Collectif UFR-UFAL-CGTR

Des salariées humiliées à la Distillerie de Savanna

14 mai 2009, par Edith Poulbassia

C’est en tout cas ce qu’affirment une dizaine de femmes, toutes anciennes guides-interprètes, hôtesse de caisse ou assistante commerciale à la Distillerie de Savanna de Saint-André. Elles sont soutenues par l’UFR, l’UFAL et la CGTR.

Une dizaine de femmes se sont données rendez-vous hier matin à la Distillerie de Savanna à Saint-André. Sur les pancartes, des messages : « Sauvons les nouvelles recrues », « rendons la dignité aux jeunes filles, aux femmes, aux mamans », « respècte à nous ». Ces femmes sont toutes des anciennes employées ou postulantes de la Distillerie et affirment y avoir subi des humiliations, et une méthode de recrutement ambiguë. « Ces salariées nous ont sollicités, déclare Marlène Jeanne, de l’Union des Femmes Réunionnaises. Elles ont subi des humiliations. Le responsable commercial leur demandait des massages, il les portait sur ses épaules, leur proposait des promenades en moto, etc… Il sélectionnait ses salariées. Etre noire et musulmane, c’était le pire pour lui. Les salariées étaient contraintes de boire du rhum après chaque visite avec les touristes ».
Les témoignages de femmes se succèdent et dressent un piètre tableau des conditions de travail.

Deux employées licenciées

Deux entre elles, Marie-Françoise Bardil et Kévine Manoro, ont été licenciées par le responsable commercial en juillet 2008 et avril 2009. « Licenciement abusif », affirment-elles, car elles n’ont pas cédé à ses avances. « Il me faisait des propositions malsaines, me demandait de l’accompagner à des soirées et me poussait à quitter mon concubin, raconte Marie-Françoise Bardil. Tu es trop classe pour un homme comme ça, me disait-il ». La jeune femme est poussée à la démission, sombre dans la dépression à force de remontrances et d’humiliations devant les clients et les autres employés. Dans un courrier, elle avertit la Direction. Un mois plus tard, elle est licenciée.
Kévine Manoro va subir le même sort. Moqueries devant les clients, présentation à des hommes sur le lieu de travail… « Une fois même, il s’est permis de me dire d’éviter de mettre des dessous affriolants car il n’était pas insensible », raconte la jeune femme licenciée pour manque de motivation. Passons sur les coups de fil après le travail, l’implication dans la vie privée des salariées.

La Direction attend des preuves

Les autres employées ont préféré mettre fin à leurs contrats saisonniers plutôt que de subir les pressions de leur supérieur. Trois d’entre elles ont refusé tout simplement d’intégrer les postes proposés. Graziella Laude a ainsi refusé un poste de guide-interprète : « Il m’avait proposé un entretien dans sa voiture, prétextant un problème. Ça aurait été l’occasion de se lâcher, d’être plus cool, selon lui ».
Stéphanie Domi, assistante commerciale, a été « mise en récupération » pour avoir apporté son soutien à ses collègues.
Pour soutenir ces femmes et les rétablir dans leur dignité, un collectif, UFR (Union des Femmes Réunionnaises), UFAL (Union des Familles Laïques) et CGTR, a été créé. C’est avec les représentants de ce collectif que les femmes sont allées à la rencontre du responsable commercial et du directeur de la distillerie, Laurent Broc. En l’absence du premier, aucune explication n’a pu être apportée à ces femmes. Laurent Broc a affirmé qu’il étudierait les dossiers de ces salariées, mais qu’il attendait des preuves des accusations portées. Avant de reconnaître que « la situation perdure depuis 4 à 5 mois ». Les salariées avaient en effet exposé les problèmes lors d’une réunion avec la Direction. « Les lettres de convocation ont fusé et les mises à pied ont suivi », indique une salariée. Le directeur de la distillerie s’est engagé à organiser une confrontation avec le responsable commercial. En attendant, les salariées seront reçues cet après-midi par la présidente de l’UFR, Huguette Bello.

Edith Poulbassia

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