L’UMP demande la fin de la durée légale du travail : fin des 35 heures ?

Le risque de l’application mécanique d’une mesure inadaptée

20 mai 2008, par Manuel Marchal

Le secrétaire général de l’UMP propose de délégaliser la durée du temps de travail. Cette mesure est-elle adaptée au contexte réunionnais où la priorité est la lutte contre la pénurie d’emploi ?

Une dépêche diffusée hier annonce que l’UMP souhaite que la durée du temps de travail échappe au champ de la loi. Ce qui amène à s’interroger la pérennité des 35 heures d’une part, et confirme la volonté de réformer rapidement la France de la part du parti majoritaire à l’Assemblée d’autre part.
En effet, le secrétaire général de l’UMP annonce que son parti « demande avec force le démantèlement définitif des 35 heures, et que la durée du travail soit contractuelle, entreprise par entreprise », a déclaré le secrétaire général du parti majoritaire, Patrick Devedjian, lors d’un point de presse. « Ce que nous voulons, c’est que la durée du travail soit fixé entreprise par entreprise par la négociation sociale », a-t-il ajouté.
A la question « Est-ce la fin de la durée légale du travail ? », Patrick Devedjian a répondu : « Oui (...) Ça cessera d’être un système national ».

Retour aux 39 heures ?

Derrière cette annonce apparaissent des menaces pour les créations d’emploi. En effet, l’orientation libérale du gouvernement préconise le "travailler plus pour gagner plus" avec une défiscalisation des heures supplémentaires.
Certains pourraient alors être tentés de profiter de cette délégalisation des 35 heures pour allonger la durée du temps de travail. Or, dans un contexte de pénurie d’emploi, l’allongement de la durée du travail ne va pas dans le sens de la création de nouveaux emplois.
Dans l’hypothèse d’une hausse de l’activité, le retour aux 39 heures par le biais de la défiscalisation serait alors privilégié plutôt que l’embauche de nouveaux salariés.
Autre remarque : cette proposition ne va-t-elle pas dans le sens d’une délégalisation totale du droit du travail, et dans quel objectif ?
Dans le contexte actuel, le législateur peut-il en effet abandonner totalement aux partenaires sociaux des questions aussi importantes que la durée du temps de travail ou la fixation d’un salaire minimum ?

Plus de 20.000 entreprises pour 800.000 habitants

Car on ne peut pas dire que le dialogue social soit suffisamment transparent pour permettre un partage équitable des richesses créées par le travail, ainsi que les gains de productivité. Il suffit de se référer aux récentes et dures grèves qui ont émaillé l’actualité sociale de ces derniers mois à La Réunion.
Délégaliser le droit du travail, cela veut dire le faire dépendre du résultat du rapport de force entre les travailleurs et leurs patrons. Mais dans un pays touché par plus de 30% de chômage, les conditions de la lutte sont encore plus difficiles pour les travailleurs.
Enfin, il est à noter qu’une des spécificités de La Réunion est que son tissu économique est composé de TPE : 84% des entreprises ont moins de 10 salariés, et seulement 2% dépassent 50 salariés. Au total, notre île compte 20.100 entreprises selon le dernier rapport de l’ASSEDIC-Réunion. Si la proposition de l’UMP se concrétise, comment pourra-t-on gérer 20.100 durées différentes de temps de travail dans un pays de 800.000 habitants ?
Cette nouvelle proposition d’un état-major parisien vise à apporter une solution ultra-libérale à un problème français. Mais appliquée à La Réunion, quelle sera sa conséquence ? Ce qui amène à se mobiliser pour proposer des solutions réunionnaises, adaptées au contexte réunionnais, pour sortir La Réunion de la crise structurelle et relever les grands défis de demain.

Manuel Marchal

Luttes pour l’emploi

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