Le 20 désanm des travailleurs, vus par...

Jean-Pierre Rivière, CFDT : « Pour un 20 désanm férié, chômé »

19 décembre 2006

« A la CFDT, on trouve dommage que cela devienne un jour “banalisé” : tous les commerces sont ouverts... Il n’y a plus la ferveur d’autrefois. C’est un jour férié de plus, que les gens vont fêter dans les grandes surfaces en faisant leurs achats. On n’a plus les maîtres d’esclaves, ils ont été remplacés par le profit et la consommation. Depuis l’année dernière, nous appelons à la fermeture des magasins le 20 désanm.
Nous allons coller des affiches qui disent « Nos libertés ne sont pas à vendre » et on essaiera symboliquement de déposer des gerbes devant quatre grandes surfaces : deux dans le Sud, deux dans le Nord. L’an dernier, notre syndicat commerce a initié cette action et il a été empêché d’entrer dans une grande surface du Nord.
Nous voulons que le 20 désanm devienne férié et chômé. C’est une revendication à défendre en intersyndicale avec la CGTR et la CFTC et, plus largement, avec les associations qui militent pour donner sa signification au 20 désanm.
Il faut en revenir “aux sources”. Le 20 désanm, c’est notre fête à nous. Il faut en arriver à une journée fériée et chômée pour tout le monde. Actuellement, il n’y a que dans les commerces que les salariés travaillent, dans d’autres secteurs, ils sont en congé ou dans des entreprises qui ferment ce jour-là. L’argument “économique” des patrons du commerce ne tient pas cinq minutes. Si certains patrons sont prêts à payer leurs salariés ce jour-là 2 ou 3 fois leur salaire habituel, c’est parce qu’ils gagnent énormément en cette période de fin d’année ; et malgré cela, ce qu’ils sont prêts à donner en supplément pour enchaîner les salariés à la tâche ne constitue pas non plus une répartition plus juste.
Le 20 désanm est une fête spécifique pour les Réunionnais ; il faut en revenir au sens de cette fête, date de l’abolition de l’esclavage et ciment du peuple réunionnais ».


•Jacky Balmine, CGTR Bâtiment : « Le 20 décembre, désertons les magasins ! »

C’est l’abolition de l’esclavage qu’on fête, mais aujourd’hui, dans le commerce, les salariés ne sont plus maîtres de leur vie. Ils vivent un esclavage moderne ! Aujourd’hui, il est devenu “normal” pour certains de faire travailler le dimanche et les jours fériés. Certains demandent qu’on fasse travailler les salariés tard le soir ! C’est de l’inconscience...
J’ai beaucoup d’amis qui travaillent dans les commerces et ils sont dégoûtés ! Pour la plupart, les heures supplémentaires passent en récupération ; ça n’est presque jamais payé.
Je pense que, pour arrêter cela, il faut beaucoup de solidarité entre les Réunionnais. Pour le 20 décembre, qui est notre fête à nous, c’est notre Histoire et c’est à nous de la faire respecter. Si nous sommes très nombreux à décider de ne plus aller dans les commerces le 20 désanm, nous obtiendrons de les faire fermer ce jour-là. Je dis à tous : « Ce 20 désanm, n’allez plus dans un magasin ! Soyez solidaires ! »


Ivan et Robert Hoareau, CGTR : « Le 20 désanm interpelle tous les Réunionnais »

« Pour le 20 désanm, il faudrait mobiliser au-delà des syndicats. Cette fête interpelle tous les Réunionnais, politiques, associatifs, tout le monde... » dit Ivan Hoarau, secrétaire confédéral de la CGTR. « Ce n’est pas seulement la fête des travailleurs. Pour moi, c’est une fête réunionnaise à mettre en parallèle avec le 14 juillet. Il n’y a pas de date plus fédératrice que le 20 désanm, pour La Réunion », ajoute Robert Hoareau.
Mais pour l’heure, ce sont surtout les syndicats qui se réunissent, provoquent des rencontrent “partenariales” avec le patronat et demandent que cette journée soit « fériée, chômée et payée » pour ce qui concerne la CGTR.
La CGTR avec la CFDT et la CFTC a eu une réunion à la Direction du Travail, à laquelle étaient conviées des organisations syndicales patronales. « La CGPME n’est pas venue, seul le MEDEF était présent et il est totalement opposé à notre vision » poursuit Ivan Hoareau.
Du côté syndical, une démarche d’unité s’est amorcée. Cette année, l’Intersyndicale n’a pas vraiment eu le temps de mettre le 20 désanm à son programme. Il y a eu d’autres urgences... Aussi chaque syndicat a poursuivi sur sa lancée : campagne d’affiches pour la CFDT et la CGTR et, peut-être, des dépôts de gerbes communs ce mercredi à Saint-Pierre, Le Tampon, Sainte-Marie et Saint-Denis.
« Nou vé le 20 désanm i dovien jour férié, chômé, payé » dit Robert Hoareau en rappellant que la CGTR avance cette revendication depuis plusieurs années. « Le patronat s’y oppose parce que le 20 désanm est proche des fêtes. Mais il ne faut pas croire qu’une fermeture le 20 leur ferait perdre tant d’argent. En fait, ils sont prêts, pour certains, à payer 2 à 3 fois les salaires ce jour là, plus un jour de repos récupéré et il y a des salariés qui entrent dans cette logique en disant que “cela les aide à préparer Noël” » poursuit Robert Hoareau.
L’année prochaine, l’unité d’action pourrait aller jusqu’à une campagne unitaire appellant à remettre en cause l’ouverture des magasins le 20 décembre.
« C’est dans la tête des gens que les choses ne sont pas assez avancées » estime pour sa part Robert Hoareau. « Il n’est pas facile de parler de tout cela parce que le 20 désanm a été beaucoup galvaudé. Il est plutôt vu sous l’angle festif, comme Noël ou le Jour de l’An, plutôt que comme une date commémorative. Personnellement, je la vois comme une date liée à la naissance du peuple réunionnais ».
Ivan Hoareau ajoute que « cette date est importante pour renforcer l’unité réunionnaise ».
Aussi, la CGTR pense à l’avenir concentrer ses efforts pour « interpeller et unir toutes les forces vives, pour que tous ensemble nous arrivions à faire bouger les choses ».


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