Loi-programme pour l’Outre-mer

Le point de vue de la CGTR sur la LOPOM

23 avril 2008

A propos du projet de loi-programme pour le développement économique et la promotion de l’excellence, la CGTR tient à faire les observations suivantes.

Les syndicats ont été totalement écartés de la concertation qui s’est essentiellement faite avec les milieux patronaux et notamment à partir d’un projet dont la cheville ouvrière est la FEDOM (Fédération des Employeurs des DOM).

L’offre patronale portée par “La Réunion Economique” (MEDEF, CGPME et différentes structures patronales) est le projet “La Réunion île verte”.
Selon le président du MEDEF, c’est censé être une réponse à la préoccupation des syndicats en matière d’emploi.

Et “La Réunion Economique” annonce, bravache, que “La Réunion île verte” permettrait de réduire de 10% le taux de chômage à raison de 1% par an. Il s’agit là, avant tout, d’une entreprise de communication.

En fait, “La Réunion Economique” s’est “emparée” de certains des domaines d’activités stratégiques (DAS) définis préalablement par différents acteurs de la vie sociale et économique (et qui recueille l’approbation de la CGTR). Elle a clairement compris l’opportunité d’être présente sur ces secteurs porteurs et rentables tout en se parant des vertus de champion de l’environnement.

Le projet de loi-programme est bâti sur une approche strictement économique, et de ce fait, la problématique du Social est carrément oubliée ou renvoyée aux calendes grecques.

Les entreprises ont une responsabilité sociale au regard de leur territoire. Quelles sont les contreparties (vrais emplois, salaires, application des CCN ou de branches, structuration des branches et du tissu économique) exigées des entreprises au regard des aides supportées par les contribuables ?

Si l’idée de lier l’aide fiscale à une politique plus forte de formation professionnelle nous agrée dans son principe, la CGTR reste dubitative quant à sa mise en œuvre, notamment au vu du tissu de micro-entreprises de La Réunion.

Globalement, sur cette question de “l’entreprise citoyenne”, le compte n’y est pas, loin de là.
Ce projet de loi doit se placer dans une réflexion plus large qui est celle du devenir de notre société réunionnaise.
Il est, aussi, indispensable à nos yeux que ce projet s’articule avec les échéances majeures que sont les APE, les réformes OCM-Sucre, Octroi de mer et de la politique régionale européenne.

Ce projet de loi renvoie pour sa mise en œuvre à des discussions avec l’Union européenne et les collectivités locales qui, elles, risquent une fois de plus de subir l’insuffisante compensation financière de l’Etat pour perte de recettes fiscales locales.

Le retard de La Réunion en matière d’équipements publics de base (assainissement par exemple) donne, toujours, toute sa pertinence à la notion de “rattrapage”. Et l’inquiétude, très partagée à La Réunion, quant au financement de ces dispositions ne tombe pas du ciel.
« La rationalisation des moyens » évoquée moult fois ne doit pas cacher la mise en œuvre du principe de « neutralité budgétaire », ni, pire, la volonté de prendre dans la poche des Réunionnais et notamment salariés.

Et le seul affichage des domaines prioritaires ne peut donner matière à satisfaction béate si les finances manquent. Ainsi, l’intégration souhaitable de l’agro-nutrition, à financement constant, se fera au détriment d’autres priorités.
La CGTR souligne que les politiques d’exonération de cotisations sociales et fiscales appliquées depuis longtemps n’ont pas porté leurs fruits au regard notamment de l’emploi durable. Une partie importante de ses laudateurs rabat, depuis, ses prétentions en parlant simplement de « maintien de l’emploi ».

Concomitamment, elle a attiré l’attention sur les nombreux effets pervers de ces instruments : écrasement des salaires, atomisation du tissu économique, processus de déqualification...
Compte tenu du transfert de la charge financière de l’entreprise vers le contribuable inféré de telle politique de baisse du coût du travail, de l’évolution vertigineuse du montant de ces aides et du coût croissant pour les collectivités publiques, pour le moins, une évaluation claire et transparente s’impose.

La sélectivité des aides, à partir de critères d’éligibilité fiables pour remplir des objectifs clairement et préalablement définis, est essentielle.

Et la notion de secteurs prioritaires ne répond qu’imparfaitement à cette exigence d’efficience.
L’octroi "tout azimut" de ces exonérations ne témoigne pas d’une stratégie de développement, mais plus d’une réponse à une demande pressante du patronat dans son ensemble, quel que soit par ailleurs le rattachement ou non à des sociétés transnationales des entreprises bénéficiaires.

La problématique du service public et de la Fonction Publique n’est pas abordée dans ce texte.
Compte tenu de la situation sociale à La Réunion, cette exigence d’un Service Public plus fort et de qualité est impérieuse, si l’on ne veut pas aggraver les inégalités sociales et donc, à terme, peser sur toute tentative de développement.

Par ailleurs, le CGTR regrette la suppression du congé de solidarité qui, amélioré, aurait pu permettre à 7.000 jeunes de trouver un emploi et à 7.000 travailleurs usés de prendre une bonne et légitime retraite.


La CGTR
Ivan Hoareau

LODEOM - Loi d’orientation pour le développement de l’Outre-mer

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