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Bataille pour la dignité du travailleur réunionnais à ArcelorMittal Réunion

5e jour de grève à Profilage

lundi 12 février 2018, par Manuel Marchal


Aujourd’hui commence le 5e jour de grève à Profilage, filiale d’ArcelorMittal à La Réunion. Les travailleurs sont en lutte pour obtenir une juste réparation à la suite du plan de licenciements décidé par la direction. 36 travailleurs vont perdre leur emploi, ils demandent donc une indemnité leur permettant de pouvoir créer eux-mêmes une activité économique, génératrice de revenus et d’emplois. Ils dénoncent également la discrimination subie par les travailleurs réunionnais dans cette entreprise.


Depuis le mois de novembre, les travailleurs de Profilage, filiale d’ArcelorMittal à La Réunion, sont en lutte contre un plan de licenciements décidé par la direction. Les lois votées sous le précédent gouvernement ont permis à une entreprise de licencier des travailleurs au prétexte de difficultés passagères, quand bien même sa stabilité financière n’est pas menacée. La direction de Profilage s’est engouffrée dans la brèche en enclenchant une procédure nommée Plan de sauvegarde de l’emploi (PSE), sur la base de pertes en 2017. Dans le même temps, le cabinet Marciano, mandaté par le Comité d’entreprise, a confirmé que depuis la création de l’entreprise voici 33 ans, elle a accumulé une trésorerie de 22 millions d’euros, qui rapporte par an 200.000 euros d’intérêts. Ce « trésor de guerre » a été constitué par les efforts des travailleurs qui ont réussi à créer cette richesse. C’est cela que la direction d’ArcelorMittal ne veut pas partager, en imposant dans son plan des conditions drastiques pour obtenir le versement d’indemnités supra-légales.

2,5 millions sur une trésorerie de 22 millions

Ce plan a été refusé par toutes les instances représentatives du personnel avant d’être envoyé à la DIECCTE pour homologation. Jeudi dernier, les travailleurs ont décidé d’utiliser le dernier moyen en leur possession pour se faire entendre, ils ont lancé une grève illimitée. Ils ont en effet appris de la DIECCTE que les arguments opposés par la direction à leurs revendications ne tenaient pas. Ils comptent donc obtenir le versement d’indemnités supra-légales sans condition. Ils demandent une somme comprise entre 60.000 et 70.000 euros par travailleurs licencié. Ceci représente une somme totale de 2,5 millions d’euros. C’est à peine 10 % de la trésorerie de Profilage, qui existe grâce notamment aux richesses produites par les 36 travailleurs visés par le plan de licenciement.

Un autre cabinet d’expertise était mandaté par les représentants du personnel. Il s’agissait de Sextant, qui a étudié le fonctionnement de l’entreprise. Son rapport met en évidence des conclusions très inquiétantes. En effet, il constate que les travailleurs au cœur de la production n’ont pas eu droit aux formations leur permettant de maintenir leur employabilité, ce qui complique la possibilité d’une reconversion professionnelle. Cette inégalité est pointée de longue date par la délégation unique du personnel. La DUP souligne également que depuis la création de l’entreprise voici 33 ans, tous les postes de cadre sont occupés par un personnel venu de France. L’absence de formation a empêché la promotion interne, et force est de constater que les jeunes Réunionnais qui disposent d’un niveau de formation de plus en plus élevé n’ont pas pu accéder aux postes de décision à Profilage. C’est le commentaire le plus évident qui résulte de l’analyse des faits rapportés par la délégation unique du personnel.

Les Réunionnais capables d’être cadres

Manifestement, les dirigeants de la filiale d’ArcelorMittal ne semblent pas en phase avec l’évolution de la société réunionnaise. Dans la situation de pénurie d’emploi marquée notamment par un fort taux de chômage des diplômés qui sortent des écoles réunionnaises, ou des Réunionnais qui reviennent dans leur île après leur formation, le choix de privilégier exclusivement le recours à des cadres dont les centres d’intérêts matériels et moraux se situent ailleurs ne participe pas à l’apaisement de la tension dans la société réunionnaise. C’est en effet une injustice infligée à des travailleurs qui auraient pu occuper ces postes s’ils avaient pu bénéficier d’une formation adéquate, et à de jeunes Réunionnais qui ont suivi pendant des années une formation de haut niveau et se voient opposer un refus à leurs demandes d’emploi à La Réunion.

À ArcelorMittal Réunion comme dans toutes les entreprises qui s’adonnent à ces pratiques, il est temps que cela cesse. Cela suppose de faire la transparence sur toutes les offres d’emploi disponibles dans notre île, de les rendre publiques, et de faire cesser la discrimination subie par les Réunionnais dans l’accès aux postes d’encadrement dans ces sociétés.

M.M.


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