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Le mouvement social s’étend à Automobiles Réunion

Alors que commence le 9e jour de grève à la CILAM

jeudi 6 juin 2013, par Manuel Marchal


Après la STAR, Carrefour, SERMAT et CILAM, ce sont les travailleurs d’Automobiles Réunion qui ont lancé une grève hier. Tout comme à la CILAM, c’est la conséquence de l’échec de la négociation annuelle des salaires. Les travailleurs demandent une augmentation de 35 euros.


9e jour de grève aujourd’hui à la CILAM. Ce conflit témoigne de l’évolution des rapports sociaux : le patronat reste sur sa position le plus longtemps possible, quitte à mettre d’autres entreprises en difficulté.
(photo Toniox)

Le mouvement social s’amplifie à La Réunion. Ces dernières semaines, notre île a connu plusieurs mouvements. À la STAR et à Carrefour Sainte-Suzanne, les travailleurs demandaient une hausse des salaires. Il a fallu de longs conflits, près de trois semaines à Sainte-Suzanne, pour arracher des avancées.

À la SERMAT, c’était une bataille pour l’emploi et la dignité des Réunionnais. Elle a donné lieu à 19 jours de grève. Les travailleurs ont pu obtenir le renoncement aux 19 licenciements, ainsi que la mise en œuvre d’un comité de suivi chargé de faire la transparence sur les flux financiers au sein des sociétés gravitant autour de la SERMAT.

À la CILAM, c’est l’échec des négociations annuelles obligatoires sur les salaires. Depuis 9 jours, les travailleurs sont dans la grève. Ils demandent 50 euros d’augmentation, une prime exceptionnelle de 600 euros et 4 tickets restaurants. La direction propose 15 euros pour les bas salaires et une prime de 420 euros.

À Automobiles Réunion, le distributeur de Renault, c’est là aussi l’échec du dialogue social qui tourne au conflit. Depuis hier, les salariés ont décidé de cesser le travail pour faire aboutir leurs revendications, dont une augmentation de 35 euros par mois.

Les grèves durent

Dans ces conflits, la défense du pouvoir d’achat est une revendication convergente. Selon les derniers chiffres de l’INSEE, l’indice des prix a connu une hausse de plus de 2%. Autrement dit, toute augmentation inférieure à 2% constitue une perte de pouvoir d’achat pour le salarié. C’est un drame dans un pays où l’État reconnaît que les prix sont 53% plus élevés qu’en France, puisqu’il verse à ses agents titulaires un complément de salaire égal à 53% du traitement perçu en France pour le même poste.

C’est dans ce moment de tension extrême qu’est annoncée la fin du RSTA. Ce revenu supplémentaire est une aide de l’État pour faire face à la vie trop chère. Le RSTA est en effet un complément de 100 euros par mois, versé à partir de 2009 à tous ceux qui ont un salaire inférieur à 1,4 SMIC.

Cette baisse de salaire de 100 euros est imposée à des dizaines de milliers de travailleurs. Elle ramène 4 ans en arrière, avant les grandes manifestations du COSPAR et de la population. Depuis 4 ans, la situation s’est aggravée. C’est ce que confirme la succession des grèves dans notre pays. La nature du conflit a maintenant évolué. Les grèves durent, car le patronat ne veut pas lâcher. Il mise manifestement sur le pourrissement du conflit. Ce qui s’est passé à la SERMAT, et ce qui a lieu à la CILAM sont des exemples révélateurs.

Dans les deux cas, le prolongement de la grève à des conséquences sur d’autres entreprises. Au port, la tentative de division des travailleurs a échoué. Les transporteurs ont montré leur solidarité avec les dockers. Les appels se sont concentrés sur la nécessité de négocier, pas sur celle de faire dégager le piquet de grève. Cerné de toutes parts, le patronat a dû céder.

À la CILAM, là aussi la direction tente de faire déguerpir les grévistes. Elle a essayé la voie judiciaire, sans succès. Elle a vu arriver les producteurs de lait devant le campement des grévistes. Mais les travailleurs n’ont pas cédé. Et comme pour le conflit à la SERMAT, les prises de position ne visent pas l’action des grévistes, mais demandent d’aller au plus vite vers une solution négociée.

L’accélération des événements

Le gouvernement, par la voie de son ministre Lurel, a dit qu’il revient aux entreprises de compenser la perte de 100 euros provoquée par la fin du RSTA. Si Paris ne revient pas sur décision de ne pas prolonger ce dispositif, alors La Réunion n’est qu’au début d’un embrasement généralisé. Qui peut croire en effet que les travailleurs vont se laisser dépouiller de 100 euros sans réagir ? Manifestement, ceux qui tentent d’accentuer les divisions dans la société réunionnaise portent une lourde responsabilité dans l’aggravation de la crise actuelle.

C’est pourquoi il est urgent que le gouvernement remette en place le RSTA. Cette mesure ralentira la progression de la crise. Elle permettra d’obtenir un délai pour tenter de lancer la concertation entre Réunionnais.

Car ces manifestations illustrent bien un système en train de prendre l’eau de toute part. Cela fait bien longtemps que les salaires ne suivent plus pour ceux qui ont un travail. Quant à ceux qui n’en ont pas, ils sont chaque jour plus nombreux.

Comment sortir le pays de cette impasse ? Plus nous tardons à discuter et à nous entendre autour d’un projet, plus il sera difficile de redresser la situation. Les événements sont en train de s’accélérer.

M.M.


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