Mouvement social dans les DOM

Face à l’impasse d’un modèle : ouvrir des perspectives de développement

12 février 2009, par Manuel Marchal

La situation sociale était le second sujet à l’ordre du jour de la conférence de presse du président de la Région. Paul Vergès constate que les mouvements sociaux dans les DOM traduisent l’impasse dans lequel se situe le modèle économique issu de la loi du 19 mars 1946, depuis la conquête de l’égalité sociale. La Région se félicite de la création d’un collectif de syndicats, d’associations et de partis politiques, et souhaite que la plate-forme de revendication permettra non seulement de corriger des inégalités, mais aussi d’ouvrir des perspectives de développement.

En ce début 2009, les DOM sont à la croisée des chemins. En novembre dernier, un mouvement réunionnais contre la vie chère avait été dévié dans une revendication corporatiste utilisée à des fins politiciennes. Il a été suivi par une mobilisation unitaire en Guyane, puis en Martinique, pour une baisse des prix des carburants. C’est ensuite la Guadeloupe qui est entré dans l’action, mais dans cet archipel, le mouvement a réussi à élargir sa plate-forme à l’ensemble des revendications de la population. Cette plate-forme est la base du rassemblement et de la cohésion d’une action qui dure depuis plus de trois semaines, rappelle Paul Vergès. Depuis une semaine, la Martinique s’est joint à ce mouvement, et la Guyane s’apprête à le faire. « C’est la deuxième partie de l’évolution des luttes sociales », précise le président de la Région, et « c’est la démonstration que nos îles connaissent toutes la même crise générale ».
C’est l’aboutissement d’un modèle né le 19 mars 1946 : l’intégration à la France. En 1981, l’arrivée au pouvoir de François Mitterrand avait débouché sur la proposition de Paris de l’intégration sans l’assimilation. Dès cette époque, Paul Vergès rappelle que la question des limites de cette politique avait été posée. En effet, la lutte pour l’application de la loi du 19 mars 1946 a permis la conquête de l’égalité sociale, qui s’est traduite par une amélioration considérable de la situation des plus démunis. 1996 a marqué l’alignement du SMIC sur celui de la France, suivi en 2002 par celui du RMI.
Mais ce modèle atteint ses limites. C’est ce qu’avait déjà déclaré Jean-Louis Debré lors du soixantenaire de l’abolition du statut colonial à La Réunion, ce sont aussi les propos de l’ancien Premier ministre Raymond Barre.
Cette « évidence économique » se transforme en une « évidence sociale » révélée par la vigueur du mouvement social dans les DOM. 
Un mouvement dont « les formes et les objectifs sont différents ». Paul Vergès pointe trois singularités de La Réunion par rapport à la situation des Antilles. Tout d’abord, « la Martinique et la Guadeloupe ont terminé leur transition démographique », ce qui n’est pas le cas de La Réunion qui va voir en 20 ans sa population passer de 800.000 à 1 million d’habitants, soit plus que la Martinique et la Guadeloupe réunies. Cette transition démographique a accentué le choc de la transformation brutale de La Réunion de société de plantation en société de service, et elle impose la construction d’infrastructures dans un contexte de décentralisation. Elle rend encore plus urgente la concrétisation de mesure pour améliorer la situation de 52% de la population qui vit sous le seuil de pauvreté, c’est une proportion plus importante qu’aux Antilles.
Ensuite, le poids plus important de la fonction publique dans le salariat à La Réunion qu’aux Antilles. Enfin, l’existence à La Réunion d’une esquisse de plan de développement avec déjà des « percées vers l’extérieur ». Cela se traduit dans notre île par l’ouverture de filières qui n’ont rien à voir avec l’existant. La Réunion se fixe l’objectif de ne plus utiliser de houille et d’hydrocarbures d’ici 20 ans, ce n’est pas le cas aux Antilles.
Dans ce contexte, la Région se félicite de la création d’un collectif rassemblant syndicats, associations et partis politiques. Paul Vergès souhaite que la plate-forme élaborée puisse ouvrir des perspectives de développement tout en corrigeant les inégalités sociales pour faire face à l’urgence. Et d’annoncer la pleine solidarité avec ceux qui revendiquent un meilleur salaire.

M.M.

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