Billet d’humeur

Consommer toujours plus jusqu’à l’endettement

21 juillet 2008, par Sophie Périabe

Selon une étude de l’INSEE rendue publique en avril 2007, en France, début 2004, près de la moitié des ménages sont endettés à titre privé. Trois ménages sur dix sont endettés pour l’achat d’un bien immobilier ou foncier, ou pour de gros travaux de rénovation. Une proportion presque équivalente rembourse un crédit à la consommation destiné à financer l’achat d’un véhicule, d’un bien d’équipement ou des dépenses diverses (éducation ou formation, évènement familial, trésorerie...). Et à La Réunion, comme vous vous en doutez, la part des ménages endettés est supérieure au niveau de la Métropole. En effet, toujours selon l’INSEE, le total des crédits portés par les particuliers et les entrepreneurs individuels a ainsi progressé de 46%, tandis que l’endettement moyen par ménage a augmenté de 29% en 2003. Aujourd’hui, en 2008, la situation n’a pas beaucoup changé, si l’on tient compte de l’évolution de la société de consommation dans laquelle nous vivons et du pouvoir d’achat. On a beau se plaindre de l’augmentation des prix, de la stagnation de nos salaires, nous sommes bien obligés de consommer, consommer toujours plus. Et comme notre pouvoir d’achat n’augmente pas, bien au contraire, nous avons davantage recours au crédit. Moi même, je n’échappe pas à la règle.

C’est du harcèlement !

Comme beaucoup de jeunes entre 25 et 30 ans qui entrent dans la vie active, nous contractons un prêt pour l’achat d’un véhicule. Et oui, pour nombre d’entre nous, c’est indispensable ! Lorsque les transports en commun seront davantage développés, et je pense notamment au tram-train, nous aurons une alternative, mais en attendant, c’est encore le seul moyen de locomotion pour être sûr d’arriver à l’heure sur son lieu de travail. Et pour beaucoup de jeunes également, qui commencent à travailler, le crédit bancaire est inaccessible. « Cela ne fait pas longtemps que vous travaillez » ou « Votre salaire n’est pas suffisant », bref, pour une raison ou pour une autre, vous êtes obligé de vous retourner vers une maison de crédits, qui vous prête bien volontiers, mais à un taux d’intérêt exorbitant. Mais bon, on n’a pas toujours le choix, donc on fait avec ! Dans mon cas, une semaine après avoir contracté le crédit, cette maison de crédits me contacte pour me signaler que je peux encore disposer d’une certaine somme d’argent si jamais le besoin se faisait ressentir. Je trouve cela un peu bizarre, puisque j’ai déjà un crédit à payer, mais bon, après tout, c’est une maison de crédits. Donc, gentiment, je réponds à cette personne que je ne compte pas contracter un autre prêt, d’ailleurs, je considère ne pas en avoir les moyens. Une semaine après, c’est un courrier qui vient m’informer, une nouvelle fois, que j’ai une somme d’argent à disposition. Je n’en tiens pas compte car ça ne m’intéresse toujours pas. Une semaine après, encore un nouvel appel, pour confirmer que j’ai bien reçu le courrier. Quelque temps après, encore un appel, et le plus incroyable, c’est que vous avez un conseiller qui vous appelle sur votre portable et, en même temps, il y en a un autre qui vous appelle sur votre poste fixe.
Alors, je trouve ça révoltant, c’est du harcèlement et de l’incitation à consommer toujours plus, alors que vous en n’avez pas les moyens. Allez-y, empruntez, on vous prête de l’argent, ce n’est pas un problème si vous vous endettez ! Est-ce que c’est cela la politique d’une maison de crédits ? Dans le cas contraire, il faudrait que quelqu’un m’explique car je n’y comprends plus rien. J’ai réellement eu cette sensation d’être harcelée, car si vous leur dites que vous êtes occupé et que vous ne pouvez pas leur parler, ils vous rappellent tous les jours jusqu’à ce que vous soyez libre. Alors, hier, j’en ai eu marre, j’ai répondu à “mon pseudo conseiller” que c’était inutile de continuer à m’appeler car je n’ai pas besoin d’argent, je n’ai pas de projet pour l’instant et que si le cas se présentait, je le contacterai. Bien sûr, ces conseillers doivent avoir un quota de personnes à contacter, ils font leur boulot et vous n’êtes pas obligés de contracter un nouveau crédit, mais c’est réellement la politique de ces maisons de crédits que je remets en cause, ce harcèlement permanent. Est-ce que l’objectif d’une maison de crédits est d’inciter les gens à consommer ce qu’ils n’ont pas et ce qu’ils ne pourront pas payer ? Leur donner l’illusion de pouvoir consommer ? Leur faire croire qu’ils ont du pouvoir d’achat ? Car dans mon cas, vraiment, avec le loyer, les factures, la nourriture, etc... je ne pourrais pas assumer un autre crédit, même avec des petites mensualités. Et oui, c’est le monde dans lequel nous vivons, vivre pour travailler et consommer toujours plus !

Sophie Périabe

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