Education nationale : Mobilisation hier devant le Rectorat

« C’est l’avenir de nos enfants qui est menacé »

23 avril 2008

Près de 200 manifestants se sont rassemblés hier matin devant les grilles du Rectorat pour dénoncer à nouveau la logique budgétaire du gouvernement en matière d’Education et ses conséquences aggravantes à La Réunion. Suppression de 73 postes d’enseignants et disparition du BEP à la rentrée 2008 : où est l’intérêt de l’élève ? Que devient la qualité de l’enseignement ?

Pour parvenir à faire rapidement des économies, le gouvernement s’appuie sur une double offensive : la suppression massive de postes de fonctionnaires et la remise en cause du principe du statut dans la fonction publique. Le service public d’éducation ne survivra pas à cette attaque.

Exploitation des enseignants précaires

Dans l’Education nationale, elle se traduit par le non remplacement de 11.200 départs à la retraite en 2008, dont 73 à La Réunion. Dans les 4 prochaines années, ce sont 20.000 emplois par an qui seront supprimés à l’échelle nationale. « Plus que de suppressions, c’est d’un plan de rattrapage dont l’Académie a besoin », défendait hier encore la Députée-maire Huguette Bello, qui invite l’ensemble de la population à prendre fait et cause pour ce mouvement, à se soulever contre les attaques répétés du gouvernement qui affectent l’accès de tous à l’éducation mais aussi à la santé, au travail....
« On nous dit qu’on bénéficie des mêmes moyens, mais quels professeurs va-t-on mettre dans les nouveaux établissements qui vont être créés pour accueillir l’effectif scolaire en augmentation ? », interrogeait à son tour Jean-Odel Oumana, vice-président de la FCPE.
Des précaires bien sûr parmi les plus de 700 vacataires, contractuels et auxiliaires, que comptent notre Académie. On touche ici un second volet de la stratégie gouvernementale qui vise la remise en cause du principe de statut de la fonction publique (heures supplémentaires, multiplication des évaluations, salaire au mérite, recrutement hors concours...).
« C’est avec les heures supplémentaires que l’on compte remplacer les 73 postes supprimés, explique Jean-Jacques Perrot, délégué FO, mais ce sont les précaires qui vont les assurer, de plus en plus nombreux dans la fonction publique, exploités, sous-payés, qui vont négocier de gré à gré leur salaire avec le chef d’établissement comme le prévoit le rapport Pochard ».

« Les plus fragiles sur le bord du chemin »

La refonte du Bac Pro en 3 ans au lieu de 4 (2 ans de BEP et 2 ans de Bac Pro) dès la rentrée est aussi au cœur des revendications et des inquiétudes de la communauté éducative. « Avec 1.000 heures de formation en moins, on ne peut avoir la même qualité de service public », soutient Cendrine Peignon, déléguée SNUEP-FSU. « Si l’on considère que les postes qui auraient du être créés ne le sauront pas, il y a bien une économie de moyens. La non création est aussi une suppression ».
La généralisation du Bac Pro devrait permettre le non renouvellement d’un quart de l’effectif des professeurs de lycées professionnels titulaires sur 4 ans. Cette mesure est d’autant plus aberrante à La Réunion que notre Académie est celle qui enregistre le plus de transferts du BEP au Bac Pro. « Le BEP permet aux élèves de reprendre confiance en eux, de retrouver du courage, explique l’enseignante. En supprimant cette étape, on favorise le décrochage des élèves qui, de fait, n’ont plus accès au diplôme ». « Le gouvernement veut mettre les élèves les plus en difficulté en CAP et les meilleurs en Bac Pro, mais ce n’est pas si simple, défend encore Cendrine Peignon. Il y a un temps nécessaire pour la qualification et un autre pour le travail. La généralisation met les plus fragiles sur le bord du chemin ». En d’autres termes, pour Jean-Jacques Perrot : « On veut dégraisser le mammouth et rendre les jeunes le plus exploitables possible ».

« Il faut absolument rester mobilisés »

Une délégation de l’Intersyndicale*, accompagnée par la FCPE, a bien été reçue hier matin par le secrétaire général du Rectorat et l’Inspecteur d’Académie, mais qu’attendre d’une telle entrevue quand les décisions prises relèvent du ministère ? « Ils ont pris note et feront remonter », soulignait Christian Picard, secrétaire départemental FSU. « Nous avons annoncé que le mouvement s’inscrivait dans la durée ». Les 1er, 15 et 18 : le mois de mai s’annonce dense en mobilisations. « Il faut absolument rester mobilisés, a signalé Christian Picard. Si nous sommes en intersyndicale aujourd’hui, c’est que nous sommes tous conscients que c’est l’avenir de nos enfants qui est menacé ».

* CFTC, SNASUB-FSU, SNEP-FSU, SNUEP-FSU, SNUIPP-FSU, UNATOS-FSU, SAIPER, SN FO LC


An plis ke sa

Des enseignants sous contrôle continu

La Commission administrative paritaire ne s’est pas tenue hier. Les organisations syndicales SE/UNSA, SNUIPP-FSU, CFTC et SAIPER ont boycotté la séance pour dénoncer des conditions des inspections d’enseignants de plus en plus dures et stressantes. Comme l’explique Didier Debals, secrétaire du SAIPER, « on sent depuis ce changement politique un changement de climat de plus en plus autoritaire ». Confrontés à des programmes qui changent d’année en année, les enseignants sont soumis en plus à des évaluations répétées qui, en fonction des inspecteurs, se passent sous tension. Selon Didier Debals, certains qui ne supportent plus cette pression, la remise en cause systématique de leur travail aux yeux de l’opinion publique, craquent et se retrouvent en arrêt maladie. « Ce n’est pas bon pour le fonctionnement du système scolaire », note le syndicaliste, d’autant que le personnel remplaçant fait défaut.

« On veut liquider tous les élèves en difficulté »

S’agissant de la réforme des programmes à la Maternelle et au Primaire, le SAIPER accuse une réforme inapplicable. « On diminue les volumes horaires et, en même temps, on veut faire la multiplication au CP, la division en CE1 et on veut que l’enfant sache lire dès la Grande section. On nous demande de placer une heure de sport en plus et je ne sais quoi encore. Comment on fait ? On veut donner plus de travail encore aux enfants en difficulté pendant que leurs petits camarades, plus aisés, pourront, eux, aller faire du sport. Il y a là une vraie ségrégation, une accentuation de la souffrance chez les élèves en difficulté, pour une efficacité pédagogique qui est loin d’être démontrée. Ce sont des gadgets. La suppression du samedi ne sert quant à elle qu’à faire plaisir aux bobos... On veut liquider tous les élèves en difficulté ».


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