravité de la pénurie de logements.

Le logement est une compétence de l’État

C’est tellement vrai qu’une loi, le DALO (droit au logement opposable), prévoit qu’un demandeur de logement social puisse traîner l’État devant les tribunaux s’il n’obtient pas satisfaction dans un délai raisonnable. Concernant dans un premier temps les familles les plus en détresse, depuis le 1er janvier, ce droit au logement opposable s’applique pour tous. L’État a donc failli dans la construction de 20.000 logements en 3 ans à La Réunion !

L’État a décidé de déléguer au Conseil général une partie de la politique du logement. C’est la collectivité qui organise notamment le Conseil départemental de l’habitat (CDH). Elle soutient aussi la construction et la réhabilitation par le versement de subvention. Mais surtout, le Conseil général garantit les prêts contractés par les bailleurs sociaux auprès des banques pour produire de nouveaux logements sociaux. Quelle erreur !

L’État doit assumer

Depuis plusieurs semaines, la collectivité est la cible des critiques. Le Conseil général voit chaque année ses capacités financières amoindries par des transferts de charge non compensés à l’euro près par l’État. Ce dernier doit largement plus de 300 millions d’euros au titre de la gestion du RSA. Avec le gel des dotations imposé aux collectivités, ces contraintes ont obligé le Département à se recentrer sur ses compétences exclusives. Cela a des conséquences pour les associations qui ont besoin de subventions.
Si le Conseil général donne sa garantie à un prêt, il doit l’inscrire dans son budget et cela diminue encore sa capacité à emprunter, donc à investir et créer des emplois.
C’est là que se situe le nœud du problème. Cette année, le Conseil général tarde à accorder sa garantie, et aussitôt, de nombreux acteurs lui tombent dessus épargnant de manière très surprenante le principal responsable de cette situation : l’État.

Un exemple est révélateur. La SIDR est une société détenue majoritairement par l’État. Elle gère plus de 20.000 logements, ce qui est un capital immobilier très important. Malgré toutes ces garanties, la Caisse des Dépôts et Consignation, le prêteur, demande la caution du Conseil général.

Cela signifie qu’une banque d’État ne fait même pas confiance à une société détenue par l’État. C’est la preuve d’un système totalement dépassé, au bord de l’écroulement.

Construisons 50% moins cher

Il est évident qu’avec l’aggravation de la crise économique, il sera toujours plus difficile de garantir. Le mode de production est également en cause. Il est à l’origine de logements sociaux dont le prix dépasse les 2.000 euros le mètre carré. La bulle inflationniste ne sera bientôt plus tenable.
Si rien ne change, le point de blocage se rapproche, ce qui aura des répercussions très graves pour les plus de 20.000 familles réunionnaises en attente d’un logement social.
Devant l’urgence, que l’État prenne ses responsabilités et garantisse la demande. Le logement est sa compétence, il doit l’assumer.

Dans un second temps, il faudra bien arriver à des modes de production capables de construire des logements adaptés aux capacités financières des familles qui y habitent. La moitié des Réunionnais vivent en dessous du seuil de pauvreté. S’ils ne recevaient pas une subvention, ils ne pourraient pas payer le loyer d’un logement social alors que justement, ce type de logement doit leur servir d’ascenseur social.
Le PCR avance que la contribution des ménages aux charges de l’habitat doit être progressive et limitée pour que le reste à vivre des familles soit raisonnable. Il dit également qu’il est possible et urgent de produire massivement à 900 euros le m2. Tout le montage actuel ressemble à une usine à gaz, complètement inflationniste. Il faut appel au savoir-faire des Réunionnais.

M.M.

« Ce n’est plus un trou. C’est un précipice et le fond, on l’a pas touché. Nos entreprises sont au bord de l’asphyxie et les employés vont se retrouver au chômage. Certains de nos adhérents parlement de 50 à 100 licenciements ».

Bernard Siriiex, président de la FRBTP

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