Emploi : crise sociale à Quartier-Français

Aucune passivité syndicale

26 février 2005

48 employés de la Sucrière de La Réunion perdront leur emploi prochainement. Un désastre social sur fond de recherche de profit qu’entend dénoncer fermement la CGTR. Elle appelle tous ses militants à se tenir prêts pour une mobilisation générale.

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La nouvelle est tombée. La Sucrière de La Réunion et la SANE ont décidé de revoir la configuration de la fonction “transports de cannes”, une nouvelle organisation qui "entraînerait la suppression de 9 emplois salariés et le non-renouvellement de 19 contrats saisonniers à la SANE", selon un communiqué des deux partis. Et si la Sucrière de La Réunion dit ne pas subir de suppression d’emplois, elle informe cependant que "28 contrats saisonniers ne seraient pas renouvelés en 2005". Au total, ce sont 46 employés qui connaîtront prochainement le spectre du chômage. Un chiffre qui ne semble pas correspondre à celui affiché par la CGTR, qui parle de 48 licenciements, soit "13 postes permanents et 35 postes de saisonniers".
46 ? 48 ? Qu’importe. À ce niveau, le bilan est le même. C’est une catastrophe pour de nombreux pères et mères, qui perdent un revenu pour leur famille. Jean-Yves Payet (CGTR) déplore le dédain de Xavier Thiéblin envers des travailleurs, qui ont donné parfois plus de trente ans de leur vie à ce groupe financier, certains à quelques années ou “semaines” de la retraite. "Une telle décision par des dirigeants d’une entreprise qui fait des bénéfices est un acte de patron voyou", déclare Jean-Yves Payet, qui attend par ailleurs tout l’engagement des autorités préfectorales et politiques pour le maintien de ces emplois.

Au nom du profit

Nous rappellerons aux lecteurs que le groupe Quartier-Français est le premier producteur de sucre de canne en Europe. Ce groupe réunit 7 entreprises fleurissantes, à savoir la Sucrerie du Gol, la distillerie Rivière-du-Mât, la Chocolaterie Mascarin, ainsi que SORACO 2000, qui gère le stockage, la maturation, le traitement et le conditionnement du sucre. Elle possède aussi Bourbon Plastiques, ainsi que la société de vitrerie-miroiterie SOREMIR. Avec PROVAL Sanders, elle propose une gamme d’aliments pour bétails.
Le groupe Quartier-Français tient une vie financière plus qu’honorable. Selon la CGTR, "cette entreprise réalise 4 millions d’euros de bénéfice, soit 26,7 millions de francs, et possède une capacité d’autofinancement de 5,97 millions d’euros, soit 39 millions de francs en 2004". Face à la politique de licenciement menée par Quartier-Français, le syndicat exhorte à plus de transparence et souhaite que le comité d’entreprise se positionne sur la nomination d’un expert-comptable “indépendant”, pour vérifier les comptes de la Sucrière de La Réunion. La CGTR souhaite par exemple savoir "combien de millions d’euros en subvention et de défiscalisation ont été attribués à cette entreprise". On espère que l’expert-comptable désigné fera toute la lumière sur cette question. Et puis, la confédération syndicale s’interroge sur le pourquoi d’une telle vague de licenciements, alors que le coût des 48 salariés a été inférieur à 0,8 millions d’euros en 2004.

Appel à la mobilisation générale

Pour la Sucrière de La Réunion et la SANE, il s’agit d’une stratégie pour améliorer leur performance économique. Une des explications lancées à tout bout de champ est la baisse du prix du sucre, selon les modalités de l’OCM-Sucre. Pour faire face à cette politique européenne, le groupe Quartier-Français préfère opter pour la sous-traitance avec des entreprises réunionnaises de transports, spécialisées dans le tractage de remorques. Le groupe financier souhaite renouveler au fur et à mesure son parc de remorques actuelles pour les remplacer par des plus légères et performantes, en même temps que sera renouvelé le parc de tracteurs par des nouveautés. La CGTR note que la direction s’est déjà portée acquéreuse de 8 camions et de 5 remorques en aluminium. Offerts aux entreprises sous-traitantes ? Cette attitude de la direction est autant incompréhensible qu’irresponsable. D’autant qu’il est interdit à tout transporteur de sous-traiter pour plus de 15% de leur activité.
La CGTR promet de rester vigilante. Elle rappelle également à Xavier Thiéblin que le prix du sucre n’a pas encore baissé, et qu’il paraît incongru de tenter d’appuyer son argumentation sur ce seul motif. Jean-Yves Payet annonce par ailleurs avoir informé le président du Conseil régional, Paul Vergès, ainsi que la présidente du Conseil général, Nassimah Dindar, et le député-maire de Saint-Benoît, Bertho Audifax, de cette situation. Jean-Michel Quiard, sous-préfet de Saint-Benoît, a été alerté lui aussi sur cet "acte de délinquant", tout comme le directeur du travail. "Nous allons continuer à alerter les autorités et l’opinion publique", indique le syndicaliste, qui appelle tous les militants de la CGTR à se tenir prêts pour une mobilisation générale. Par ailleurs, fort de l’expérience syndicale unitaire de ces dernières semaines, la CGTR compte informer l’ensemble des confédérations syndicales, des associations de chômeurs, pour préparer des actions de protestations contre ces licenciements. Oui, c’est sûr : aucune passivité syndicale.

Bbj


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