Assemblée générale d’Agir contre le Chômage (AC Réunion)

Informer les précaires sur leurs droits

30 janvier 2006

Le 27 janvier 2006, 16 rue Charles Gounod à Saint Denis, AC Réunion a réuni son assemblée générale annuelle.

"Nous avons conscience d’être en face d’un monde qui meurt, mais nous avons du mal à en imaginer un autre...". C’est avec cette première phrase que la présidente du mouvement "Agir contre le Chômage (AC Réunion)", Patricia Château, commence la lecture de son rapport moral. Le ton est donné, ainsi, la jeune mère de famille dit tout haut ce que les oreilles du pouvoir et une grande partie du monde politique refusent d’entendre. Tout en poursuivant sa lecture, le ton monte, parfois ironique, parfois revendicatif. Elle en profite pour envoyer des pics à la classe dirigeante, son rapport se dédoublant dans une véritable attaque en règle contre ceux qui promettent des lendemains qui chantent et qui, une fois au pouvoir, laissent la précarité s’installer comme si c’était un choix de société inéluctable. "Depuis plus de 20 ans, des spécialistes et des experts de pacotille nous annoncent le retour de la croissance et le dynamisme économique censés nous sortir de la crise ! Or, la crise est devenue un état permanent. Ce qui n’empêche pas qu’un flot d’argent continue de couler sur une minorité tandis que la pauvreté s’installe aux coins de nos rues, dans nos villes et nos campagnes", continue de dénoncer Patricia Château.
Pas plus le MEDEF que le gouvernement ne sont épargnés. Dans ses attaques à répétitions, on peut sentir le ras-le-bol et le dégoût de ceux qui, sur le terrain, ne cessent d’œuvrer dans le soutien aux précaires. Pour mieux enfoncer le clou, la présidente argumente : "Pendant ce temps, le MEDEF agite devant les partenaires sociaux un déficit qu’il a créé pour terroriser tout le monde", et elle poursuit avec les aides aux précaires qui achètent la paix sociale : "Avec les minima sociaux, on gère la pénurie au sein de l’abondance, on maintient les bénéficiaires dans une marginalisation et une dépendance chronique". La suite de ce rapport est un véritable inventaire des dérives gouvernementales et patronales. Elle termine son intervention par un chapitre sur l’histoire du mouvement ouvrier, en insistant sur cette phrase qui résume l’ensemble de son réquisitoire : "Nous devons toujours avoir à l’esprit le fait qu’un mouvement ou une classe n’a confiance en elle-même que lorsqu’elle a conscience d’être une force".
Le rapport adopté à l’unanimité, la parole est donnée au secrétaire d’AC, Jean Pierre Técher.

"Nous pallions l’incurie des administrations"

Toujours égal à lui-même, Jean Pierre Técher renchérit en 3 volets que l’on pourrait nommer : "Hier, Aujourd’hui et Demain". Le secrétaire fait une analyse extrêmement pointue et convaincante sur les dérives d’hier qui ont poussé une partie importante de la classe laborieuse vers une précarité permanente, vers une voie d’abandon. Il fustige un patronat égoïste tourné uniquement vers le profit, il dénonce les gouvernements trop lâches qui, depuis des décennies, sont aux ordres des organisations patronales. Aujourd’hui, poursuit-il en substance, "Agir Contre le Chômage est devenu le rendez-vous, non seulement des chômeurs, mais aussi celui des désespérés et des abandonnés. Nous voyons tous les jours des hommes et des femmes qui frappent à notre porte, certains sont au bord de la crise de nerfs ou du suicide, nous pallions l’incurie des administrations".
Il poursuit avec la longue liste des actions de l’association, notamment celle de la formation des exclus pour qu’ils puissent à terme se débrouiller dans la vie de tous les jours, que ce soit dans la lecture des documents administratifs ou dans les démarches en matière de droit, car dit-il, "beaucoup de précaires ignorent leurs droits et restent prostrés dans un sentiment d’abandon". En parlant de Demain, c’est-à-dire des projets d’AC Réunion, Jean-Pierre Técher donne des directives et des pistes aux adhérents de l’association, il prévoit de renforcer les équipes sur le terrain qui déjà en 2005 sont allées à l’écoute des plus démunis, il prévoit de renforcer l’expérience déjà engagée d’une formation des précaires à l’informatique, notamment sur les logiciels Word et Excel, ainsi qu’un apprentissage du surf sur Internet.
AC poursuivra également dans l’année qui s’avance la distribution de colis alimentaires d’urgence. Un des soucis premiers de l’association en 2006 sera d’initier une démarche pédagogique auprès des allocataires de minima sociaux et des chômeurs, concernant les nouvelles mesures pour l’emploi (CIRMA - CAV - Contrats d’accompagnement - CPE - CNE etc...).
Jean-Pierre Técher met au vote ces propositions ainsi que la reconduction du bureau. Te tout est adopté à l’unanimité.

"Des jeunes chômeuses avec Bac +3 veulent apporter leur pierre à l’édifice !"

Une fois l’ordre du jour de l’AC entériné, le secrétaire donne une dernière fois la parole aux adhérents, en précisant que le Conseil d’administration n’est pas figé et est prêt à s’ouvrir à ceux qui le souhaitent. Deux jeunes adhérentes de l’association créent alors la surprise en demandant à rentrer dans le Conseil d’administration. La première à s’exprimer est Mlle Frasie Laurenza : "Jeune militante d’AC, titulaire d’un BAC +3, je souhaite apporter ma pierre à l’édifice", la 2ème, Mlle Beausillon Stéphanie, renchérit en arguant des mêmes raisons qui la poussent à aller plus loin dans son engagement dans l’association. Une fois l’élargissement du bureau accepté, Jean-Pierre Técher invite ces 2 nouvelles recrues à rejoindre la table des dirigeants, les invitant à se présenter. Les 2 jeunes femmes retracent leurs parcours qui ressemblent en tous points au parcours d’un jeune Réunionnais qui sombre dans la précarité, pente descendante vers l’exclusion, le même chemin sinueux allant des petits boulots aux stages sous-payés, en passant par la case mobilité, pseudo passeport pour un monde meilleur, le tout emballé dans une bonne dose de pessimisme. Elles déclarent qu’elles veulent en découdre avec l’immobilisme. Elles rappellent que les jeunes sont demandeurs de responsabilités dans la vie citoyenne, mais que bien souvent, ils ne savent pas comment s’engager. Elles terminent ensemble leurs interventions dans un vibrant appel à la mobilisation du 7 février contre le "Contrat nouvelle embauche". Personne ne réclamant plus la parole, la séance est définitivement levée.

Philippe Tesseron

http://www.espaceblog.fr/teletesseron/


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