Derniers indicateurs du chômage à La Réunion

Baisse annoncée à relativiser

14 avril 2005

Présentés hier à la Direction du Travail, les derniers indicateurs du chômage à La Réunion font état d’une diminution de 1,1% du nombre de demandeurs d’emplois de catégorie 1 entre janvier et février 2005 et de 3,7% de février 2004 à février 2005. Ces données brutes ne permettent pas de conclure à une baisse nette et avérée du chômage dans notre île, d’autant que l’enquête emploi de l’INSEE n’est pas encore en mesure de corroborer ces chiffres. Une présentation de forme, en présence de l’ANPE, de l’IEDOM, de l’INSEE et de la Préfecture, qui s’apparente plus à un effet d’annonce qu’à une véritable analyse.

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"Malgré les mesures de solidarité, le niveau de chômage reste considérablement plus élevé que celui de la moyenne nationale. Les conclusions sur la situation de l’île ne sont souvent pas bonnes", concède Serge Leroy, directeur de la Direction du Travail, de l’Emploi et de la Formation professionnelle (DTEFP). S’il revient sur le constat déjà connu que "la situation de l’emploi n’est pas la conséquence d’une économie dégradée", il soutient que la constance du taux de chômage réunionnais est due aux conséquences de sa croissance démographique. Une analyse substantielle qui ne donne pas de grain à moudre quant à la problématique de l’emploi.

Des résultats nuancés

Selon les "chiffres bruts" de l’ANPE, le nombre de demandeurs d’emplois de catégorie 1 (immédiatement disponibles, pour une durée indéterminée, à temps plein) a diminué de 3,7% entre février 2004 et février 2005 soit 2.592 personnes. "Si cette baisse est moindre par rapport aux années précédentes, La Réunion reste néanmoins le seul DOM à enregistrer une baisse", modère le directeur de l’ANPE, monsieur Turcotti. Une baisse moindre en effet et qui, après analyse des courbes délivrées hier par la DTEFP, ne traduit en rien une diminution nette de l’ensemble des demandeurs d’emplois.
En effet, l’observation des graphiques montre que le nombre de demandeurs d’emplois des catégories 2 et 3 a, lui, augmenté de 1.820 personnes durant la même période. En réalité, on enregistre une baisse des demandeurs d’emplois toutes catégories confondues qui n’est que de 772 personnes. L’on peut pressentir un glissement des demandeurs de la première catégorie vers les deux autres, mais ce n’est qu’une appréciation.

2004 : entre entrées et sorties

Si l’on se réfère au graphique concernant les flux d’entrées et de sorties de cette catégorie 1, toujours entre février 2004 et février 2005, l’on peut procéder à l’analyse suivante : on constate une vague d’entrées des demandeurs d’emplois de catégorie 1 de la mi-mai à la mi-août 2004 et parallèlement une croissance du nombre de sorties, mais toujours inférieure aux entrées.
Alors que La Réunion enregistre le plus fort taux de demandeurs d’emplois des moins de 25 ans par rapport aux autres DOM et à la Métropole (20,9% contre 16,9 en Métropole), l’on peut penser que la fin de l’année scolaire et universitaire a conduit des milliers de jeunes à postuler sur le marché de l’emploi.
De mi-août à mi-novembre, la situation s’améliore, les nouveaux entrants à l’ANPE diminuent fortement, alors que les sorties diminuent elles aussi mais dans une moindre mesure.
De novembre à la fin de l’année 2004, une nouvelle vague d’inscriptions se démarque. Elle pourrait correspondre à l’échéance d’un nombre important de contrats aidés durant cette période et à la diminution de leur quota. Là encore, c’est une interprétation possible.

10% de radiés en 2004

En fait, il n’y a que de janvier à février 2005 que la tendance s’améliore, mais toujours pour la catégorie 1 des demandeurs d’emplois inscrits à l’ANPE qui diminue de 1,1%. Ce constat ponctuel, cette mise en abîme, ne peut révéler une amélioration globale et définie de la situation de l’emploi à La Réunion, d’autant que les données de février 2005 sont de même niveau ou supérieures à celle de 2004. Il faut aussi prendre en compte les 10% de demandeurs d’emplois radiés de l’ANPE en 2004, soit 10.000 personnes environ, qui certes le sont pour une période de 2 mois, mais peuvent ne pas s’être réinscrits par la suite. À prendre en compte également la durée des contrats proposés car si le secteur marchand offre des emplois, hormis la fourchette précisée de + de 6 mois et de - de 6 mois, l’on ne sait s’il s’agit d’emplois pérennes.

L’INSEE ne se prononce pas

Annoncer une baisse du chômage en début d’année, sans prendre en compte son évolution globale sur ces dernières années, sans analyses à l’appui, ne peut être fondé. "Personne ne dit que la situation du chômage est bonne, que tout va bien", explique alors Serge Leroy, confronté au flot d’interrogations de la presse. Tous les intervenants présents hier reconnaissent que les besoins des entreprises évoluent, qu’il convient de les anticiper et d’adapter des plans de formations, mais la Préfecture ne répond toujours pas aux demandes répétées d’un Observatoire de l’emploi à La Réunion.
Dans un peu plus d’un mois, l’ANPE, l’ASSEDIC, l’IEDOM et l’INSEE lui remettront un rapport plus conséquent pour comprendre les particularités et mécanismes du marché atypique de l’emploi à La Réunion. Si Jean Gaillard, directeur de l’INSEE, rappelait l’augmentation continue du chômage à La Réunion depuis mai 2002, il s’est déclaré "incapable" de confirmer cette baisse du chômage, son enquête auprès de 5.500 ménages réunionnais étant encore en cours. "Je ne sais pas".

Estéfany


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