La CGTR réagit aux propos du président du MEDEF

À qui profite le déficit des dépenses publiques ?

1er avril 2005

Dans l’édition du 19 mars du “Journal de l’Ile”, le nouveau président du MEDEF, François Caillé, réagissait frontalement à l’ouverture des débats sur les salaires engagés par le gouvernement. Sa vision patronale des salaires, des 35 heures, ou encore de l’intéressement dans les entreprises ne pouvait laisser insensible le secrétaire général de la CGTR, Ivan Hoareau, à l’heure où le gouvernement ponctionne largement dans les caisses publiques pour subventionner les entreprises.

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Si l’ouverture de négociations salariales engagée par le gouvernement offre un premier élément de reconnaissance de la baisse du pouvoir d’achat du privé dénoncée, depuis plusieurs mois, par les partenaires sociaux, en revanche, le président du MEDEF local ne voit pas cette initiative d’un bon œil.
Interrogé la semaine dernière par un confrère du “JIR”, François Caillé parle "d’ingérence du public dans le privé" et estime que "le gouvernement doit s’occuper de ses affaires et laisser dans la mesure du possible le monde de l’entreprise gérer les siennes". Cette position d’un grand patron de l’automobile et de la grande distribution à La Réunion fait réagir le secrétaire général de la CGTR.

Politique d’exonération à tout va

Exonérations des cotisations sociales, défiscalisation, Loi d’orientation pour l’Outre-mer (LOOM) ou encore les 200 millions d’euros du FEDOM accordés pour les cotisations sociales (sur 500 millions de son budget global pour 2005) : pour Ivan Hoareau, "le grand patron Caillé" ne parle pas d’ingérence de l’État lorsqu’il s’agit de bénéficier des aides publiques reversées aux entreprises. Il s’agit là de "considérations sélectives" quand ce sont ces mêmes exonérations récupérées par le patronat qui tirent les grilles des salaires vers le bas. Penser comme François Caillé que la question des salaires peut se régler en interne, d’égal à égal, c’est occulter le droit du travail qui stipule que l’employé a un lien de subordination avec son employeur.
De plus, lorsqu’il estime que se focaliser sur la question des salaires est une erreur stratégique et que l’on ne peut pas augmenter les fonctionnaires quand la priorité gouvernementale est à la baisse des dépenses publiques et à la réduction du déficit, Ivan Hoareau revient à la source et s’interroge sur les causes du déficit. "Ne serait-ce pas les 20 milliards consacrés aux dispositifs dits d’aide à la création d’emploi qui aggravent le déficit ? Les projets de réformes fiscales du gouvernement ?" Il est clair pour le secrétaire général de la CGTR que c’est bien cette "politique d’exonération à tout va" qui pèse dans la balance budgétaire et que, plutôt que de remettre en cause la pertinence d’une augmentation des salaires, il convient de savoir à qui profite le déficit des dépenses publiques.

Smicardisation rampante

Plutôt qu’une augmentation généralisée des salaires, François Caillé plaide pour la participation et l’intéressement dans les entreprises, "deux outils intelligents". Lorsque l’entreprise produit des richesses, elle en redistribue une partie à ses employés sous forme de primes ; dans le cas contraire, cette implication du salarié dans des objectifs de compétitivité est réductrice et ne tient pas compte de ses besoins vitaux des salariés, dans une société de "smicardisation rampante".
Depuis plusieurs années, le SMIC est cassé, dévalorisé. Ivan Hoareau constate que ce n’est plus un salaire de croissance mais un minimum garanti, qui assure tout juste le pouvoir d’achat. De plus, l’intérêt porté par le patron du MEDEF aux PME et TPE, qui selon lui ne réalisent pas des profits suffisants pour engager des dépenses budgétaires importantes, pousse Ivan Hoareau à rappeler que ce sont les grands groupes qui tuent ces mêmes TPE et PME. Il lui semble ainsi déplacé de "se réfugier derrière les fantassins que sont les petites entreprises". D’autant plus déplacé lorsque l’on est à la tête d’un grand groupe automobile qui sous-classifie ses employés par rapport à la métropole, avec les impacts salarial et budgétaire qui en découlent. "Caillé n’est pas une PME ou une TPE (...) l’automobile est un marché en croissance soutenue qui bénéficie amplement des aides publiques", souligne Ivan Hoareau qui renvoie au conflit actuel de Peugeot à Mayotte qui sous-paye ses employés mais vend pourtant ses voitures au plein tarif.
Salaires, temps de travail, casse du droit du travail... pour Ivan Hoareau, "le ton est donné par les plus hautes instances patronales", les revendications portées dans la rue par les salariés ne sont pas entendues par le MEDEF. Une entente locale MEDEF/CGTR n’est pas pour demain.

Estéfany


La CGTR et le Traité de Constitution européenne

Dans un communiqué paru hier, la CGTR réaffirme ses positions d’opposition au Traité de Constitution européenne.

"L’Europe que nous voulons, c’est une Europe de paix, de progrès et de cohésion économique et sociale, de plein emploi et de co-développement.
Une Europe qui, loin des diktats du FMI et de l’OMC, oriente la mondialisation vers un développement durable intégrant la définition et le respect des droits fondamentaux pour tous ainsi que l’accès de tous aux biens publics universels et aux services publics placés hors marché.
Nous voulons d’une Europe où le droit syndical transnational garantissant l’autonomie et l’indépendance des organisations syndicales, la négociation et le recours à l’action collective (le droit de grève), s’appuyant sur les acquis des droits sociaux nationaux, harmonise par le haut les conditions de travail des salariés ; et non d’une Europe de la concurrence entres les salariés et les territoires favorisant le “dumping” social.
L’Europe qui se construit sous nos yeux, c’est le contraire de l’Europe que nous voulons. Elle se construit sur des logiques de maximisation des profits et de recherche de moins disant social, environnemental et culturel.

Aujourd’hui, l’emploi et les salaires restent bridés par le pacte de stabilité de Maastricht et son obsession idéologique de réduction à tout prix des déficits publics. La Banque centrale européenne, non responsable devant le politique, empêche les politiques de relance permettant le plein emploi.
Le néo-libéralisme s’est construit pas à pas, au fur et à mesure de la construction européenne. Il vise à tout mettre sous la tutelle du "tout marché". La marchandisation croissante de tous les secteurs de la vie sociale, la casse du service public et des acquis sociaux qui en découlent, démontrent la réalité de l’Europe du capital et de la finance.
Le Traité de Constitution européenne (TCE) est dans la logique des textes précédents, il en résulte et amplifiera cette construction néo-libérale si préjudiciable aux salariés et aux peuples.
Le TCE renforce l’effet cliquet, l’impossibilité du retour en arrière, l’irréversibilité dans la construction de cette "Europe-là", tout en "constitutionnalisant" la politique du tout marché.

Certes, les luttes syndicales et sociales ont permis l’intégration de la charte des droits fondamentaux dans le traité. Mais celle-ci, au-delà de l’analyse de son contenu, est noyée dans cette logique d’ensemble, dans cette cohérence globale du néolibéralisme. La prééminence de "la concurrence libre et non faussée" est l’alpha et l’oméga de cette construction européenne.

La directive Bolkestein, approuvée par la Commission Prodi et les commissaires Barnier et Lamy, et le TCE sont indissociablement liés. La directive trouve son fondement dans l’esprit et le texte du TCE.
La bataille contre Bolkestein et donc contre le TCE est la même que celle menée contre la politique nationale Raffarin/Medef.

En effet, l’Europe du capital n’est pas une fatalité, ce n’est pas une idée qui tombe du ciel. Cette Europe-là a été faite par les États et gouvernements. Ce sont des décisions politiques nationales qui l’ont construite. Et aujourd’hui, les travailleurs confrontés au démantèlement des retraites et des systèmes de protection sociale, à la remise en cause de la durée légale du travail, à la privatisation des services publics par exemple d’EDF... savent que ces politiques de régression sont imposées par cette Europe-là... construite par nos gouvernants ! On ne peut donc dissocier les enjeux national et européen.

En ce qui concerne La Réunion, de grosses inquiétudes demeurent sur la réforme de l’OCM Sucre et le prix du sucre, l’octroi de mer, la continuité territoriale, le rattrapage des retards structurels... À l’évidence, le TCE n’apporte pas de réponses satisfaisantes tant les mesures annoncées restent floues et équivoques. La règle de l’unanimité dans une Europe élargie dans un premier temps à 25 et où seuls trois pays ont des RUP, constitue une menace pour La Réunion, et les RUP.

Pour la CGTR, le Traité de Constitution européenne est lourd de dangers pour un développement économique et social harmonieux et durable. Elle porte en elle des menaces contre la démocratie et l’égalité sociale. Elle casse les services publics, l’emploi et les salaires, les acquis sociaux des travailleurs.

La CGTR rejette le Traité de Constitution Européenne. Elle appelle les salariés à voter “non” au référendum.
Au-delà de cette échéance, la CGTR appelle les salariés à continuer le combat contre cette Europe néo-libérale."


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