
Casse du Code du travail, la fin du boulot - 4 -
30 novembre 2007

Nous sommes en train de perdre une à une, dans le plus grand secret, toutes les protections contre les abus de pouvoir que nos grands-parents ont fait inscrire depuis un siècle dans le droit du travail.
Retrouvez aujourd’hui la 4ème partie de l’analyse du dernier Code du travail par un ancien inspecteur du travail, Richard Abauzit.
• Le travail du dimanche pour tous, c’est pour bientôt : les établissements qui actuellement bénéficient de droit d’une dérogation au repos hebdomadaire (donné par roulement) en vertu d’un décret étaient ceux où étaient mises en oeuvre des « matières susceptibles d’altération très rapide » ou dans lesquels « toute interruption du travail entraînerait la perte ou la dépréciation du produit en cours de fabrication » ; désormais sont concernés les établissements « dont le fonctionnement ou l’ouverture est rendu nécessaire par les contraintes de la production, de l’activité ou les besoins du public ». On ne peut mieux dire.
Le travail le dimanche jusqu’à midi, c’est déjà, si l’on comprend bien, pour les grandes surfaces. En effet, le nouveau texte étend à tous les « commerces de détail alimentaire » la possibilité de droit de donner le « repos hebdomadaire le dimanche à partir de midi » ; alors que le texte actuel déterminait par décret ces établissements et les limitait ainsi à ceux dont l’« activité exclusive ou principale » était « la vente de denrées alimentaires au détail ».
Pour les autres commerces de détail, le maire peut désormais autoriser la suppression du repos hebdomadaire cinq dimanches dans l’année sans avoir à prendre l’avis des organisations syndicales d’employeurs et de travailleurs intéressés.
• Un point important de la vie des salariés et du portefeuille des actionnaires est celui de l’hygiène (rebaptisée « santé ») et de la sécurité : il n’a pas été oublié dans l’ordonnance et le nouveau code du travail évolue dans le sens de la mise en avant progressive de la responsabilité des salariés concomitamment avec la baisse de celle des employeurs.
Ainsi le nouveau texte dit que les dispositions en matière de « santé et sécurité au travail » auparavant applicables « aux établissements » sont désormais applicables « aux employeurs de droit privé ainsi qu’aux travailleurs ». C’est ainsi que l’on trouve désormais dans les principes généraux de prévention un chapitre intitulé « Obligations des travailleurs » symétrique de celui intitulé « Obligations des employeurs ». La rédaction de ce nouveau texte permet d’ouvrir la possibilité pour les employeurs de dégager leur responsabilité en matière d’hygiène sécurité : en effet, si comme l’ancien texte, il prévoit que le salarié doit prendre soin de sa santé et de sa sécurité ainsi que de celles des autres salariés et que cette disposition (alinéa 1) est « sans incidence sur le principe de responsabilité de l’employeur », il ajoute une disposition (« les instructions de l’employeur précisent les conditions d’utilisation des équipements de travail, des moyens de protection, des substances et préparations dangereuses ») qui, elle, échappe au principe de responsabilité de l’employeur (alinéa 2).
Pour la mise sur le marché et l’utilisation des substances et préparations dangereuses, le nouveau texte ne précise plus que les décrets d’application « peuvent prévoir les modalités d’indemnisation des travailleurs atteints d’affection causés par ces produits ».
La variation du texte sur les valeurs limites des substances toxiques peut faire craindre le pire : là où actuellement les inspecteurs et contrôleurs du travail peuvent faire une mise en demeure en cas de risque du à une substance chimique de concentration supérieure à une « valeur limite fixée par décret », le nouveau texte ne parle que de « valeur limite » sans aucune précision ; et la directive européenne de 2000, déjà partiellement mise en œuvre en France en 2004, consiste à remplacer les valeurs limites d’exposition à respecter par des valeurs limites indicatives...
Travaux dangereux autorisés aux femmes
La médecine du travail, pourtant déjà très dépendante des employeurs, doit encore encombrer, puisque n’ont pas été reprises les dispositions précisant les conditions de formation pour pouvoir exercer la médecine du travail et qu’a disparu celle prévoyant une mise en demeure par l’inspection du travail en cas d’infraction à la qualification des médecins et infirmiers, à l’obligation pour le médecin d’exercer personnellement ses fonctions, au temps que le médecin du travail doit consacrer à ses fonctions et à l’installation matérielle du service de médecine du travail. Ce service ne semble plus prévu pour les travailleurs détachés en France puisque la « surveillance médicale » a disparu du texte actuel listant les obligations des employeurs pour ces salariés.
Désormais, même pour le pire, une femme égale un homme. L’avant propos de l’ordonnance l’explique, on a appliqué les directives européennes qui ne laissent subsister qu’une protection pour les seules femmes enceintes. En conséquence, ce qui est mauvais pour les hommes doit l’être aussi pour les femmes et les rares dispositions qui n’avaient pas été rayées, sur la base de ce principe le sont. Ainsi certains travaux dangereux, autrefois interdits aux femmes, sont autorisés : ceux « présentant des causes de danger ou excédant les forces » (les femmes pourront donc désormais légalement porter de façon régulière des charges supérieures à 25 Kg), et ceux effectués dans des locaux « qui sont insalubres ou dangereux et où l’ouvrier est exposé à des manipulations ou à des émanations préjudiciables à sa santé », travaux actuellement déterminés par décret.
Et, en famille, tout devient possible puisqu’a été abrogé le texte prévoyant l’interdiction de certains travaux dangereux (pour les femmes mais aussi les jeunes travailleurs) aux établissements où n’étaient employés que les membres de la famille.
À suivre...
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