Grève à Bois-Rouge et au Gol

Négociations marathon pour sortir de la crise

27 novembre 2004

Premier épisode d’une longue journée : la direction du Gol retirait son assignation à comparaître concernant 25 grévistes qui ont fait le déplacement pour rien au tribunal de Saint-Pierre. Seconde épisode : négociations sous les auspices de l’administration. Commencées à 14h30, les discussions se poursuivaient encore hier soir à l’heure où nous mettions sous presse.

(Page 5)

Tout ça pour ça ! En moins de temps qu’il n’en faut pour trouver une place pour se garer aux abords du tribunal de Saint-Pierre, l’affaire était réglée. Après la litanie des noms de grévistes appelés à comparaître, le président Liénard expliquait que la direction de la centrale du Gol retirait son assignation et donc, la justice n’avait plus à statuer dans cette affaire.
"C’est du n’importe quoi ! C’est de la propagande ! On mobilise la justice et puis on se retire", ironisait l’avocat d’un des grévistes assignés. Selon une formule chiraquienne, ça fait “psschhiittt”.
Explication : tôt le matin, dans un communiqué, la direction de la centrale du Gol expliquait qu’elle retirait sa plainte contre les grévistes qu’elle assignait en justice pour "occupation illégale d’un site protégé" et ce, stipulait le communiqué, "dans un souci d’apaisement".

Un goût d’inachevé

Chez les grévistes présents en nombre devant le tribunal de Saint-Pierre, l’heure n’était manifestement pas à l’apaisement. "On parlera d’apaisement quand la direction aura retiré sa plainte pour vol contre nos deux camarades responsables syndicaux !"
Pour Patrick Hoarau, secrétaire général de la CGTR-EDF, dans la mesure où deux responsables de la CGTR du Gol sont toujours sous le coup d’une plainte, c’est une épée de Damoclès qui est suspendue sur la tête des grévistes.
Comment négocier sereinement dans ces conditions ? Ce retrait de la direction laisse comme un goût d’inachevé chez les grévistes qui auraient aimé pouvoir s’expliquer devant la justice et faire valoir certains arguments.
Patrick Hoarau s’explique : "Jeudi, à 11 heures, nous avons fait procéder à un constat d’huissier sur le site pour que soit acté le fait que le personnel réquisitionné était affecté non pas sur des tâches prioritaires, mais sur des tâches courantes". Rappelons que la réquisition effectuée par le préfet court jusqu’à ce soir...
Pour Max Banon, qui s’exprimait au nom de la CGTR, ce conflit et la tournure prise ces derniers jours confinent à une "remise en cause du droit de grève avec ces réquisitions. Une clarification s’impose sur ce type d’intervention dans ce qui reste un conflit d’ordre privé, alors que l’on met en avant une notion de service public".

Pourquoi deux jours sans négociations ?

Pour Max Banon, au lieu d’en arriver à de telles extrémités, il serait plus judicieux d’agir "de manière intelligente en amont". En clair, privilégier la discussion au maximum de manière à éviter les conflits. Rappelons que dans cette affaire, il s’agit du non-respect d’un protocole signé le 20 septembre dernier qui a mis le feu aux poudres.
Pourtant, à plusieurs reprises, les responsables de la CGTR-EDF avaient tiré le signal d’alarme en informant le préfet, la DRIRE, la direction du Travail et bien entendu, la direction. Depuis plusieurs semaines, alors que chacun savait pertinemment qu’un conflit risquait d’éclater, personne n’a jugé utile de renouer le fil du dialogue.
De plus, font remarquer les grévistes, la réquisition du préfet a pris effet mercredi. À partir du moment où la production d’électricité était assurée, que la sucrerie du Gol était approvisionnée en vapeur, les conditions semblaient réunies pour qu’intervienne la médiation évoquée par le préfet. Pourquoi avoir laissé passer les journées de mercredi et jeudi sans relancer les négociations ?
Après le vrai-faux rendez-vous du matin au tribunal de Saint-Pierre, le deuxième acte allait se jouer à Saint-Denis, dans les locaux de la direction départementale du Travail, avec cette fois la présence d’un représentant de la DRIRE et de Serge Leroy, directeur départemental du Travail qui retrouvait là un dossier qu’il connaît bien, puisque le protocole du 20 septembre avait été signé en sa présence.
Commencées hier à 14 h 30, les négociations s’annonçaient longues et difficiles. Ce fut le cas. Hier soir, les discussions se poursuivaient encore à 22 heures, entre les représentants de la CGTR et les directions du Gol et de Bois-Rouge, rejoints par M. Jaen, de la direction nationale, qui avait également assisté aux discussions du 20 septembre.

La prime est applicable... mais pas obligatoire !

Dans la cour de la direction départementale du Travail, une trentaine de grévistes du Gol et de Bois-Rouge tuaient le temps, rappelant leur détermination.
De cette séance marathon, il ressort que les directions de Bois-Rouge et du Gol reconnaissent que la fameuse prime pour travaux pénibles et salissants est bien applicable. Ce qui n’est pas une nouveauté en soi, puisque cela avait déjà été acté dans le protocole du 20 septembre dernier.
Sauf qu’après avoir soutenu le contraire, puis avoir annoncé qu’elle acceptait cette prime pour "une minorité du personnel", elle reconnaît l’applicabilité de cette prime non plus pour quelques salariés, mais pour l’ensemble du personnel.
Avec un bémol toutefois : si elle reconnaît que la prime est applicable, elle soutient cette fois qu’il ne s’agit nullement d’une obligation... Sauf dans le cadre d’un accord d’entreprise. De son côté, la CGTR prenait acte de ce nouveau positionnement et demandait la rétroactivité de cette prime à compter de janvier 2002, étant entendu que l’acompte de 1.800 euros, versés sur la paie de septembre, suite au protocole signé le 20 du même mois, ne saurait être remboursable...
Concernant la notion de “service minimum” dont la direction souhaitait faire un préalable, elle constitue toujours un point de blocage. À défaut d’un accord entre les deux parties, il était proposé la mise en place d’un groupe de travail sur cette question.
Autre point abordé au cours de cette réunion de conciliation : le paiement des jours de grève qui constituait également un point d’achoppement. Message des grévistes à Patrick Hoarau, venu les tenir informés au cours d’une brève interruption de séance : "larg’ pa !"

S. D.


Signaler un contenu

Un message, un commentaire ?


Témoignages - 80e année


+ Lus