Investissement dans les DOM-TOM : l’Etat veut réduire les avantages fiscaux dès l’an prochain

28 juillet 2008

La commission des Finances de l’Assemblée nationale chiffre le coût des niches fiscales à 73 milliards d’euros en 2008, soit une hausse de 46% depuis 2003. Ce montant représente 27% de pertes des recettes fiscales net de l’Etat. Le coût des niches fiscales pour les finances publiques n’en finit pas de s’alourdir, lui qui était déjà de 50 milliards d’euros en 2003, selon les chiffres avancés par la mission d’information de la commission des Finances de l’Assemblée nationale, qui a présenté hier le résultat de six mois de travail sur le sujet. Des chiffres d’autant plus inquiétants qu’ils montrent une accélération des dérogations fiscales : sur les 486 niches existantes, près de 70 ont été créées ces cinq dernières années sous forme essentiellement de crédits d’impôt. « Entre 2007 et 2008, le coût global des dépenses fiscales devrait augmenter de 7,1%, soit plus de quatre fois la progression des dépenses budgétaires », précise ainsi le rapport.

Ce transfert entre dépense budgétaire et crédit d’impôt profite surtout aux foyers fiscaux les plus aisés : 150 des 10.000 plus gros revenus n’ont pas payé d’impôt en 2006, certains bénéficiant même d’une restitution fiscale, souligne le rapport. Et les 100.000 contribuables tirant le meilleur profit des dérogations fiscales catégorielles ont réduit leur impôt de 15.240 euros en moyenne, soit un manque à gagner supérieur à 1,5 milliard d’euros pour l’Etat. Trois niches sont particulièrement prisées : les investissements outre-mer (46,8% des réductions d’impôt), l’emploi d’un salarié à domicile (17,2%) et des crédits d’impôt au titre de conventions internationales et évitant les doubles impositions (16,8%).

Le rapport note aussi qu’à partir d’un certain niveau de revenu, la progressivité de l’impôt s’inverse, au mépris du principe d’équité fiscale : en 2006, les 5.000 revenus les plus importants ont été imposés en moyenne à 36%, contre 24,2% pour les 10 plus gros d’entre eux.

Pourquoi s’attaquer aux DOM-TOM ?

Le rapport de Bercy remis hier au Parlement est très clair : le nouveau plafonnement à venir des niches fiscales ne rapportera rien à l’Etat. Quand on regarde les secteurs touches, on constate que l’économie censée être réalisée est minime en face des aides aux entreprises (prime pour l’emploi - 4 230 millions d’euros -, exonération ou imposition diverses - 3 200 millions d’euros ...). Or ces dernières avaient pour but la création d’emplois, emplois que l’on attend toujours. Ces niches fiscales accordées aux entreprises ont surtout servi pour celles-ci à leur gestion et leur marge plutôt qu’à développer leur production. Il en est de même avec les avantages liés au bouclier fiscal, une des premières mesures du Président Nicolas Sarkozy, qui en fait a profité surtout aux plus nantis, que l’on a pu estimer à 845 millions d’euros en 2008.
Face à ces dernières sommes colossales, l’économie réalisée en réduisant les avantages fiscaux dans les DOM-TOM ne rapportera - d’après le ministère des finances lui-même - que 168 millions d’euros.

Mais le gouvernement s’obstine à s’attaquer aux avantages fiscaux dans les DOM-TOM qui ont quand même permis (même s’il existe de nombreux abus) à relancer les économies de ces territoires fragilisés par des années de colonialisme et d’une gérance dépendante de la métropole.

En faisant croire qu’il s’attaque aux niches fiscales et en épargnant les plus grosses, le gouvernement montre de quel côté penche sa balance. Deux poids deux mesures.

A.L. (avec Les Echos)


Des attentes déçues

DOM-TOM : l’avantage fiscal limité à 40.000 euros

Quatre scénarios sont proposés pour plafonner les réductions d’impôts liées à des investissements - tant productifs que locatifs (il s’agit donc de traiter deux niches en même temps) - dans les départements et territoires d’outre-mer. Le premier consiste à plafonner à 10.000 euros l’avantage fiscal global obtenu. Le deuxième limite la ristourne à 20% du revenu imposable. Troisième hypothèse : permettre au contribuable d’opter pour le plus favorable des deux premiers scénarios. Quatrième hypothèse, enfin, qui a la préférence de Bercy : le choix entre un plafond à 40.000 euros et un autre à 15% du revenu. Cette solution à l’avantage de « préserver du plafonnement un plus grand nombre des contribuables bénéficiant des réductions d’impôts les moins élevées sans nuire aux objectifs économiques poursuivis ».
Même si l’Inspection générale des finances s’en est tenue à la stricte mission qui lui était assignée, bien des attentes risquent d’être déçues. Car, aux yeux de nombreux parlementaires de la majorité, ce rapport devait servir en se penchant sur l’ensemble des niches fiscales, sinon à financer le revenu de solidarité active (RSA), du moins à rétablir l’équilibre avec le bouclier fiscal voté l’été dernier bénéficiant aux plus aisés et chiffré, selon les dernières estimations, à 845 millions d’euros en 2008. A défaut de créer un impôt minimal auquel Bercy a renoncé il y a déjà six mois.


Un plus grand nombre de ménages pourrait obtenir des avantages

Secteurs sauvegardés : faire le tri entre les dépenses

Deuxième niche dans le viseur du ministère : les dépenses architecturales et paysagères réalisées dans les secteurs "sauvegardés". Le rapport estime que, « au regard des pratiques constatées », un plafond sur ces dépenses déductibles du revenu ne devrait « pas être inférieur à 200.000 euros ». Dans le cas particulier des zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (ZPPAUP), dans lesquelles les contraintes sont moindres pour les propriétaires, seule une partie de la dépense pourrait être prise en compte. Le rapport reprend par ailleurs plusieurs conclusions formulées cet hiver par un groupe de travail interministériel, plaidant notamment pour la distinction, dans la déclaration de revenus, entre dépenses de restauration et de travaux imposés et « charges foncières qui relèvent de l’activité locative normale », afin d’exclure ces dernières du champ des niches fiscales.

Concrètement, le rapport suggère qu’à enveloppe quasi constante, un plus grand nombre de ménages pourrait obtenir des avantages. Exemple : un investissement locatif outre-mer de 9 millions d’euros pourrait être monté par 50 personnes apportant chacune 72.000 euros, au lieu de 28 personnes contribuant chacune à hauteur de 128.000 euros. Dans le cas des DOM-TOM, Bercy prévoit, au mieux, de gagner 168 millions en plafonnant fortement les avantages fiscaux (lire ci-dessous). Dans le cas des locations en meublé, le rapport évoque un gain maximal de 18 millions au cas où la niche disparaîtrait. Pour les monuments historiques, aucune économie n’est attendue.

La raison est simple : « Le gouvernement n’estime pas opportun de remettre en cause la pertinence de chacun de ces dispositifs. » Selon Bercy, les niches en question, malgré tous leurs défauts, sont fondées dans leur principe. En outre-mer, elles sont « défavorables sur le coût du foncier ou le type de logements produits », mais elles créent des emplois (plus d’un millier en 2006).

Sources Les Echos 

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