Enquête INSEE sur le patrimoine

Existe-t-il une classe moyenne à La Réunion ?

24 novembre 2011, par Manuel Marchal

L’enquête patrimoine de l’INSEE révèle des inégalités qui classent La Réunion dans le monde des pays en voie de développement avec une classe moyenne très réduite et énormément de pauvres. Car à La Réunion à la différence de la France, les professions intermédiaires, regroupant selon l’INSEE les emplois publics, ont un patrimoine deux fois plus important que la moyenne. Elles ne peuvent donc pas être le socle de la classe moyenne comme dans un pays développé et basculent donc dans un autre monde. C’est la conséquence de la pénurie d’emploi qui tire les revenus vers le bas, et d’une structure sociale décidée par Paris.

Un pays développé se caractérise par l’existence d’une classe moyenne importante. Cette dernière est le résultat des transformations sociales qui ont permis à des membres de la classe des plus démunis de faire fonctionner l’ascenseur social.
De la même façon, un pays en voie de développement n’a pas de classe moyenne. C’est soit la pauvreté, soit la richesse, et l’entre-deux est marginal.
L’enquête 2010 sur le patrimoine des ménages à La Réunion comporte des données qui démontrent clairement que La Réunion n’est pas un pays développé, car la classe moyenne n’existe pas. Les inégalités sont en effet bien plus importantes.

Inégalités sauf entre riches

Les 10% les plus riches dans notre pays peuvent avoir une situation comparable à celle des 10% les plus riches d’un pays développé comme la France. Leur patrimoine total moyen s’élève à 462.900 euros, contre 552.300 en France. Leur patrimoine immobilier est quasiment équivalent, 383.500 contre 388.000. C’est dans le patrimoine financier que peut s’observer un écart important entre les plus riches de La Réunion et de France, le rapport est de un à trois.
Le patrimoine moyen par ménage montre aussi des similitudes avec la France : 201.000 contre 259.000 pour la moyenne du patrimoine brut, 146.500 contre 160.500 pour le patrimoine immobilier moyen.
Lorsque c’est le patrimoine médian qui est pris en considération, les écarts deviennent importants. Il est de plus de 50% pour le patrimoine brut avec 91.200 euros à La Réunion, et 150.200 euros en France. Dans le patrimoine financier, l’écart est encore plus grand : 50% des familles réunionnaises ont moins de 1.900 euros à la banque alors qu’en France, ce seuil est de 10.300 euros, soit un patrimoine cinq fois plus important. Cet écart de 1 à 5 se confirme chez les plus démunis. Les familles réunionnaises les plus pauvres ont cinq fois moins d’épargne qu’en France : 100 euros contre 500 euros.

Les professions intermédiaires au-dessus de la classe moyenne

Outre le fait que la moitié des Réunionnais vive sous le seuil de pauvreté, ce qui exclut donc la moitié de la population de cette classe moyenne, une autre réalité explique pourquoi il est possible de s’interroger sur l’existence d’une classe moyenne à La Réunion.
Dans un pays développé comme la France, ce sont les professions intermédiaires qui constituent le socle de la classe moyenne. Ce sont principalement les agents de la fonction publique et parapublique. Cela se vérifie dans le patrimoine, puisqu’en France les professions intermédiaires ont un patrimoine comparable à la médiane.
Mais à La Réunion, les professions intermédiaires ont un patrimoine bien plus important que la médiane, le rapport est de un à deux. Donc ces professions intermédiaires ne font pas partie de la classe moyenne mais se situent clairement à un niveau bien au-dessus.
Vidée de son principal apport, la classe moyenne réunionnaise est donc réduite aux seuls ouvriers, ce qui constitue une autre particularité de notre île.
Il s’avère donc que si les plus riches arrivent à avoir un niveau de patrimoine comparable à celui des plus riches d’un pays développé comme la France, c’est tout de suite la pauvreté derrière eux à l’exception notable des professions intermédiaires, composée d’agents de la fonction publique, qui arrivent à faire mieux que leurs homologues en France.

Manuel Marchal

Classe moyenne en France, mais pas à La Réunion


L’enquête de l’INSEE met le doigt sur une particularité de la structure de la société réunionnaise : un patrimoine bien plus élevé chez les professions intermédiaires à La Réunion qu’en France.

Le patrimoine brut global des professions intermédiaires à La Réunion est de 276.500 euros, contre 208.400 en France, avec une médiane se situant à 215.600 euros à La Réunion, contre 177.200 en France.

Les employés, les ouvriers et les cadres ont un patrimoine brut global moyen légèrement plus élevés qu’en France, tandis que celui des artisans, commerçants et industriels est plus faible à La Réunion qu’en France.

Les professions intermédiaires à La Réunion ont un patrimoine médian deux fois plus important que le patrimoine médian de tous les ménages. En France, le patrimoine médian des professions intermédiaires se situe juste au-dessus du patrimoine médian de tous les ménages.

Cela signifie qu’à La Réunion, les professions intermédiaires ne font pas partie de la classe moyenne mais sont dans un autre monde.

Quelques chiffres


- Les 10% plus riches possèdent la moitié du patrimoine total.

- Les 5% les plus riches possèdent plus du tiers du patrimoine total.

- La moitié des familles réunionnaises ont moins de 1.900 euros à la banque.

- Les 10% les plus riches à La Réunion ont un patrimoine immobilier équivalent aux 10% les plus riches en France.

- La moitié des familles réunionnaises ont un patrimoine immobilier inférieur à 66.500 euros. En France, la médiane est à 106.700 euros.

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