Motion de l’Interprofession du BTP de La Réunion

« Le BTP réunionnais à l’agonie. Réagissons ! »

6 septembre 2017

Voici le texte de la motion présentée hier par l’Interprofession du BTP au Conseil départemental de La Réunion, à la Région Réunion et à l’État.

Le constat :

Depuis la crise de 2008, le BTP réunionnais a perdu 32 % de ses effectifs (actuellement
17 000 salariés), 50 % de ses entreprises employant au moins un salarié ont disparu et son CA est passé de 2.2 Mds d’euros à 1,2 milliards d’euros (- 45 %). Sur la même période, au niveau national, la branche n’a perdu « que » 16 % des emplois ; si on appliquait le chiffre de la destruction d’emploi de la Réunion à la France, il y aurait 200 000 chômeurs de plus ! Derrière ces chiffres, il y a des familles de salariés et de chefs d’entreprises dépités qui ont, parfois, tout perdu (110 liquidations judiciaires par an depuis 4 ans) !

Comment le gouvernement peut-il encore accepter à la Réunion une situation qui embraserait immédiatement tout le pays ?

La filière est dans l’angoisse, elle n’a plus de perspective, cette situation est intenable, elle n’est plus acceptable !

L’action :

C’est pourquoi, nous, organisations salariales et patronales de la filière du BTP, signataires de la présente motion, entendons agir pour que l’Etat et les collectivités locales prennent la mesure de la situation.

Nous avons donc décidé d’organiser une première mobilisation le mardi 5 septembre 2017 pour exprimer nos plus vives inquiétudes sur la situation économique et sociale du Bâtiment et des Travaux Publics à La Réunion.

Nous dénonçons les effets néfastes et désastreux de cette réalité économique dégradée qui engendre « une casse » de l’outil de production et la création massive de chômeurs supplémentaires.

Nous précisons qu’il est plus que jamais urgent de relancer, de manière pérenne, l’activité et l’emploi permettant ainsi de contribuer à une politique du logement et de rattrapage des besoins en équipements publics tout en luttant efficacement contre des pratiques commerciales déloyales.

Pour ce faire, nous formulons des propositions.

Les propositions :

1. Le Plan Logement Outre-Mer signé en 2015 doit être réellement mis en place car le constat est amer, alors qu’il prévoyait, entre autre, le lancement de 4 000 logements locatifs sociaux neufs et 1 000 réhabilitions par an pour la Réunion, ce ne sont que 800 logements qui ont démarré au 30 juin 2017 alors qu’un logement neuf construit crée 2,2 emplois dans le Bâtiment. Force est de constater que la parole de l’Etat n’a pas été respectée.

Avec 20 000 familles en attente d’un logement social, notre île est l’un des territoires de la République le plus touché par l’habitat insalubre et indigne.
La résorption de la misère n’est plus une option, c’est une obligation !

2. A côté du logement social, le logement locatif intermédiaire est un outil indispensable au parcours résidentiel des réunionnais ; aujourd’hui, il s’en construit à peine 500 par an alors que les besoins sont de 1 500 logements au minimum. L’Etat doit donc modifier substantiellement le dispositif PINEL en augmentant le différentiel entre le dispositif applicable en métropole et celui applicable en outre-mer pour inciter les contribuables réunionnais et de métropole à réinvestir sur notre île. Pour mémoire, à la fin des années 2000, c’est un milliard de fonds privés qui était injecté dans l’économie !

3. Les volets fiscal et social de la LODEOM ne peuvent pas s’arrêter abruptement le 31 décembre prochain, une prorogation au 31 décembre 2018 est vitale en attendant l’élaboration d’une nouvelle loi pour l’outre-mer.

4. Pour répondre au vieillissement de la population, le parc immobilier existant doit être adapté aux contraintes liées à la perte d’autonomie et un plan régional doit être lancé pour construire des logements accessibles à tous les seniors, y compris pour les plus défavorisés.

5. Quatre mesures techniques et financières essentielles :

- la rationalisation de l’utilisation du Fonds Régional d’Aménagement Foncier et Urbain (FRAFU) ;


- la création du plan régional de rénovation des équipements & logements anciens. (800 millions d’euros sur 10 ans annoncés en 2010) ;


- la sanctuarisation de tout dispositif local & national d’incitation financière contribuant à la rénovation énergétique des bâtiments ;


-  l’extension, à l’ensemble du territoire local, de l’aide portée par l’ANRU dans le cadre de travaux lourds de réhabilitation du parc social (valable aujourd’hui pour 6 quartiers uniquement). RAPPEL : 1 logement lourdement rénové = 3,3 emplois.


6. Les besoins en matière d’infrastructures restent très importants dans un département frappé durement par le chômage (taux de chômage de 22 % en 2017) et confronté à un retard de développement de 30 % vis-à-vis de la métropole (en 2015, l’investissement de l’état dans le secteur de la construction était de 2 522 euros /habitant en métropole contre 1 411 euros / habitant réunionnais).


Nous proposons donc le lancement d’un « plan Marshall » pour, premièrement, la construction d’équipements sportifs et culturels de proximité essentiels à la population mais également le soutien aux projets d’infrastructures de transport : monorail, ouvrages d’art sur les radiers du réseau départemental, téléphériques urbains et port en eaux profondes dans l’Est, afin de répondre aux besoins de fluidification et de sécurisation des déplacements des personnes et des biens.

7. Pour éviter les distorsions de concurrence, les conventions collectives doivent être respectées par toutes les entreprises de la branche. En outre, tenant compte de la situation catastrophique de l’emploi sur l’île, l’Etat doit mettre en place un moratoire interdisant l’embauche de travailleurs détachés (contrat et intérim) lorsque la compétence locale existe. 
Aussi, les contrôles administratifs sur les chantiers doivent être renforcés afin de lutter et dissuader l’embauche de personnes sous le statut d’auto-entrepreneur, lesquelles sont trop souvent recrutées en remplacement des encadrants de chantier en violation des règles de droit.


8. L’Etat doit garantir la pérennisation, par dérogation, du fonctionnement du badge local d’identification des salariés du BTP Réunion, adapté à la spécificité de notre territoire et dont le coût est nul pour les entreprises ; il faut pleinement l’étendre à toutes les entreprises affiliées à la convention collective du BTP.


9. L’Etat, les collectivités locales et les sept bailleurs sociaux doivent s’engager à respecter, enfin, la « charte pour la détection des offres anormalement basses » signée en 2012.


10. Le précédent gouvernement avait lancé un plan ambitieux de simplification administrative. Les avancées ont été bien trop timides puisque nos entreprises croulent sous la surabondance de textes et de normes ; leur inadaptation, leur superposition et leur contradiction sont un frein à l’activité. A cela s’ajoute la « culture du blocage » de plusieurs collectivités qui outrepassent leur droit et retardent ainsi de nombreux projets. Le Plan logement de 2015 avait prévu la mise en place d’un système incitatif aux maires bâtisseurs, il faut agir sans attendre afin d’encourager ceux qui veulent construire la Réunion de demain et sanctionner plus lourdement ceux qui ne respectent pas leurs obligations de production de logements.

Nous, acteurs de la filière construction à La Réunion avons besoin, dans cette période de mutation économique, de mesures fortes, pérennes, équitables et spécifiques.
L’activité du BTP doit reprendre impérativement dès le début de l’année 2018 ; sans réactivité des pouvoirs publics dans l’immédiat, nous prenons le risque de voir notre capacité de production disparaitre, de déséquilibrer notre modèle économique et social et de fragiliser davantage l’emploi salarié de notre filière.

Signataires : les Membres de l’Interpro-BTP : ADIR – CAPEB – CCP BTP (Caisse congés) – CECR (CSPS et OPC) – CFDT – CFE CGC – CFTC - CGTR – CONSTRUCTYS (Formation) – BUREAUX DE CONTROLE - CROAR (Architectes) – FAR (Architectes) – FO – FPIR (Promoteurs) - FRBTP – OBJECTIF PAYSAGE – SERR (Recyclage) – SORUN (Solaire) – SPIR (Isolations) - SYNTER (Bureaux d’études) – SYREF (Froid) - UHPR (Horticulteurs et Pépiniéristes) – UNEP (Paysagistes) – UNGE(Géomètres-Experts) – UNICEM (Carrières et Matériaux) - UNTEC OI (Economistes)

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Messages

  • Plussoie l’article !

    Où est Margie Demanche - Sudre , la dame installée par un préfet sur la fameuse commission de la commande publique ?

    Tout le pognon est concentré sur le chantier de la NRL , n’oublions pas que lors de la campagne des régionales de Décembre 2015 , l’actuel de la pyramide inversée savait du désordre économique qui allait se poindre et nous y sommes .

    Des coups de pied au fesse se perdent par ceux qui ont joué au pompier pyromane ...

  • cette situation est triste mais parfaitement normale sous la 5eme république parce c’est elle qui donne de l’engouement aux candidats aux élections et l’envie d’aller voter aux électeurs.


Témoignages - 80e année


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