Baisser de 20% le prix des carburants

Hier à Bras-Panon, un collectif d’associations, parmi lesquelles Agir Pou Nout Tout, UFC Que choisir, l’UFR, la Ligue des Droits de l’Homme et le CDFAL, a annoncé l’amplification de la mobilisation pour la baisse des prix des carburants. Avec la baisse constante du prix du pétrole depuis plus de trois mois (-50%), et puisque La Réunion est approvisionnée deux fois par mois, « le prix actuel n’est plus justifié », indique Jean-Hugues Ratenon, d’Agir Pou Nout Tout.
La dernière augmentation des prix des carburants a été décidée alors que le prix du pétrole commençait à diminuer, ce qui entraînait en France une baisse des prix.

Pétroliers pris « la main dans le sac »

Pour justifier cette augmentation, la Préfecture a publié une structure des prix. Agir Pou Nout Tout constate que cette structure est une « demi transparence » car son point de départ est le prix d’achat payé pour La Réunion sur le marché de Singapour. Or, les compagnies pétrolières achètent les carburants à un fournisseur en passant par un ou plusieurs intermédiaires (voir encadré).
Inscrivant cette bataille dans le mot d’ordre de « Celui qui paie a le droit de savoir », Jean-Hugues Ratenon met en évidence le fait que les compagnies pétrolières sont prises « la main dans le sac ».
Tout d’abord, la part des taxes est plus importante à La Réunion qu’en France. En France, pour un litre de super, les taxes représentent 60% du prix (49% pour le gazole). A La Réunion, la proportion est de 48% de taxes pour un litre de super, et 31,17% pour le gazole. On a donc près de 20 points de taxes en moins pour le carburant utilisé essentiellement par les transporteurs et autres professionnels, et 12 points de moins pour le super. Mais malgré cela, le prix des carburants est plus élevé à La Réunion.
D’où vient cette différence ? Une première explication vient des marges : elles sont plus élevées dans notre île. Selon les documents fournis par la Préfecture, la part des marges dans le prix payé par le consommateur pour un litre de gazole est à La Réunion de 15%, alors qu’en France, elle est de 6%.
Quant aux autres explications, les compagnies pétrolières et la Préfecture n’ont pas publié toutes les données permettant de faire toute la transparence sur la formation des prix des carburants.
Pour clarifier la situation, Agir Pou Nout Tout a rencontré vendredi dernier le directeur de la SRPP, et a demandé lundi une audience cette semaine au président du Comité des importateurs d’hydrocarbures à La Réunion. Le même jour, le collectif a écrit au préfet, responsable de la fixation des prix des carburants, pour demander une rencontre avant la fin de la semaine.
Le collectif revendique une baisse immédiate de 20% sur les carburants, et une diminution du prix de la bouteille de gaz.

Appel à un large rassemblement

Il demande également à la CCI de diminuer les redevances portuaires perçues lors du déchargement d’un pétrolier. Il n’est pas normal que le montant de ces redevances soit égal au prix du transport entre Singapour et La Réunion, constate M. Lajoie, de l’UFC Que choisir.
Le collectif annonce toute une série de mobilisations pour exiger la baisse des prix. Lundi prochain au plus tard, 10.000 tracts seront distribués. Ces documents informent la population sur les évolutions comparées du prix du baril de pétrole, du litre de super en France et à La Réunion. Le graphique montre clairement que depuis juillet dernier, le prix du baril a connu une baisse vertigineuse répercutée en France sur le prix des carburants, alors qu’à La Réunion, les prix ont augmenté.
Jean-Hugues Ratenon appelle tous les Réunionnais à se rassembler le 7 novembre prochain au Barachois pour demander la baisse des prix des carburants : « si la logique est d’engraisser les compagnies pétrolières, alors le peuple sera dans la rue ». Le collectif demande aux maires, au Conseil général et à la Région de participer à cette journée d’action.
Alors que 52% de la population vit sous le seuil de pauvreté, alors que l’on constate une hausse du nombre de Réunionnais touchés par la distribution de colis alimentaires, il est possible de faire immédiatement un geste pour augmenter le pouvoir d’achat et améliorer les chances des entreprises, dont les transporteurs, de faire face à la crise. Ce geste, c’est baisser de 20% le prix des carburants.

Manuel Marchal

Combien d’intermédiaires et à quel prix ?

Le document sur la structure des prix des carburants ne fait pas la transparence sur le prix d’achat à Singapour des carburants importés à La Réunion.
Les hydrocarbures sont achetés par les compagnies pétrolières à un fournisseur en passant par un ou plusieurs intermédiaires.
Quel est le prix payé au fournisseur ? Quelle est la marge de l’intermédiaire ? Combien y a-t-il d’intermédiaires ? Ces données interviennent dans la formation des prix, mais elles ne sont pas publiées.
M. Lajoie, de l’UFC Que choisir, affirme que la SRPP a été incapable de dire quel est le nombre d’intermédiaires. Exxon, Shell et Total achètent-elles toutes le pétrole au même prix, interroge-t-il, en rappelant qu’à La Réunion, quel que soit le distributeur, les prix sont les mêmes.

Des bénéfices considérables

Le représentant de l’UFC Que choisir constate la hausse très importante de la marge brute de raffinage du pétrole en carburant. C’est le résultat d’un manque d’investissement délibéré des compagnies pétrolières dans cette industrie, afin que des capacités de raffinage insuffisantes contribuent à faire augmenter les prix.
De plus, le second trimestre 2008 a été marqué par une progression importante du chiffre d’affaires et du bénéfice des grandes compagnies pétrolières dont plusieurs opèrent à La Réunion :