
Casse du Code du travail, la fin du boulot - 6 -
4 décembre 2007

« Plusieurs mois, voire plusieurs années seront sans doute nécessaires pour que ce nouveau code révèle tous ses secrets »
Retrouvez aujourd’hui l’ultime partie de l’analyse du dernier Code du travail par un ancien inspecteur du travail, Richard Abauzit.
VI / Dissolution des juges
• Les conseils de prud’hommes, malgré leurs limites, dérangent encore ; l’ordonnance utilise plusieurs techniques pour réduire leurs pouvoirs et leurs moyens, ou se donner les moyens de les réduire par décret : renvoyer certaines dispositions essentielles au domaine réglementaire (exemple : le nombre des sections, actuellement cinq - agriculture, industrie, commerce et services, activités diverses, encadrement -, le dépôt des accords collectifs ) ; faire disparaître du texte législatif des dispositions essentielles qui seront ou non reprises dans un décret (le nombre de chambres par section, les modalités de désignation des présidents et vice-présidents du conseil, des sections et des chambres, les modalités d’inscription des électeurs sur les listes électorales, la composition minimale de chaque section ou chambre, la composition minimale d’un bureau de jugement, le détail des frais de personnel et de fonctionnement du conseil de prud’hommes) ; enlever des attributions en matière de droit du travail (litiges sur la durée du travail pour les salariés en forfait jours, contestation par l’employeur des heures de délégation des délégués syndicaux, qui ne seront plus jugés par les prud’hommes mais par le « juge judiciaire »). Dans le même temps, il semble que la confiance dans le juge judiciaire ne soit pas parfaite, puisqu’il est dessaisi au profit d’une « autorité administrative » à définir pour la reconnaissance ou la perte du caractère distinct d’un établissement pour les élections de délégués du personnel.
• Des patrons aux mains de plus en plus libres et de moins en moins punis.
De façon symbolique tout d’abord, le nouveau texte efface les formulations d’obligations explicites pour l’employeur (mais il ne les supprime pas pour les salariés...) et remplace systématiquement les termes considérés comme infamants (exemple : « délinquant » est remplacé par exemple par « personne condamnée »). Et dans la réalité, pour les infractions sur la santé et la sécurité, tout est mis en place pour faire retomber sur les salariés les infractions de l’employeur.
Ensuite les éventuelles peines complémentaires sont allégées (l’insertion du jugement dans les journaux peut être réduite à des extraits et les frais entraînés ne doivent pas dépasser le montant de l’amende encourue).
En outre les peines de récidive sont presque systématiquement supprimées (négociation annuelle sur les salaires, la durée du travail et l’organisation du temps de travail ; égalité de salaires hommes / femmes ; entrave au droit syndical ; entrave à la désignation et au libre exercice des fonctions de délégué du personnel, de membre du comité d’entreprise, de membre du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail, des conseillers prud’hommes, des conseillers du salarié ; entrave aux inspecteurs et contrôleurs du travail, y compris quand ils interviennent pour soustraire les salariés d’une situation de danger ; ouverture de chantiers importants en dehors des règles applicables ; sanction pécuniaire interdite)
Et enfin, un petit plus, des infractions disparaissent : plus de sanctions pénales pour les violations des dispositions des accords collectifs étendus dérogatoires à la loi (dans des conditions prévues par la loi) notamment sur les heures supplémentaires et le repos compensateur ; plus de sanction pour l’abus de confiance des entreprises de travail temporaire qui retiennent ou utilisent dans un intérêt personnel ou pour l’entreprise les sommes remises à titre de caution (servant à la garantie financière de paiement des salaires) ; plus de sanction enfin pour le dirigeant d’une entreprise qui aura « omis » de déclarer les salariés qu’il détache temporairement en France.
VII / Dissolution de la défense collective des travailleurs
• Le nombre des délégués (syndicaux, du personnel, au comité d’entreprise, au comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail), et les modalités d’élection (dont la désignation du secrétaire du comité d’entreprise, et la répartition du personnel dans les collèges électoraux et la répartition des sièges entre catégories qui, en cas de désaccord, ne sera plus faite par l’inspecteur du travail mais par une « autorité administrative ») sont assujettis à la parution d’un décret ; des nouveautés et de nouvelles régressions : les élections des délégués du personnel et des membres du comité d’entreprise auront lieu à la même date ; et les procédures judiciaires seront ralenties (disparition de référé et de décision en dernier ressort).
• Le rôle des représentants du personnel semble réduit à veiller à l’application de la loi et non plus des règlements.
• Pour les membres du comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail disparaîssent l’obligation d’être informés de la présence de l’inspecteur du travail et le droit de pouvoir présenter leurs observations à cette occasion, et la possibilité de faire appel à titre consultatif à toute personne de l’établissement.
• Les informations dont sont destinataires le comité d’entreprise et le comité d’hygiène, de sécurité et des conditions de travail sont réduites.
• Les documents que l’employeur est censé conserver, transmettre ou afficher pour le contrôle de l’inspection du travail (nombre d’heures ou de jours de travail, heures d’astreinte, horaires de travail, avis du comité d’hygiène de sécurité et des conditions de travail sur le rapport et le programme annuels de prévention, contrats de travail temporaire et de mise à disposition, dépôt des accords collectifs) ou pour l’information des salariés (convention collective applicable à l’entreprise, mentions obligatoires au contrat d’apprentissage, nombre d’heures d’astreinte, contenu du certificat de travail) sont soit dépendants de la parution d’un décret soit réduits soit supprimés.
Fin
NDLR : Le document complet est consultable sur www.temoignages.re
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Témoignages - 80e année


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