Après le refus d’Emmanuel Macron de rencontrer les syndicats

Déclaration commune de l’Intersyndicale de La Réunion au président de la République

4 novembre 2019

Le 26 octobre dernier, l’Intersyndicale organisait une journée de grève générale et de manifestation lors de la venue du président de la République à La Réunion. Au termes de son défilé dans les rues de Saint-Denis, l’Intersyndicale voulait rencontrer Emmanuel Macron afin de lui remettre ses propositions. Le chef de l’État a alors refusé de rencontrer les syndicats, leur interdisant d’approcher à moins de 200 mètres de sa personne. En conséquence, l’Intersyndicale a adressé sa déclaration à Emmanuel Macron, en voici le contenu.

Monsieur le Président de la République, au préalable, nous tenons à souligner que vous avez devant vous, à l’exception de la CFE-CGC, l’ensemble des syndicats de l’Ile de La Réunion.
La situation socio-économique à La Réunion s’aggrave. Les trop nombreux clignotants rouges mis en lumière lors du COSPAR (mars 2009) et du mouvement des gilets jaunes (novembre 2018) sont aujourd’hui écarlates. La société réunionnaise minée par des inégalités et une pauvreté croissantes est au bord de l’implosion. Le front de l’emploi ne cesse de se dégrader. La précarité et son lot de travailleurs pauvres est à son paroxysme. Les jeunes, les femmes et les seniors notamment sont les plus durement frappés. La projection dans l’avenir devient impossible.

Depuis ces dernières années, les politiques menées par l’État ont sacrifié le social :
- Attaque contre le syndicalisme, le droit du travail et les acquis sociaux,
- Politique d’austérité qui frappe durement la population ainsi que les Collectivités Territoriales, premiers investisseurs publics en France et à La Réunion, qui seront amenées alors a ̀ transférer la charge en partie ou en totalité sur les contribuables,
- Diminution des contrats PEC et recul de la participation de l’État jetant du jour au lendemain dans le désarroi des milliers de personnes,
- Démantèlement des services publics : suppression de services et de postes ainsi que dématérialisation à outrance dans un contexte d’illectronisme inquiétant,
- Privatisation à marche forcée visant à satisfaire les appétits financiers des sociétés transnationales. Audelà ̀ des salariés de la Fonction Publique, ce sont les usagers qui en paieront le prix fort (privatisation d’ADP, modernisation de l’action publique et ses conséquences à la Réunion),
- Absence de véritable politique du logement, pourtant ardente obligation et d’une politique de relance du BTP permettant de stimuler l’activité notamment des TPE/PME et de favoriser l’insertion sociale.
La contre-réforme de l’indemnisation chômage bâtie sur le présupposé idéologique que les exclus sont responsables de leur propre exclusion se traduira notamment à La Réunion, vu la situation catastrophique de l’emploi, par des dégâts incommensurables…
La politique d’exonération et de défiscalisation exige une réelle évaluation des politiques publiques au regard notamment de l’emploi et des conditions de travail, de la nécessaire structuration des filières.

L’ascenseur social est en panne pour les jeunes, les familles monoparentales, les retraités, les bénéficiaires de minima sociaux,… Quant aux demandeurs d’emploi, ils sont largués. La quasi-totalité ́ des salariés tire le diable par la queue. La cherté ́ de vie résulte d’un niveau de prix anormalement élevé et d’une faiblesse des revenus. Comment en effet vivre a ̀ la Réunion avec un SMIC de 1 188 euros par mois et avec des minima sociaux tirés vers le bas ? Cette problématique qui a fait le tour des Outremers en 2009 reste entière aujourd’hui.
La lutte contre les sur-prix patine. Le « bonus COSPAR » », qui a fait ses preuves tant en amélioration de bien être individuel mais aussi de par son impact positif sur l’économie, a été abandonné : 50 euros absorbés par les NAO, 100 euros de RSTA supprimés pour tous sous la pression patronale. C’est dans ce contexte social délité que vos politiques libérales continuent leur fuite en avant, celles d’aujourd’hui se nourrissant de celles d’hier.
Votre politique, M. le Président, n’est en effet que l’application des directives ultra-libérales d’une Union Européenne qui tourne le dos à « l’Europe des travailleurs », à « l’Europe des peuples ».
Il s’agit bien d’une attaque frontale contre les salariés, les couches sociales les plus défavorisées et les classes moyennes pendant que dans le même temps, les riches sont favorisés. Le caractère profondément inégalitaire de cette politique amène le gouvernement à verser dans l’autoritarisme, la concentration du pouvoir et la répression : réforme des institutions parlementaires, défiance vis-à-vis des corps intermédiaires, répression syndicale et des mouvements sociaux.

Notre intersyndicale se bat pour une société plus juste, plus fraternelle et plus solidaire. Notre plateforme revendicative est axée sur :

De vrais emplois :

- Arrêt des politiques d’austérités et pour une politique de relance de l’activité ́,
- Évaluation des politiques publiques et conditionnalité des aides aux entreprises,
- Création d’emplois statutaires et CDI,
- En attente d’emplois pérennes, dotation en PEC en cohérence avec les besoins du territoire et une vraie politique de formation…

Face à la cherté de la vie

- Augmentation significative du SMIC et revalorisation des grilles salariales,
- Revalorisation des minima sociaux et des pensions les plus faibles,
- Transparence sur le mécanisme de formation des prix…

Pour des Services Publics au service des usagers.

- Arrêt des privatisations,
- Défense des statuts,
- Plan de rattrapage en postes,
- Mise en place d’un vrai plan de résorption de la précarité
- Couverture territoriale à la hauteur des besoins.

Social

- Respect du syndicalisme et du droit du travail
- Un véritable plan de lutte contre la pauvreté.
- Amélioration de la couverture conventionnelle, de la prévoyance lourde et Santé
- Un véritable dialogue social qui respecte et renforce le paritarisme
- Application immédiate de toutes les conventions collectives à la Réunion
- Une Politique de construction de logements à la hauteur des besoins
- Une réforme de l’assurance chômage permettant une juste indemnisation et un réel retour à l’emploi.

Devant toutes ces urgences sociales, nous demandons, dans les meilleurs délais, un plan d’urgence d’envergure pour notre territoire. Nous espérons que nos revendications légitimées par la gravité de la situation trouveront écho auprès de vous. En tout état de cause, nous continuerons nos actions et mobilisations jusqu’à satisfaction de celles-ci.

Saint Denis le 24 octobre 2019

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