Sept jours après le refus des propositions réunionnaises par le préfet

Le COSPAR présente son projet d’accord global au président de la République

7 avril 2009

Hier, sous la signature d’Ivan Hoareau et Jean-Pierre Rivière, le Collectif d’organisations syndicales, politiques et associatives de La Réunion a écrit au président de la République. Dans son courrier adressé à Nicolas Sarkozy, le COSPAR explique les avantages de la solution réunionnaise proposée pour les salaires, et fait part de ses regrets que ce projet de protocole d’accord n’ait pas été retenu par le préfet. Le COSPAR joint à son courrier le protocole d’accord intermédiaire présenté publiquement le samedi 28 mars, et soumis au préfet trois jours plus tard. Voici le texte du courrier adressé par le COSPAR à Nicolas Sarkozy

« Monsieur le Président de la République.

La Réunion est aujourd’hui confrontée à une triple crise sociétale, sociale et économique dont les causes sont mondiales, nationales et locales.
La crise interne est la résultante à la fois d’une situation structurelle se perpétuant depuis de nombreuses années, de la fin d’un certain nombre de grands travaux et de la crise mondiale qui nous frappe par ricochet.
Partageant une analyse commune de la situation et ayant la volonté par ses propositions de trouver des solutions réunionnaises à cette triple crise, le 5 février 2009 s’est constitué, à La Réunion, le Collectif des Organisations Syndicales, Politiques et des Associations Réunionnaises (COSPAR) regroupant 39 organisations.
Cette initiative a été confortée tant par votre déclaration devant les élus de l’Outre-mer le 19 février dernier que celle faite lors de la Convention pour la France concernant l’Outre-mer le 12 juillet 2006 (1).

Aussi, le COSPAR a-t-il entrepris un travail de réflexion qui a abouti dans un premier temps à une liste de revendications présentée à la presse le 2 mars. Puis cette liste a été approfondie et enrichie par ses différentes composantes.

Sur le dossier des salaires, la volonté des membres du COSPAR, en particulier des organisations syndicales, a été de trouver une solution propre à La Réunion, prenant en considération son tissu économique et mettant en avant la notion de solidarité interne tant des salariés eux-mêmes que des entreprises locales et ce, avec le souhait d’un accompagnement de l’Etat à enveloppe constante dans cette démarche.

Des négociations ont donc été engagées avec les organisations patronales sous l’égide de M. le préfet de La Réunion.

Lors de la première réunion, il a été proposé la prise en compte des éléments des protocoles d’accord réalisés en Guadeloupe et en Martinique. Cette proposition s’appuyait sur vos déclarations ainsi que celles de M. le secrétaire d’Etat à l’Outre-mer selon lesquelles ce qui avait été obtenu eu Guadeloupe devait s’étendre automatiquement aux autres DOM, notamment l’engagement de l’Etat concernant le RSTA.

Après La Réunion de différents groupes de travail et divers échanges de documents avec M. le Préfet de La Réunion, le COSPAR a réalisé une proposition de protocole d’accord global à laquelle étaient annexés trois documents dont un spécifique aux salaires s’intitulant “Principe d’un accord salarial réunionnais”. Ces différents documents ont été remis à monsieur le Préfet le samedi 28 mars 2009.

La philosophie de notre position en matière salariale

Le COSPAR a considéré qu’il n’était pas possible, notamment en matière de rémunérations, de transposer à l’identique ce qui s’était passé en Guadeloupe ou en Martinique, où les 200 euros d’augmentation de salaires obtenus se décomposaient de la manière suivante :

- 100 euros en provenance de l’Etat pour une durée de 36 mois,

- 50 euros en provenance des collectivités locales (25 euros du Département et 25 euros de la Région) pour une durée de douze mois ;

- 50 euros de la partie employeur (déchargée de toutes cotisations sociale - employeur et salariés à l’exception de la CSCI et la CRDS) pour une durée de 36 mois.

De plus, les accords obtenus laissent non seulement en suspens le dispositif de sortie mais aussi risquent fortement de ne pas être étendus à toutes les entreprises des territoires concernés.

Plusieurs raisons ont guidé noire choix, entre autres et pour les principales :

- Tenir compte du tissu des entreprises à La Réunion (93% des entreprises comptent moins de dix salariés et 88% moins de cinq) ;

- Tenir compte des impacts des crises (cf supra) sur les entreprises de La Réunion et donc sur l’emploi ;

- Tenir compte du fait que contrairement aux Antilles, les collectivités de La Réunion, à juste titre, ont annoncé qu’elles n’entendaient nullement contribuer à la rémunération de l’emploi du secteur privé ;

- Permettre une solidarité active à l’égard des jeunes de La Réunion les plus touchés par le chômage.

- Réfléchir à une sortie en salaire du dispositif triennal.

Afin de laisser le moins de monde possible “sur le bord de la route”, tout en prenant en compte la fragilité de nombreuses TPE notamment ; afin de pérenniser le dispositif au delà des trente six mois, nous avons envisagé une modularité affectant le RSTA et la participation de l’employeur. Ce qui pouvait permettre, selon notre projet :

- de proposer un accord portant sur 200 euros, ce montant étant atteint au bout de la troisième année et donc d’étaler la charge des entreprises ;

- de moduler le RSTA et la participation des entreprises selon des critères à définir (taille, secteurs d’activité, chiffre d’affaire,...), tout en gardant le même revenu aux salariés qu’ils relèvent d’une grosse ou petite entreprise ;

- enfin de dégager durant les trois années un fonds alimenté par la partie non utilisée du RSTA, ce fonds devant à notre sens, être affecté à faciliter l’embauche de jeunes réunionnais (touchés à plus de 50% par le chômage).

Cette proposition nous paraît plus juste, plus solidaire également, tout en nous permettant de « développer une solidarité qui ne se confonde pas avec de l’assistanat et qui soit au service de l’égalité des chances ». Elle permettait aussi d’aller dans le sens d’avoir des « mesures pour améliorer le pouvoir d’achat et l’emploi ».
Cette proposition semble avoir obtenu un écho favorable de la part des organisations d’employeurs, en tous les cas au vu de leur déclaration ce 31 mars à la préfecture.

Nous regrettons que cette proposition n’ait pas été retenue par M. le Préfet lors de cette réunion. Il nous eût semblé plus intéressant de l’analyser et de la soumettre à discussion entre les différents partenaires afin de l’améliorer, l’amender.

Cette solution n’aurait en rien entamé une décision d’ouvrir les Etats généraux de l’Outremer à La Réunion dans les jours ou semaines qui viennent. Nous sommes aujourd’hui en droit de nous interroger sur la pertinence de ces derniers, mais aussi de notre participation, ce d’autant plus que deux des thèmes retenus, qui nous semblent essentiels, portent sur :

- la rénovation du dialogue social et la formation professionnelle,

- la gouvernance (évolutions institutionnelles locales et adaptation des administrations centrales),

- le développement durable.

Aussi, et afin que nous puissions nous positionner, nous avons l’honneur de soumettre à votre haute attention notre proposition et en ce sens nous joignons à notre courrier :

1 - Le projet d’accord intermédiaire
2 - Les annexes à ce projet :

- Protocole d’accord sur la baisse des prix (projet)

- Protocole baisse des tarifs bancaires

- Principe d’un accord salarial réunionnais (projet)

Nous vous prions de croire, Monsieur le Président de la République, à l’assurance de notre
très respectueuse considération.

Pour le COSPAR

J. Pierre Rivière
Secrétaire général de l’UIR CFDT
Ivan Hoareau
Secrétaire Général de la CGTR »

(1) « La solidarité la plus élémentaire, non pas celle des mots mais celle des actes, justifie donc une approche en termes de discrimination positive territoriale. L’enjeu fondamental est de donner à ces économies une forme d’autonomie, une plus grandecapacité de développement par elles mêmes. Je ne crois pas à une accumulation de mesures aux objectifs multiples qui se traduiraient par une série d’aides publiques supplémentaires. Je crois, au contraire, qu’avec plus de 80 régimes d’aides publiques, il y a probablement un effort de rationalisation et de simplification à faire.
La solidarité ce n’est pas l’achat de la paix sociale à coup de transferts en tous genres. La solidarité c’est assurer les conditions fondamentales du développement humain pour que, de façon autonome et digne, un peuple puisse regarder son avenir en face, debout ! »

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