Grève à Bois-Rouge

90% des travailleurs dans la lutte

9 septembre 2006

Au 5ème jour de grève, les salariés ont permis aux planteurs de livrer normalement leurs cannes à l’usine de Bois-rouge. Un geste de bonne volonté lié à l’ouverture d’une nouvelle négociation. Pour les planteurs, l’urgence est à la conclusion d’un accord entre des travailleurs qui demandent une hausse de salaire et une direction qui jusque-là refuse toute discussion sur ce point.

Bois-Rouge, 5ème jour de grève des travailleurs de l’usine. Ce vendredi matin, le ballet des tracteurs et des cachalots a repris, sous la surveillance d’une entreprise de gardiennage et des forces de police : les ouvriers ont choisi d’alléger le piquet de grève car des négociations avec la direction sont prévues dans l’après-midi, à l’hôtel le Saint-Denis dans la capitale. Il est 8 heures, c’est le moment où se prépare le café sur le site de la lutte, sous une bache battue par un vent violent en cette nouvelle journée d’action et de négociation qui commence.
Depuis le début de la semaine, les salariés de l’usine sucrière sont dans l’obligation de cesser le travail pour obtenir de la Direction de Bois-Rouge la satisfaction de plusieurs revendications. Le mouvement, lancé à l’appel de la CGTR, est massivement suivi, affirme Jean-Yves Payet, secrétaire général de la CGTR-Est : "sur 94 ouvriers, on dénombre 86 grévistes".

Négociations bloquées

La veille, les deux parties ont discuté une bonne partie de la journée. Les revendications des salariés portent sur le renouvellement des contrats des travailleurs saisonniers et sur les salaires. Sur le premier point, travailleurs et patrons ont pu avancer. Il s’agit de mettre fin à l’incertitude qui habite chaque ouvrier saisonnier lorsque la campagne sucrière touche à sa fin. Lorsque le dernier cachalot livre son chargement, que la dernière tonne de canne est transformée en sucre et quand les machines arrêtent de tourner, le travailleur se demande si l’année prochaine, il sera repris. Hier en fin de matinée, un pas a été fait dans le bon sens, avec à la clé une réembauche en priorité des saisonniers. Mais rien n’est acquis car les négociations butent sur la question des salaires.
Les grévistes demandent une augmentation d’un euro par heure de travail pour tous et l’attribution des primes que touchent les permanents aux saisonniers. Et hier, la direction n’avait pas transigé sur cette revendication. Elle affirme qu’il n’est pas possible de revenir sur l’accord NAO signé en mai dernier et enregistré à la Direction du Travail. Elle précise que le médiateur désigné pour faciliter la résolution du conflit ne peut pas non plus remettre en cause ce texte. Mais le problème, c’est que cet accord salarial a été signé par des syndicats minoritaires. Et le mouvement de grève montre qu’au moins 90% des travailleurs de l’usine ne l’approuvent pas, puisqu’ils se sont mis en grève afin d’obtenir des avancées qui ne figurent pas dans le document déposé avant le début de la campagne sucrière. Et pour Jean-Yves Payet, "la direction fait traîner les choses, elle bloque les négociations".

Non aux cadences infernales

Lors d’une conférence de presse tenue hier à l’emplacement du piquet de grève, Jean-Yves Payet a souligné que le blocage vient de la direction. Le syndicaliste ne comprend pas pourquoi "la direction dépense en frais de gardiennage, d’huissier, d’avocat et ne donne rien aux ouvriers". Il se fait également l’écho d’un message du comité d’hygiène et de sécurité de l’entreprise. Ce dernier met en garde. Le CHSCT estime que les charges de travail que l’on risque d’imposer aux ouvriers pour accélérer la cadence journalière de traitement des cannes quand le conflit social prendra fin est une source d’accidents. "10 heures de travail par jour, c’est inadmissible", souligne Jean-Yves Payet. Quant aux relations avec les planteurs qui ne peuvent pas livrer du fait de l’arrêt des machines, le syndicaliste précise que les agriculteurs sont compréhensifs. Jean-Yves Payet ajoute que lorsque des négociations ont lieu, les planteurs ont accès normalement à la plate-forme de Bois-Rouge, et les cachalots peuvent décharger. C’est ce qui était d’ailleurs le cas hier matin.
Du côté des planteurs, Jean-Yves Minatchy, président de la CGPER, souligne que la priorité est de "trouver une solution tout de suite pour limiter les dégâts". Entre Sainte-Rose et Cambaie, les livraisons se font au ralenti. Hier matin, seules les plates-formes de La Mare, Bois-Rouge, Pente Sassy et Ravine Gilssante réceptionnaient des cannes, alors que les cachalots déchargeaient hier matin celles livrées la veille à Beaufonds.
"Les cannes restent au champ, le planteur dépend du cycle de la canne et s’il attend trop longtemps avant de couper, la richesse en sucre diminue". Cela se traduit par une perte de revenu pour le planteur, que rien ne peut compenser. "Pour le moment, nous sommes dans une impasse, nous souhaitons que les deux parties trouvent un accord rapide".

Les planteurs pris "dans un étau"

"Nous comprenons la position des salariés, mais chacun doit faire un pas car nous planteurs, nous sommes pris dans un étau". C’est en effet la moitié du potentiel industriel de la filière canne qui est concernée. Bois-Rouge transforme en sucre les cannes de tous les planteurs dont l’exploitation se situe entre Saint-Paul et Sainte-Rose.
Pour le syndicaliste, il est essentiel d’épuiser tous les points sur lesquels on ne s’entend pas jusqu’à ce que l’on trouve un accord. C’est à dire qu’à partir du moment où commence la négociation, elle ne se termine pas avant qu’un accord ne soit trouvé. Jean-Yves Minatchy rappelle plusieurs longues discussions qui ont précédé le dénouement heureux d’un conflit dans lequel les planteurs payaient les pots cassés. À la centrale thermique du Gol, au terminal sucrier du Port, à chaque fois on a épuisé toute l’énergie pour aller au bout et signer un accord qui a permis le redémarrage de la campagne, précise-t-il en substance.
À l’heure où se déguste entre camarades le café du matin servi au piquet de grève, une nouvelle négociation avec la direction s’annonce. Déterminés, les travailleurs continuent la lutte pour que leurs revendications salariales soient satisfaites.
Hier soir, les négociations n’avaient toujours pas trouvé d’issue et la grève était maintenue.

M.M.


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