Fin de grève victorieuse

Emplois préservés à la Maintenance portuaire

29 août 2005

Dans un contexte où nous savons tous qu’il faut faire, pour le présent et pour l’avenir, d’immenses efforts pour créer des emplois en nombre suffisants, quels enseignements tirer de l’heureux dénouement de la grève au Sermat ?

Il n’est pas inutile de rappeler, pour commencer, que la grève de quatre jours qui a étranglé un certain nombre d’usagers portuaires la semaine dernière n’auraient pas eu lieu si les ouvriers de l’outillage portuaire avaient trouvé plus de transparence dans les informations relatives aux évolutions de la maintenance portuaire.
Il aura fallu quatre jours de grève pour obtenir des documents réclamés depuis la signature du contrat de maintenance entre la société Kalmar et le Sermat (Service de maintenance et assistance technique).
C’est-à-dire qu’à la base, il y a un certain type de fonctionnement des entreprises, qui a tendance à considérer les ouvriers dockers comme quantité négligeable.
Cela ne s’applique pas seulement à la demande d’information, mais surtout au fait qu’après avoir bénéficié d’une défiscalisation sur 5 ans pour l’achat de cavaliers, les signataires de l’accord passé entre la société Kalmar et le GIE Sermat (ex-GPA - groupement patrimonial des acconiers) ont imaginé donner la maintenance de cet outillage à une nouvelle société - en voie de constitution - plutôt qu’aux ouvriers du GIE, le groupement d’intérêt économique constitué par trois sociétés d’acconage.
Par cette grève, les ouvriers de Sermat ont obtenu de faire reconnaître leur droit à une formation continue pour assurer la maintenance d’un outillage plus pointu, ou “au pire” - si les donneurs d’ordre s’obstinent dans la liquidation du Service de maintenance des acconiers - d’avoir obtenu un reclassement après formation.

Des emplois préservés mais un conflit qui perdure

La bagarre est loin d’être terminée, au fond, mais les dockers du Sermat estiment avoir préservé leurs 42 emplois par ce conflit. La bagarre n’est pas terminée parce que, pour l’essentiel, les donneurs d’ordre - ceux qui orientent les choix des sociétés portuaires - ne sont pas à La Réunion. Mais c’est ici, à force de solidarité, que les salariés peuvent mettre en échec tous les projets qui passent par la case “licenciement”. Parce qu’avant même de créer de nouveaux emplois, il faut garder ceux qui existent.
Les quais ne sont pas le seul secteur d’activité où des risques de licenciements existent. Il va falloir se battre pour sauver des milliers d’emplois dans le bâtiment, ainsi que mille emplois menacés dans l’Éducation nationale. Les dockers, une fois de plus, ont montré la voie : fermeté et détermination des principaux concernés ont été indispensables sur le chemin de la lutte. Le plus important est de ne pas rester les bras croisés, partout où des emplois sont menacés.
Et quelquefois, pour ne pas rester passifs ou trop fatalistes devant une situation qui les écrase, les salariés doivent résister à d’énormes pressions : pressions des idées dominantes contre l’action syndicale, contre les perturbations que toute action de salariés introduit dans la vie économique ou sociale. Cette fois encore, la fermeté des dockers - alors même que certains connaissaient leur premier conflit - a été décisive.

Une solidarité qui paie

Leur succès peut être attribué à plusieurs facteurs.
Le premier est la très large solidarité des travailleurs de l’enceinte portuaire, mais aussi d’autres catégories de travailleurs - par exemple les planteurs en pleine campagne sucrière - qui, bien que gênés par la cessation de l’activité portuaire, ont compris qu’il se jouait quelque chose d’important.
Les élus régionaux aussi ont apporté un soutien important aux dockers en grève, en rappelant quelques principes de base de l’engagement de la collectivité pour “valoriser nos atouts”, à commencer par l’atout humain.
Enfin, il faut se réjouir de voir que le dialogue social a finalement prévalu. Il n’en a pas toujours été ainsi sur les quais du port. C’est pourtant la seule façon d’espérer faire avancer la société réunionnaise.

Dans le phénomène actuel de globalisation - qui n’est jamais qu’une étape nouvelle dans un processus d’expansion inhérent au capitalisme - ce que nous pouvons espérer faire depuis notre “caillou” est d’abord comprendre les réseaux d’intérêts qui nous rattachent au mouvement d’ensemble : La Réunion est proche de Maurice et de Madagascar et ceux qui détiennent les capitaux n’avancent jamais une pièce sur “l’échiquier” mascarin sans garder ce fait à l’esprit. Mais là où certains ne pensent encore qu’à dresser des salariés, des travailleurs les uns contre les autres, il nous faut imaginer un autre modèle social, à partir de la nouvelle donne économique mondiale.
Le chemin est encore long, mais toutes les luttes serviront à construire quelque chose de différent.

P. David

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