Inacceptable !
160 soudeurs Thaïlandais engagés pour 200 euros par mois sur le chantier du Gol

15 avril 2005

Avec un taux de chômage de 33,5%, trois fois supérieur à celui de la métropole, le problème de l’emploi monopolise tous les débats à La Réunion. L’annonce de la venue de 160 soudeurs thaïlandais, rémunérés 200 euros par mois pour la construction de la chaudière thermique du Gol suscite l’indignation générale.

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Toute manifestation de colère à l’encontre de ces travailleurs surexploités serait injustifiée car cette situation inacceptable provient de ce que La Réunion se trouve directement confrontée aux effets de l’ouverture des marchés mondiaux telle qu’elle résulte de la doctrine économique du Traité Constitutionnel européen : un marché où "la concurrence est libre et non faussée". Et cela, alors même que les potentialités de formation et le vivier de travailleurs expérimentés de La Réunion lui permettraient de proposer ce chantier à de nombreux Réunionnais à la recherche d’un emploi.
Répondant à l’offre de la Compagnie thermique du Gol pour l’extension de sa centrale de Saint-Louis, la multinationale italienne Ansalo a obtenu le marché, qu’elle a à son tour concédé en sous-traitance à une entreprise thaïlandaise.
C’est la loi du marché. Loi impitoyable, véritable loi de la jungle où seul compte la recherche du profit maximum.
Il y a déjà eu de nombreuses réactions et protestations contre ce scandale. Qu’il s’agisse des représentations syndicales, des autorités préfectorales - qui affirment n’avoir pas encore donné leur accord pour l’octroi de visas à ces ouvriers - et de nombreux élus du Sud, dont la micro-région affiche 45% de taux de chômage. Et l’on peut augurer que l’opinion publique réunionnaise ne restera pas sans réaction car la crise de l’emploi locale est d’une ampleur telle que nul ne saurait décemment accepter de voir La Réunion être privée de ces emplois.

Estéfany


Réactions

o Syndicats :
une mise en concurrence des salariés scandaleuse

"Les organisations syndicales signataires condamnent le fait que la construction d’une chaudière, dans le cadre de l’extension de la Centrale thermique du Gol, soit assurée par des travailleurs taïwanais surexploités dont la société intervient en sous-traitance de la multinationale italienne ANSALO.
Sur le fond et compte tenu de la situation du chômage massif et durable que connaît note île, cela est profondément scandaleux.
Cette situation était prévisible par les autorités préfectorales qui délivrent les visas.
Il est regrettable que cette affaire éclate au travers d’un journal.
La responsabilité du maître d’ouvrage qu’est la Centrale thermique du Gol est directement engagée. Quelle est sa responsabilité au sujet de l’emploi des Réunionnais et de la cohésion sociale de l’île ? Celle-ci doit-elle s’effacer devant les intérêts purement financiers ?
Nous avons là une application par anticipation de la directive Bolkestein et de la politique de dumping social par mise en concurrence des salariés.
Les organisations syndicales signataires appellent l’ensemble des salariés, et au-delà, la population réunionnaise à suivre de près cette affaire et à riposter en tant que de besoin."

o Le Collectif de lutte contre l’exclusion :
empêcher "“Humiliation” des Réunionnais"

Dans un communiqué diffusé hier, le C.L.E. (Collectif de lutte contre l’exclusion), sous la signature de son président, Jean-Pierre Técher, se dit "indigné et révolté" par la décision de l’entreprise ANSALO de "faire venir 150 ouvriers taïwanais pour réaliser des travaux de soudure" à la Centrale thermique du Gol. Le C.L.E. déplore que "dans ce contexte de chômage aussi important que connaît notre île" et "du peu de déboucher offert à notre jeunesse qui arrive chaque année sur le marché de l’emploi", cette décision seule équivaut plus à "une déclaration de guerre qu’à une simple provocation".
Le C.L.E. interpelle l’ensemble des élus et des services de l’État pour "empêcher cette “humiliation” des Réunionnais". Aussi, le Collectif "met en garde des électeurs réunionnais pour leur dire qu’ils ont là un avant-goût de ce qui va se produire si jamais ils votaient “oui”" au référendum sur le traité de Constitution européenne le 29 mai prochain.


o Agir pou nout tout : Si la Constitution européenne lé voté,
voilà sate i arrivé oté !

L’association Agir pou nout tout a quant à elle réagi en écrivant un poème :

“In constitution bandée !!!”

Kamarad, fo fé pète la kole,

Agarde l’usine du Gol,
la pa embauche kréol

Si la Constitution européenne lé voté,
voilà sate i arrivé oté !

D’autre main-d’œuvre arrivera,
sur la paille, tu dormiras.

La loi y pourra rien faire,
La Réunion sera un enfer.

Le chômage sora un cancer,
la gangrène va pourri le zafer,

Le kréol va dort a ter.

Si nou vé pa lo zafèr,
alon Agir pout tout partout toultan.

Les poètes en herbe de Bras-Panon


Erratum

Dans le communiqué reproduit hier d’Agir pou nout tout sur l’observatoire des prix, il s’est glissé une erreur de saisie : les 2,5 kg de riz Basmati sont 242% fois plus chers à La Réunion qu’à Maurice, et non pas 24% comme mentionné.


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