Lecture définitive du projet de loi aujourd’hui à l’Assemblée nationale

Loi Travail : la casse sociale inscrite dans la loi

20 juillet 2016, par Manuel Marchal

C’est aujourd’hui que doit se conclure la procédure parlementaire relative à la loi Travail. Les députés sont en effet réunis pour la lecture définitive du projet de de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels. Ce texte prévoit de ramener les droits des travailleurs plusieurs décennies en arrière en affaiblissant les syndicats, en facilitant les licenciements et en diminuant la protection face aux procédures patronales abusives.

12 journées d’action et un mouvement de protestation qui dure depuis 4 mois n’ont pas influé sur le gouvernement.

Au lendemain du vote de la prolongation de l’état d’urgence, les députés devront se prononcer aujourd’hui sur le projet définitif de loi relatif au travail, à la modernisation du dialogue social et à la sécurisation des parcours professionnels ou loi travail. Les sénateurs ont en effet rapidement épuisé le débat hier en votant majoritairement contre le texte sans en discuter. La majorité de droite estime en effet que ses modifications n’ont pas été prises en compte.

Lors des deux précédents passages à l’Assemblée nationale, le 10 mai et le 5 juillet, le projet de loi El Khomri a été adopté sans vote en utilisant l’article 49-3 de la Constitution. Cette méthode rend l’adoption définitive à condition qu’une motion de censure visant le gouvernement n’ait pas été votée majoritairement dans les 48 heures. Lors du premier passage, les députés de droite et les communistes avaient voté pour un texte qui n’a pas réuni la majorité. Lors de la seconde lecture, le gouvernement avait employé la même méthode, cette fois aucune motion de censure n’avait été déposée. Pour la lecture définitive, le gouvernement n’hésitera pas à employer de nouveau l’article 49-3 pour passer en force, car il peut compter sur une majorité de députés pour refuser de voter une motion de censure.

Quatre mois de protestations

Ce projet de loi modifie le Code du Travail. Les propositions qu’il contient sont à l’origine d’un grand mouvement social qui a commencé voici quatre mois, et qui a été marqué par 12 journées d’action. Les organisations syndicales de salariés et de jeunesse considèrent que les mesures prévues marquent un recul important. Le gouvernement fait en effet d’importantes concessions au patronat avec l’inscription dans la loi de l’affaiblissement des syndicats.

Le projet prévoit tout d’abord de remettre en cause l’efficacité des conventions collectives, issues de la négociation entre les syndicats et le patronat. C’est l’inversion de la hiérarchie des normes. L’accord d’entreprise va primer, même s’il est plus défavorable pour le salarié que l’accord de branche et le Code du Travail. Cela rend par exemple possible des mesures telles que travailler 12 heures par jour, 48 heures par semaine et avec des heures supplémentaires payées à 10 % de plus au lieu de 25 %.

Actuellement, la loi prévoit une série de verrous pour éviter au maximum une confrontation directe entre un patron et ses salariés. C’est pour cela qu’il existe des délégués syndicaux, élus lors des élections professionnelles par les salariés. Ces délégués ont donc le mandat de discuter des conditions de travail avec l’employeur. La loi qui doit être examinée aujourd’hui à l’Assemblée nationale permet de contourner les représentants du personnel membres du syndicat majoritaire, par le biais d’un référendum qui met directement en confrontation le patron et ses employés.

Mobilisation à La Réunion

Outre l’affaiblissement des syndicats, le projet de loi Travail facilite les licenciements. Dans les entreprises de moins de 11 salariés, un licenciement économique pourra avoir lieu en prétextant une baisse du chiffre d’affaires pendant un trimestre. Cette mesure concerne plus de 90 % des entreprises à La Réunion. Par ailleurs, les dispositions autorisant le licenciement d’un travailleur qui refuse de voir son salaire diminuer sont renforcées. L’application d’une telle loi à La Réunion est très inquiétante, car notre île détient déjà le record du chômage.

C’est pourquoi le mouvement de protestation a mobilisé également les jeunes et les travailleurs réunionnais. Il a été soutenu dès le début par le PCR, présent dans toutes les manifestations.

Le mouvement continuera

Pour les syndicats, l’adoption du projet de loi ne signifiera pas l’abandon de la mobilisation. Ils rappellent en effet qu’il y a 10 ans, un gouvernement de droite avait voulu imposer le contrat première embauche (CPE). Ce texte prévoyait d’allonger considérablement la période d’essai, ce qui permettait d’augmenter d’autant le délai pendant lequel un patron pouvait licencier un travailleur sans motif. Le CPE avait été adopté définitivement par l’Assemblée nationale, à la suite de l’utilisation de l’article 49-3. Mais devant la poursuite de la mobilisation, le gouvernement avait alors refusé d’appliquer le texte.

Cette fois, c’est un gouvernement de gauche qui est au pouvoir. Il veut imposer un texte qui ramène les droits des travailleurs plusieurs décennies en arrière. Ira-t-il plus loin que la droite en le maintenant à tout prix ?

M.M.

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