9e jour de blocage patronal

Grève à la CILAM : les travailleurs toujours prêts à discuter

6 juin 2013

Pas d’avancée depuis 24 heures. La direction tente toujours d’imposer un préalable à toute négociation : la levée du piquet de grève. Alors que les travailleurs sont toujours prêts à discuter, une telle exigence ne peut que favoriser le blocage et les tensions.

Hier devant le piquet de grève des travailleurs de la CILAM, la SICA Lait a répandu du lait et du lisier.
(photo Toniox)

Pendant que la tension continuait à monter devant les grilles de la CILAM, les appels à négocier se sont multipliés. Mais il reste toujours un point de blocage qui est le même depuis le début. La direction exige la levée du piquet de grève pour participer aux négociations.

Pour leur part, les travailleurs sont conscients que ce piquet de grève constitue leur principale force dans le conflit. C’est pourquoi ils sont toujours prêts à discuter, mais à condition qu’il puisse garder cet atout dans les mains.

Hier, des discussions ont été entamées entre les parties et les médiateurs. Mais elles ont échoué. Vont-elles recommencer aujourd’hui, au 9e jour de grève ?

Du côté de la SICA Lait, c’est toujours la volonté de faire tomber le piquet de grève pour faire entrer sa marchandise dans l’usine. Un camion rempli de lait a été vidé devant la grille de l’usine. En même temps, du lisier était épandu au même endroit, tout cela devant les caméras.

Aussi spectaculaire qu’elle soit, cette manœuvre ne répond pas à une question. La SICA Lait est-elle vraiment obligée de jeter dans la rue des milliers de litres de lait ? N’y avait-il pas autre chose à faire que de détruire 250.000 litres de cette nourriture ?

Car l’usine CILAM n’est pas la seule structure de ce type à La Réunion. Il existe une autre usine dans l’Ouest, qui fabrique également des produits laitiers.

Et pourquoi ne pas non plus réfléchir à un moyen de livrer ce lait aux plus démunis avant qu’il ne soit périmé ?

Pourquoi ne pas utiliser en priorité le lait réunionnais ?

Depuis le début de la grève à la CILAM, la direction de la coopérative SICA Lait dit avoir dû jeter 250.000 litres de lait. Hier, la SICA Lait n’a pas hésité à épandre du lait mélangé à du lisier dans la rue devant l’entrée de l’usine de la CILAM.

Pourtant, la production en lait de La Réunion ne suffit pas à couvrir tous les besoins de l’industrie de transformation. Une part importante des yaourts est produite à partir de lait reconstitué et de lait en poudre, autrement dit du lait importé.

Dans ce cas, pourquoi la SICA Lait n’essaierait pas de négocier avec SORELAIT, l’enseigne Danone, pour que cette entreprise puisse acheter le lait qui est voué au gaspillage ?

Ainsi, priorité serait donnée au lait réunionnais.
An plis ke sa

Nassimah Dindar plaide pour que « les intérêts supérieurs de La Réunion » prévalent sur les « intérêts particuliers »

- Nassimah Dindar, présidente du Conseil général, regrette que "des éleveurs doivent jeter dans la nature plus de 300.000 litres de lait" alors que d’un autre côté, "de plus en plus de familles réunionnaises, même parmi les classes moyennes, ont du mal à boucler leurs fins de mois et sont quotidiennement confrontées à la cherté de la vie".

« Cette situation ne peut durer », ajoute Nassimah Dindar, qui rappelle que La Réunion sort déjà d’un conflit portuaire très long aux conséquences importantes et que l’économie réunionnaise est, dans son ensemble, plongée dans une crise profonde. « Il est impératif qu’une solution rapide soit trouvée à cette crise. J’en appelle à la responsabilité de chacune des parties concernées pour que les intérêts supérieurs de La Réunion et des Réunionnais puissent prévaloir sur les intérêts particuliers », conclut la présidente du Conseil général.

André Thien Ah Koon demande l’aide du Conseil général

- Dans une lettre adressée à la présidente du Conseil général, André Thien Ah Koon apporte son soutien aux producteurs de lait. Il dit que depuis hier, la SICA Lait refuse d’indemniser les agriculteurs pour le lait perdu. Il demande donc à la présidente de l’assemblée de mobiliser les fonds du Conseil général pour une aide compensatoire.

Patrick Erudel : l’augmentation de salaire coûte moins que les pertes de lait

- « Après l’épreuve de force dans une grande surface de l’Est, le blocage du Port ces derniers jours, c’est au tour du monde rural de souffrir de façon terrible avec des conséquences qui peuvent devenir grave. (…)

Actuellement, les pertes sèches sont de plus de 330.000 litres de lait depuis jeudi 30 mai à ce jour soit 217.470 € pour les éleveurs uniquement ne comptant pas la perte subie par la transformation. Même si la comparaison est audacieuse les salariés de la CILAM ne réclament actuellement qu’un brut global de moins de 40.000 € (sur la base de 30 employés). (…)

Pour éviter un désastre humain, économique, environnemental et social et simplement, en tant que Réunionnais, je demande à chacun de faire appel à son bon sens paysan et à cet esprit de concertation et de discussion qui nous caractérise tous pour aboutir dès demain à un bon accord équilibré, équitable et raisonnable ». (…)

Thierry Robert : pour une plate-forme commune

- « Depuis quelques semaines, les conflits sociaux se multiplient à La Réunion : grève à la SERMAT, à Carrefour et à la CILAM ces derniers jours. Des mouvements de grève qui s’enlisent et paralysent l’économie de l’île, déjà bien éprouvée. Il ne fait plus de doute que nous filons tout droit vers une explosion sociale à La Réunion si aucune décision politique forte n’est prise rapidement. Aussi, en ma qualité d’élu de la République, j’appelle solennellement les présidents des trois chambres consulaires à rassembler les acteurs politiques, sociaux et économiques autour d’une plate-forme commune de propositions destinée à défendre au niveau national, les intérêts de La Réunion ».

Europe écologie : Pourquoi gaspiller le lait ?

- « Loin de ses origines coopératives, la CILAM est désormais gérée selon les critères ultralibéraux d’une entreprise qui doit avant tout satisfaire ses actionnaires. Sur les bénéfices dégagés en 2012, 3 millions ont été affectés aux investissements et 2 millions d’euros de dividendes ont été distribués à ses "actionnaires" qui sont, en grande majorité, des coopératives agricoles.

Dans un département qui compte un grand nombre de personnes en précarité alimentaire, le gaspillage des denrées est insupportable. Le citoyen peut, légitimement se demander pourquoi les producteurs n’ont pas trouvé de moyens d’être solidaires des salariés de la CILAM. Les producteurs de lait sont dans une situation délicate et déversent le lait dans la nature. Pourquoi ne peuvent-ils pas le distribuer à la population ou le vendre au prix de revient, comme l’ont fait les paysans métropolitains lors des "crises de lait" en 2009 et 2011 ? »
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