L’envolée des prix des matières premières

Les Réunionnais encore condamnés à payer ?

4 mars 2011, par Manuel Marchal

Aux facteurs structurels de l’augmentation des prix s’ajoutent désormais les conséquences de l’instabilité politique dans les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Dans l’état actuel des choses, toutes les conditions sont réunies pour faire payer encore plus les Réunionnais. Jusqu’à quand durera cette injustice ?

Un baril de pétrole à 200 dollars, c’est l’éventualité soulevée par le Premier ministre de la Russie. Selon Vladimir Poutine, c’est une conséquence des changements qui sont en train de se produire dans les pays d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient. Le pétrole n’est pas la seule matière première à connaître une forte augmentation. C’est également le cas du textile. L’an dernier, le coton avait augmenté de 140%, cela continue car depuis le début de l’année, le prix a encore cru de 25%.
Tout cela a des répercussions. En France, les distributeurs sont obligés de négocier officiellement avec leur fournisseur les tarifs des produits alimentaires, c’est la loi. Cette période s’achève le 1er mars tous les ans. Jusqu’à présent, ces négociations avaient permis de faire des ajustements à la baisse. Cela ne sera pas le cas cette année. La hausse minimale prévue sera de 2%, et elle a l’accord du gouvernement.
En France, les dispositifs sont beaucoup plus protecteurs qu’à La Réunion. Il existe notamment un Observatoire des marges. Il référence plus de 10.000 produits.

Une structure qui favorise la vie chère

Cela signifie que dans notre île, il faut s’attendre à de plus fortes hausses encore, et cela à cause de la structure de notre économie. Les données sont connues. La Réunion s’approvisionne majoritairement en Europe, là où les prix sont les plus chers. À cela s’ajoute le coût du transport de la marchandise, de son importation et de sa distribution par des monopoles, le tout dans l’opacité la plus totale.
À plusieurs reprises, des organismes officiels ont pointé les abus que permet cette structure. L’Autorité de la concurrence a ainsi démontré que les compagnies pétrolières bénéficient dans notre île de rentes de situation. L’Autorité a aussi sérieusement épinglé les pratiques de la grande distribution. À cela s’ajoutent les études réalisées par des associations, telles que Agir pou nout tout ou UFC Que Choisir. Toutes concluent à un surcoût de 50% au moins par rapport à la France.
C’est à des prix 50% plus chers que vont s’appliquer les répercussions de la hausse des prix des matières premières, tant que se maintiendra la structure que nous connaissons.

Où est la solidarité ?

Il est clair que les acteurs de l’importation et de la distribution ont réussi à se construire des profits considérables grâce à cette structure. Dans les carburants par exemple, l’Autorité de la concurrence soulignait une hausse de 77% de la marge des compagnies pétrolières entre 2001 et 2009, c’est bien plus que l’inflation ou que les revenus des travailleurs.
Dans cette période de pression sur les prix des matières premières, ceux qui ont fait des profits record ne veulent rien céder, et c’est aux Réunionnais de payer. C’est par exemple ce qui se passe lors de chaque revalorisation du prix des carburants. Ce ne sont pas les taxes qui augmentent, mais le prix de la matière première. Ce qui signifie que la marge ne diminue pas.
Alors pour éviter la catastrophe, c’est maintenant qu’il est nécessaire d’imposer une structure plus juste. Car ce n’est pas aux Réunionnais de toujours être les seuls à payer les conséquences des soubresauts de l’économie mondiale, c’est au contraire la solidarité entre les acteurs et le consommateur qui doit primer dans la période de crise que nous vivons. Ainsi pourrons-nous sortir de ce moment difficile par le haut, en renforçant notre cohésion.

Manuel Marchal

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