Du fait d’une crise profonde

La concertation et le respect de la parole réunionnaise s’imposent

8 août 2009

Nous sommes au cœur d’une crise économique et sociale profonde. Plus personne aujourd’hui ne l’ignore. Nous avons toujours dit que, pour s’en sortir, il faut des solutions réunionnaises, quasi consensuel-les. L’actualité nous donne l’occasion d’illustrer une fois de plus ce réalisme.

La semaine dernière, les syndicats représentant les TPE-PME avaient annoncé leur refus de l’extension de l’accord salarial signé par le Medef et l’intersyndical du Cospar. Les représentants des TPE-PME et la CGPME ont décidé de se regrouper autour d’une plate-forme commune pour s’opposer à cette mesure. Ils ont été reçus par le représentant de l’État à la préfecture. Mais, unilatéralement, le gouvernement vient de trancher. Aurait-on pu agir autrement ? Un rappel du déroulement des faits permettra de mieux comprendre la situation.
La Confédération générale des petites et moyennes entreprises (CGPME) a regroupé 22 syndicats ou organisations patronales opposés à l’extension immédiate de l’accord régional interprofessionnel du 25 mai 2009. Celui-ci, signé par le MEDEF et cinq syndicats de salariés, prévoit — pour les salaires inférieurs à 2,16 SMIC — l’attribution mensuelle d’un bonus exceptionnel de 50 à 60 euros pendant 3 ans.
Coupant court à la concertation engagée avec les TPE-PME, le gouvernement vient d’étendre l’accord par décret, l’imposant ainsi à près de 40.000 entreprises, soient 100.000 salariés.

Patronat RSTA
Smic à 1.4 smic 50 euros 100 euros
1.4 smic à 2 smic 60 euros
2 smic à 2.16 smic 55 euros

Rappel des faits
La population réunionnaise comme celle des Antilles ou de France souffre de la cherté de la vie et de la baisse du pouvoir d’achat. Une quarantaine d’organisations syndicales, associatives et politiques se sont regroupées sur une plate-forme revendicative portée par le COSPAR. Diverses manifestations et rencontres ont eu lieu.
Le 5 mars dernier, des négociations sur une augmentation salariale ont débuté entre le Cospar d’une part, et le Medef, la CGPME et l’État, d’autre part. En filigrane, il y avait également la discussion sur la NAO (Négociation annuelle obligatoire).
Dès le départ, la position des membres du Cospar a été de dire qu’il fallait des propositions spécifiques à La Réunion. Le gouvernement a proposé l’accord « Bino » établi en fonction de la situation guadeloupéenne. Cet accord prévoyait une participation de l’État, de l’entreprise et des collectivités comme suit : 100 euros versés par l’État, 50 euros par les collectivités, 50 euros par l’entreprise.
Aussitôt le Cospar a exprimé sa position avec netteté : les collectivités n’avaient pas à participer au financement salarial des Entreprises privées. Restaient donc 100 euros de l’État et 50 euros des entreprises privées.
Tenant compte de la réalité de la situation des TPE-PME, le Cospar a proposé une modulation : participation plus importante des grandes entreprises et plus modeste des PME-TPE. À maintes reprises, cette position a été précisée par divers porte-paroles syndicaux membres du COSPAR.
Les propositions du Cospar ont été prises en tenant compte de la sortie du dispositif dans 3 ans d’ici. Le Cospar a donc eu une attitude responsable, ses propositions permettant un “atterrissage en douceur” au terme de la période fixée. Il est totalement incompréhensible que cette attitude aussi constructive se soit heurtée à une « fin de non-recevoir » gouvernementale. Pas la moindre volonté sincère de concertation ; c’était à prendre ou à laisser !
Puis, vinrent les États-généraux proposés par le gouvernement. Tous les acteurs étaient invités à se prononcer sur l’avenir… sans tabou. C’était l’occasion de faire la démonstration que paroles et actes pouvaient s’accorder.
L’État a-t-il influencé les entreprises qui aujourd’hui protestent ? Celles-ci ont-elles été bernées par le double langage de l’État ?
La seule solution juste, pour que personne ne soit perdant, résidait dans la modulation.
En ce qui le concerne, au sein du Cospar, le PCR a toujours milité en faveur de la recherche d’une position juste grâce à un dialogue sans tabou permettant de déboucher sur un consensus.
Rappelons-nous que, de son côté, le président de la Région n’a pas hésité à ouvrir les portes de la Région, un dimanche après-midi, afin de faciliter la discussion entre les membres du Cospar et les PME-TPE.
Mercredi, à la sortie de la réunion à la préfecture, les représentants des TPE-PME semblaient assurés d’avoir obtenu un report de la signature du texte gouvernemental. Le délai devait être mis à profit pour examiner des aménagements ou des mesures compensatrices.
Or, avant même toute démarche en concertation avec les syndicats ouvriers, l’accord de ces derniers étant indispensable, le gouvernement a tranché, démentant la préfecture et reniant ainsi sa propre parole.
Comment ne pas se rendre compte qu’en agissant de la sorte, le gouvernement indique que, pour lui, l’indispensable concertation entre tous les acteurs Réunionnais pour trouver, dans le respect mutuel, des solutions non imposées par Paris est tout à fait superflue. Il s’agit là d’une faute qui, malheureusement, ne présage rien de bon.

Sanjiv Dinama

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