En France, les pétroliers acceptent une baisse de leurs profits

À La Réunion, « l’augmentation prévue » tombe à l’eau

29 août 2012, par Manuel Marchal

Trois centimes de baisse du prix hors taxe, trois centimes de baisse des taxes perçues par l’État : la ristourne consentie aux automobilistes français sera de 6 centimes pendant trois mois. À La Réunion, le ministre des Outre-mer vient d’annoncer un gel des prix en attendant le résultat d’une concertation.

En février dernier, des émeutes contre la vie chère se déclenchent quelques semaines après l’annonce du prix de la bouteille de gaz à 15 euros grâce à des subventions des collectivités. Pour les carburants, la Région est bien incapable de rééditer la même performance pour tous. Le pouvoir central de l’époque soutient Didier Robert et affirme qu’il n’est pas possible de baisser les prix de 25 centimes. Pendant ce temps, les pétroliers observent bien tranquillement. Quand la situation s’embrase, le pouvoir décide de protéger en priorité les installations du monopole pétrolier.

L’impasse des subventions

Pour calmer la population, la solution mise en œuvre est un gel des prix des carburants. Comme la baisse du prix de la bouteille de gaz, cela ne coûtera pas un centime aux pétroliers. C’est le contribuable qui va payer, sous la forme d’une subvention versée par la Région aux compagnies pétrolières. Elle compense à l’euro près le supposé manque à gagner que ces groupes sont censés supporter du fait du blocage des prix.
Chacun a pu constater la coïncidence de dates entre la durée de versement de cette subvention, et le calendrier électoral. Durant l’élection présidentielle et les législatives qui ont suivi, les prix du super et du gazole sont restés les mêmes que ceux affichés le 1er mars. Et 15 jours après la défaite totale de l’UMP, la Région a coupé sa subvention.
Au total, 16 millions d’euros ont été donnés aux compagnies pétrolières, ce sont autant d’investissements perdus. Cela donne aussi une idée de l’impasse vers laquelle conduit ce type de décision, car il n’incite pas les compagnies pétrolières à baisser leurs prix.

Baisse du prix hors taxe en France

"Témoignages" a rappelé hier qu’à La Réunion, le prix hors taxe par litre est 13 centimes (gazole) et 14 centimes (super) plus chers que le prix hors taxe moyen en France. C’est ce prix hors taxe qui alimente toute la chaine d’intérêts privés qui tire des bénéfices de la vente des carburants.
Cet écart est dû essentiellement au coût du produit à son arrivée à La Réunion, avant même qu’il soit déchargé.
C’est là que se situent les principales marges de manœuvre.
Ce différentiel va encore augmenter, puisque selon les informations données hier par le ministre de l’Économie, les pétroliers vont contribuer pour moitié à une baisse de 6 centimes du litre de carburant. Ce sera donc une baisse du prix hors taxe de 3 centimes en France. Du coup, si cette baisse s’appliquait tout de suite, l’écart entre les prix HT pratiqués à La Réunion et en France augmenterait de 25%.

Gel des marges à La Réunion

À La Réunion, la marge des pétroliers ne va pas augmenter, mais elle ne diminuera pas non plus.
Dans un communiqué, le ministre des Outre-mer annonce que les préfets ont la consigne de ne plus faire évoluer les prix dans l’attente des résultats d’une négociations permettant d’envisager une baisse des prix comme en France.
Souhaitons que cette période de gel des prix permette de tout mettre sur la table afin d’aboutir enfin à une totale transparence sur la formation des prix des carburants qui sont importées dans notre île.
Cette décision montre en tout cas que pour la première fois depuis bien longtemps, toute la campagne de presse mensuelle préparant l’opinion à une hausse des prix inévitable ne s’est pas conclue dans le sens annoncé. Hier encore, il était question d’une « augmentation prévue », mais l’imprévu a surgi car au final, seul l’État est le maître du jeu dans ce domaine.

M.M.

Victorin Lurel annonce le gel des prix

Dans un communiqué diffusé hier soir, le ministre des Outre-mer a annoncé une conséquence de la décision prise de baisser les prix des carburants en France. « Il saisit, dès aujourd’hui, les préfets pour préparer la mise en œuvre de ce plan dans les départements et régions des Outre-mer en tenant compte des particularités fiscales et réglementaires des différents territoires.

Le cadre des discussions portera sur un dispositif équivalent à celui appliqué dans l’Hexagone.

S’agissant des quatre départements d’Outre-mer dans lesquels s’applique un contrôle des prix et dans l’attente des résultats de ces négociations, il n’y aura pas d’évolution des prix des carburants dans les départements et régions d’Outre-mer ».

Mieux vaut tard que jamais

Après avoir pris à sa charge les augmentations du coût du carburant, la Région s’aperçoit désormais que cela ne relève pas de sa compétence. Mieux vaut tard que jamais et sans doute le changement de gouvernement n’est-il pas étranger à cette prise de conscience ?

Va-t-on maintenant voir la Région mettre la pression sur les pétroliers pour qu’ils baissent leurs marges ?

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