Grève au Trésor public

Moyens en baisse face à la fraude fiscale

3 mai 2018, par Manuel Marchal

Le gouvernement veut appliquer de nouvelles sanctions pour les chômeurs. C’est pour lui une manière de faire croire que les travailleurs privés d’emploi sont des fraudeurs. Or comme le rappelle le dernier bilan du CODAF publié hier, la plus grande fraude vient de ceux qui refusent de payer l’impôt sur le revenu et celui sur la grande fortune. Mais le gouvernement a décidé de réduire les moyens pour traquer ces fraudeurs. L’appel à la grève au Trésor public est un acte de résistance contre cette politique.

Travailleurs du Trésor public protestant contre la dégradation des conditions de travail dans ce service public.

Ce matin, un appel à la grève est lancé au Trésor public. C’est une nouvelle mobilisation contre la politique du gouvernement. Ce dernier a lancé une grande offensive contre le secteur public, avec notamment la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires. Ces restrictions touchent notamment le Trésor public. Ses agents sont notamment chargés de collecter l’impôt sur le revenu. C’est la taxe la plus juste, car elle est progressive. Plus une famille a de l’argent, plus le taux d’imposition augmente. Compte tenu de l’état de pauvreté à La Réunion, 33 % des foyers payaient cet impôt en 2014, selon l’INSEE. Ce sont donc les familles les plus aisées qui versent cette contribution à l’État. C’est une contrepartie aux services de l’État, qui permettent notamment aux plus riches de le rester sans crainte de voir leur patrimoine remis en cause. Malgré tout, cela ne suffit pas, et certains de ces contribuables sont tentés par la fraude. Ils ne déclarent pas tous leurs revenus afin de diminuer leur dette envers l’État.

Seulement 293 contrôles

Le seul moyen de détecter cette fraude, c’est le travail des agents du Trésor public. Leur nombre est en constante diminution, ainsi que les moyens mis à leur disposition. À La Réunion en 2017, ils n’ont pu faire que 293 contrôles. Cela a malgré tout permis de récupérer 30 millions d’euros, auxquels s’ajoutent 11 millions d’euros de pénalités.

Le bilan 2017 du Comité opérationnel départemental anti-fraude (CODAF) évoque également la fraude aux prestations sociales. Les fausses données pour percevoir la CMU-C ont donné lieu à 42.000 euros de pénalité infligés par la Sécurité sociale dans 56 cas, soit une moyenne de 800 euros par fraude. Les déclarations erronées ayant eu pour effet la perception d’une prestation familiale ou le RSA ont coûté 6,5 millions d’euros l’an dernier (en baisse de 25 %) pour un préjudice moyen de 6.300 euros par dossier. C’est bien loin des sommets atteints par la fraude fiscale.

Les victimes ciblées

Et pourtant, ce ne sont pas les fraudeurs en col blanc que le gouvernement a décidé de cibler, mais les victimes d’un système qui leur refuse un droit inscrit dans la Constitution : le droit à un travail.

À La Réunion, le chômage augmente. Plus de 180.000 Réunionnais sont inscrits à Pôle emploi. La logique voudrait que les moyens augmentent pour permettre à ces travailleurs de retourner dans la vie active. Mais ce n’est pas celle du gouvernement qui veut mettre l’accent sur le contrôle des chômeurs. Ceci diminuera encore le temps consacré par les agents du service public de l’emploi à leur tâche prioritaire. Cela aura sans doute pour conséquence une hausse des radiations. La dernière Enquête emploi de l’INSEE a noté qu’en 2017, le « halo » du chômage a augmenté. Ceci comprend les travailleurs au chômage qui sont tellement découragés qu’ils ne s’inscrivent plus à Pôle emploi. Ils sont chômeurs, mais n’apparaissent plus dans les statistiques. C’est le révélateur d’une politique qui privilégie la classe sociale dont est issue le pouvoir en place en France en ciblant les autres classes par la baisse des moyens que l’État leur consacre.

Moins d’impôts à payer pour les riches

Pour en revenir à la fiscalité, les premières mesures du gouvernement dans ce domaine ont été des cadeaux aux plus riches. La suppression de l’impôt sur les grandes fortunes par une taxe limitée au patrimoine immobilier permettra aux plus riches d’économiser 3 milliards d’euros. À cela s’ajoute une baisse du taux d’imposition sur l’argent gagné en dormant car les bénéfices du capital ne seront plus taxés qu’à 30 % au maximum, soit un taux bien inférieur au maximum pour les revenus issus du travail.

Ainsi, la baisse des moyens accordés aux services fiscaux s’accompagne d’une diminution de la contribution demandée aux plus riches. Elle entraînera mécaniquement une baisse des contrôles visant les contribuables les plus riches qui veulent se soustraire à l’impôt.
Ceci est un autre révélateur de la politique du gouvernement, au service d’une classe qui veut garder sa position dominante. La casse du service public correspond à cette idéologie car il contribue à corriger les inégalités liées à la naissance.

Dans ce sens, la mobilisation des agents du Trésor public est un acte de résistance contre un gouvernement qui favorise le retour à une époque archaïque, quand les conquêtes sociales n’étaient pas là pour faire rempart aux inégalités.

M.M.

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