Présentation des ordonnances du Plan d’urgence du gouvernement

Nouvelle embauche égale précarité prolongée

2 août 2005

Parmi les ordonnances présentées aujourd’hui en Conseil des ministres dans le cadre du Plan d’urgence pour l’emploi, le contrat “nouvelles embauches” pourrait créer des milliers d’emplois selon le gouvernement. Si cette prévision se vérifie un jour, reste à savoir quels emplois et pour quelles perspectives pour le “bénéficiaire” de la mesure ? Car si un travailleur est salarié sous contrat “nouvelles embauches”, cela reste du précaire pour les bailleurs, les banquiers et les assureurs. D’où des difficultés qui persistent pour se loger ou emprunter.

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Hier s’est tenu à Matignon un séminaire gouvernemental. Parmi les questions à l’ordre du jour, "faire le point de la mobilisation de tout le Gouvernement dans la bataille pour l’emploi et pour la préparation de la rentrée", c’est-à-dire en septembre.
"À la veille de la présentation des six ordonnances en Conseil des ministres, le Premier ministre a demandé que tous les textes d’application du plan d’urgence pour l’emploi soient pris pour le 1er septembre", affirme un communiqué du gouvernement. C’est donc aujourd’hui que des mesures telles que le contrat “nouvelles embauches” seront présentées en Conseil des ministres, afin d’être appliquées dans moins d’un mois.
Le contrat “nouvelles embauches” concrétise l’idéologie ultra-libérale portée par ce gouvernement : diminuer les droits sociaux, assimilés à des “contraintes” pour les employeurs, afin que ces derniers puissent utiliser de manière plus “flexible” la main d’œuvre.
Mais en échange de ces “cadeaux”, aucun engagement chiffré n’est demandé à l’employeur. Quant au bénéficiaire d’un contrat “nouvelles embauches”, il est difficile pour lui d’avoir droit à un logement ou de faire des projets. C’est ce qu’explique “le Monde” dans un article publié hier sur son édition en ligne “Le Monde.fr”.

Problèmes en perspective

Le quotidien parisien a interrogé banquiers et agences immobilières sur la manière dont seront reçues les demandes des travailleurs qui “bénéficieront” de la mesure imposée par ordonnance.
"Si l’on peut raisonnablement penser qu’un salarié sous ce type de contrat sera mieux loti qu’un chômeur pour louer un logement ou emprunter de l’argent, les choses ne seront pas simples pour autant", écrit notre confrère qui ajoute : "le salarié muni de ce contrat va devoir convaincre banques, organismes de crédits et bailleurs, qui ne prisent pas ce qui ressemble, de près ou de loin, à un emploi précaire".
Au sujet de l’accès au logement, “le Monde” donne la parole à René Pallincourt, président de la Fédération nationale de l’immobilier (FNAIM). Pour ce dernier, "le contrat nouvelles embauches peut poser des difficultés : d’un côté, le propriétaire s’engage pour un bail de trois ans, et de l’autre, l’employeur qui doit garantir au salarié le revenu mensuel qui lui permet de se loger, ne s’engage pas pendant deux ans".

Bailleurs et assureurs méfiants

Et pour louer un logement, il est nécessaire d’être assuré. Là aussi, le contrat “nouvelles embauches” pose problème : "Si le locataire est en période d’essai ou en préavis, il ne peut pas être garanti", indique Alain Ledemay, de la compagnie CGI-Assurances cité par “le Monde”. "Ces conditions figurent en toutes lettres dans le contrat Versalis de CGI-Assurances, filiale de la Caisse de garantie de l’immobilier FNAIM", précise le journal parisien.
Quant aux banques, elles sont aussi très réservées, et pas disposée à faire des cadeaux aux personnes qui seront salariées sous un contrat “nouvelles embauches” : "Nous avons consigné d’attendre la fin d’une période d’essai de trois mois, voire de six mois pour un cadre", explique Philippe Stoltz, responsable du crédit à l’habitat pour la BNP-Paribas.
Voilà qui n’est guère rassurant pour celles et ceux qui devraient subir les conséquences du contrat “nouvelles embauches”.
Et si ce renforcement de la précarité est prévu pour les entreprises de moins de 20 salariés, son extension a été demandée à toutes les entreprises par les dirigeants du MEDEF. Une généralisation qui n’est pas exclue par le gouvernement. Le ministre du Travail l’a laissé entendre : cela pourrait se faire après l’évaluation de l’impact du contrat “nouvelles embauches” en 2008.


Les cinq ordonnances

o Contrat “nouvelles embauches”
La première ordonnance institue dans les entreprises jusqu’à 20 salariés le contrat “nouvelles embauches” (CNE), ce contrat à durée indéterminée avec période d’essai de deux ans. Pendant ces deux ans, l’employeur peut licencier le salarié sans avoir à justifier sa décision.
L’employeur paie alors au salarié une "indemnité égale à 8% du montant total de la rémunération brute due au salarié depuis la conclusion du contrat".

o Chèque-emploi
Une deuxième ordonnance crée le “service chèque-emploi” en vue d’aider les très petites entreprises dans leurs déclarations et comptabilité (paiement des salaires et cotisations).

o Relèvement du seuil
Une troisième ordonnance relève le seuil de 10 à 20 salariés pour le déclenchement de certains prélèvements obligatoires, aide au logement, à la construction, contribution à la formation professionnelle.

o Les moins de 26 ans exclus des effectifs
La quatrième ordonnance précise que les jeunes de moins de 26 ans ne seront plus pris en compte dans les effectifs des entreprises, quelle que soit la taille de celles-ci, pour le calcul des seuils déclenchant les obligations liées au Code du travail.

o Crédit d’impôt
Crédit d’impôt pour les jeunes. Ce texte institue un crédit d’impôt de 1.000 euros (pour des revenus entre 2.970 et 10.060 euros) pour les moins de 26 ans justifiant d’une activité salariée d’au moins six mois consécutifs dans un métier qui connaît des difficultés de recrutement.


La C.G.T. et les nouveaux chiffres du chômage en France

"Le développement des contrats précaires continue d’alimenter le chômage"

Les chiffres du gouvernement sur le chômage pour le mois de juin annoncent une baisse de 1,4% du nombre des chômeurs par rapport au mois précédent - soit moins 35.000 demandeurs d’emploi - et moins 2,6% pour les moins de 25 ans.
Pour la CGT, "il faudrait beaucoup plus que cette timide embellie pour affirmer une vraie tendance à la baisse du chômage dans notre pays qui, toutes catégories confondues, touche plus de 3,5 millions de personnes".
En effet, selon le syndicat, le chômage de longue durée (1 à 3 ans) touche près de 800.000 personnes en France et "le développement des contrats précaires continue d’alimenter le chômage".
Il ajoute que 30% des entrées au chômage sont des fins de contrats à durée déterminée et d’intérim.
"Il faut savoir que 70% des offres d’emplois déposées à l’ANPE sont pour des contrats de moins de six mois", précise la CGT, qui poursuit : "Ce ne sont malheureusement pas les mesures du plan d’urgence de Villepin qui vont développer la croissance et l’emploi durable. Bien au contraire".
Et de conclure : "la CGT renouvelle ses propositions pour l’ouverture de véritables négociations sur l’emploi, les salaires, une sécurité sociale professionnelle. C’est à ce prix que le chômage régressera".


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