Négociations salariales annuelles du BTP : les revendications de l’Intersyndicale

’La branche est en train de grandir’

25 avril 2006

Vendredi, représentants des salariés et du patronat du BTP tiendront leur 5ème réunion de négociation salariale. L’Intersyndicale CGTR-FO-CFTC-CGC sera accompagnée des délégués syndicaux de chaque entreprise pour faire entendre le sérieux de ses revendications. L’Intersyndicale veut une réforme des critères de négociation, non plus basée sur l’inflation qui doit être acquise, mais sur la prise en compte des bénéfices du secteur pour proposer un salaire juste et décent aux travailleurs. Face à la menace d’une recommandation patronale, elle durcit le mouvement. Les salariés sont prêts à la mobilisation.

Pour négocier, il faut déjà s’entendre sur une base de discussion. "Malheureusement, le patronat n’entend toujours pas la revendication des 10% sur cette négociation de salaire", déplore Alain Naillet, secrétaire général de la CGTR-BTP. En se cantonnant à négocier l’inflation de 2,6% de décembre 2005, contre 3% en février 2006, et en proposant une augmentation salariale en-deçà de cet indicateur, l’Intersyndicale ne se sent pas prise au sérieux, mais méprisée et à travers elle les salariés. Elle demande le respect.

"C’est inacceptable !"

Avec un chiffre d’affaires de 1,7 milliard d’euros sur 9 mois de 2005, soit une augmentation de 30% par rapport à l’année précédente, le BTP confirme sa bonne santé. Le patronat, s’il en convient, refuse néanmoins d’afficher ses bénéfices. "Il nous dit qu’il ne peut pas donner ce qu’il n’a pas, explique Alain Naillet. Arrêtez de croire que nous sommes des idiots. Effectivement, nous ne sommes pas des experts, mais l’on peut aussi se mettre à l’étude".
Sur la base du rapport des bénéfices des 18 plus grosses entreprises du secteur, obtenu par ses propres ressources, l’Intersyndicale évalue les profits du secteur à 74 millions d’euros pour 2005. Appliquée à l’ensemble des salariés du BTP, l’augmentation salariale de 10% demandée mobiliserait 35 millions, soit un partage quasi équitable des bénéfices entre patronat et salariés.
10% cela équivaut à 1 euro brut d’augmentation de l’heure pour la grille des 35 heures, soit 152 euros bruts par mois. Pour Alain Naillet, "ce n’est pas ce 1 euro brut qui met en péril les entreprises du BTP. Tous les indicateurs sont au vert jusqu’en 2015... Si les entreprises tombent, c’est à cause d’une mauvaise gestion". Mais au bout de 4 réunions, le patronat discute toujours l’inflation, "propose toujours une diminution du pouvoir d’achat des travailleurs. C’est inacceptable !".

"Il ne faut pas nous la raconter"

Pour René Anelard de la CFTC, "on ne peut pas discuter quelque chose qui appartient déjà aux salariés. Les ouvriers qui participent au développement de l’entreprise partagent leur savoir-faire, attendent une augmentation digne pour faire face au coût de la vie. La perte du pouvoir d’achat engrangée depuis plusieurs années ne peut pas continuer".
Faisant fi de ces arguments, la FRBTP et la CAPEB n’ont pas la volonté de faire bouger les choses, d’entamer de vraies négociations. Selon l’Intersyndicale, le patronat essaie même de polluer le débat avec le chikungunya et la route du littoral ; des événements qui sont certes à prendre en compte mais dans le cadre des négociations salariales de 2007. Il tente de faire jouer les primes de panier, de trajet et de transport négociées en 2004, estimant que leur application progressive, par tiers de paiement, viendrait gonfler l’augmentation salariale à 16%. Alors que les travailleurs ne bénéficieront pleinement de leur prime de panier qu’en 2007, en attendant, les entreprises l’ont majorée sur leurs factures de fournitures. C’est sans insister sur les 3 indices qui correspondent à des travaux de manœuvre rétribués en-dessous du SMIC et appliqués aussi à des ouvriers qualifiés. "Il ne faut pas nous la raconter. Il faut nous respecter", demande Alain Naillet. "La branche est en train de grandir".

"On dit ça suffit, stop !"

Les représentants du patronat semblent palper la détermination syndicale, l’évolution du ton des revendications et menacent d’utiliser la recommandation patronale qui clôturerait toute négociation. René Anelard voit cet "ultimatum" comme le reflet du passage en force du gouvernement qui brandit son article 49.3. "On se cache derrière les petites entreprises pour refuser de partager le profit, mais pendant ce temps, on assiste au retour des bénéfices vers la maison-mère en métropole. Avec ces salaires, quelle retraite pour les ouvriers ? Si aujourd’hui l’on ne se bat pas pour gagner ce que l’on mérite, ce sont les jeunes de demain qui en pâtiront. On dit ça suffit, stop ! Donnez-nous ce qui nous revient pour que les jeunes préparent leur avenir". Et ce sont ces mêmes jeunes, cadres, personnels qualifiés qui préfèrent intégrer la Fonction publique pour des salaires plus attractifs que le BTP. "Laisser baisser les salaires, c’est leur fermer la porte", soutient Jean-Max Dagard, CGT-FO, rappelant que le secteur doit créer 2.000 emplois en 2006.

Un sujet brûlant

Le BTP a un bel avenir devant lui. Les négociations salariales ne doivent pas l’ignorer. Si vendredi, le patronat continue à proposer la diminution du pouvoir d’achat, "les militants élus de chaque entreprise seront là pour dire que si vous n’écoutez pas, les travailleurs suivront". À l’exception de la CFDT, les syndicats du BTP font "bloc pour la dignité des salariés" et s’attaquent, en filigrane, à la question brûlante de la compensation du coût de la vie, plus chère à La Réunion de 25 à 30%, selon le rapport d’État. Prochain conflit social de l’année ? Début d’une large revendication à l’ensemble des salariés du privé ? Une chose est sûre, la vie est chère pour tous, sans exception.

Estéfani


Appel de la CGTR-BTP

La Fédération CGTR/BTP appelle l’ensemble de ses militant(es), adhérent(es), sympathisant(es), dirigeant(es) à venir manifester massivement dans le cadre du 1er mai unitaire, devant le Jardin de l’État à partir de 8h30.
Ses mots d’ordre sont :

- Augmenter les salaires ;

- La construction de 12.000 logements sociaux par an ;

- Le paiement de la prime conventionnelle panier, trajet, transport à taux pleins pour tous les ouvriers ;

- Le retrait du C.N.E ;

- La retraite à 55 ans dans le BTP ;

- Le refus de la casse du Code du travail et des Conseils des prud’hommes ;

- Pour un vrai service public ;

- Le refus de la précarité d’emplois dans le privé et dans le public.


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