La lutte des milliers de travailleurs privés arbitrairement d’allocations chômage

Obligés de saisir la justice pour faire respecter leurs droits aux ASSEDIC

17 avril 2004

Jeudi, la victoire des chômeurs de Marseille a été une grande avancée pour tous ceux qui ont vu leurs droits attaqués par le gouvernement et ses complices : les juges ont condamné la diminution arbitraire des droits des chômeurs. À La Réunion, plusieurs syndicats et organisations de chômeurs saluent cette décisions. Ainsi la CGTR note que « la lutte paye », tandis que le SNU-ANPE constate que « le 15 avril 2004 est une date importante ».
Mais même si le jugement de première instance était confirmé et faisait jurisprudence, son application ne concernerait apparemment que les travailleurs privés d’emploi qui ont porté plainte pour “rupture de contrat” contre les ASSEDIC. Ceux qui, par crainte, par manque de moyens ou par méconnaissance, ne se tournent pas vers la justice risquent d’être privés malgré tout des allocations auxquels ils ont droit. Jean-Pierre Técher, dirigeant d’AC !-Chômage Réunion, invite les personnes concernées par le “recalcul” des droits ASSEDIC à se mobiliser et à saisir ensemble la justice. Le 1er janvier dernier, environ 5.000 Réunionnais ont vu leur indemnisation chômage supprimée arbitrairement.

Jeudi, les juges du tribunal de grande instance de Marseille ont rendu un verdict très attendu. Il concernait la plainte déposée par 37 chômeurs contre l’UNEDIC et les ASSEDIC. Les travailleurs privés d’emploi considèrent que la nouvelle convention UNEDIC signée par les dirigeants du MEDEF et de quelques syndicats minoritaires est une rupture de contrat. Alors qu’ils étaient allocataires de l’ASSEDIC, les chômeurs ont signé un Plan d’aide au retour à l’emploi (PARE) avec l’organisme. Le PARE engage les ASSEDIC à maintenir le versement des allocations prévues à la date de la signature, a soutenu l’avocate des plaignants. Or, le 1er janvier dernier, la nouvelle convention UNEDIC est entrée en vigueur, elle raccourcit unilatéralement de plusieurs mois la durée de versement des allocations définie dans le PARE. À cette date, environ 5.000 Réunionnais était concernés par cette diminution de leurs droits.
Pour 35 chômeurs, les juges ont condamné les ASSEDIC à respecter le contrat signé. Les travailleurs vont toucher l’indemnité dont ils étaient privés depuis le 1er janvier. Cette décision, qui pourrait faire jurisprudence, est assortie d’une exécution provisoire et d’une mesure d’indemnité de retard de 500 euros par jour et par chômeur. Une décision qui montre que le gouvernement et ses complices ne peuvent pas casser impunément les droits des travailleurs.
Cependant, les condamnés ont fait appel, et apparemment, même si le jugement de première instance était confirmé, l’application de la jurisprudence ne concernerait apparemment que les travailleurs privés d’emploi qui ont porté plainte pour “rupture de contrat” contre les ASSEDIC.

L’effet boule de neige

Interrogé hier par “Témoignages”, Jean-Pierre Técher d’AC !-Chômage Réunion a fait le point sur les conséquences de cette décision dans notre île. Il a tout d’abord rappelé que des courriers de protestation ont été adressés aux ASSEDIC pour dénoncer la remise en cause de la durée des allocations.
Soulignant la portée de la décision rendue par les juges marseillais, Jean-Pierre Técher a indiqué que depuis jeudi soir, beaucoup de personnes se sont manifestées. Une réunion de travail est prévue la semaine prochaine pour mettre sur pied un plan d’action. Car d’après lui, si jurisprudence il y a, elle ne serait appliquée que pour les chômeurs qui font la démarche de saisir la justice pour faire respecter leur droit. C’est donc un premier obstacle qui se dresse sur le chemin du travailleur privé abusivement de son droit aux ASSEDIC. Il est donc nécessaire que les chômeurs soient informés et qu’ils n’aient pas peur d’engager une procédure judiciaire pour faire respecter leur droit.
Revenant sur le jugement de jeudi, Jean-Pierre Técher indique que les chômeurs se sont rassemblés et se sont cotisés pour payer un avocat, ce qui leur a coûté environ 30 euros par personne. Ce qui veut dire que plus les travailleurs seront nombreux à se mobiliser, plus l’effort financier pourra être partagé.
Mais il est tout de même scandaleux de voir que que des personnes privées d’emploi doivent être obligées d’engager une procédure judiciaire pour pouvoir toucher une allocation à laquelle elles ont droit. Le dirigeant d’AC !-Chômage précise d’ailleurs que "nous nous battrons pour que le bénéfice de ce jugement soit étendu à tous les chômeurs".

Manuel Marchal


Contact

Suite au jugement de jeudi condamnant les ASSEDIC à respecter la durée d’indemnisation définies dans le PARE, Jean-Pierre Técher d’AC !-Chômage Réunion invite toutes les personnes qui ont vu leur droit à l’indemnisation remis en cause à le contacter au 0262 41 32 62 ou au 0692 66 52 73. Une réunion de travail est prévue la semaine prochaine.


Déclaration de la C.G.T.R.

"La lutte paye"

"La réforme de l’indemnisation chômage signée en décembre 2002, dans les conditions inadmissibles que l’on sait, par les organisations patronales d’une part et la CFDT, la CGC, et la CFTC d’autre part, a diminué de façon importante les droits des demandeurs d’emploi, excluant ainsi des milliers d’entre eux du régime de l’UNEDIC. Plusieurs centaines de recours, devant les Tribunaux de grande instance, de demandeurs d’emploi lésés, avec l’aide de la CGT et d’associations de défense des chômeurs, ont été intentés.
En signant le PARE, les chômeurs ont signé un contrat avec l’UNEDIC où, à charge pour eux de rechercher activement un emploi, les ASSEDIC devaient leur verser des indemnités dont le montant et la durée de versement étaient déterminés dans ce contrat. C’est ce contrat qui été rompu, de façon unilatérale, par l’UNEDIC.
Le Tribunal de grande instance de Marseille vient de le reconnaître et donc de rétablir dans leurs droits les plaignants injustement lésés. Nous attendons avec impatience les décisions que prendront les autres tribunaux, mais il est, d’ores et déjà, évident que celle du TGI de Marseille pèsera.
Au-delà de la reconnaissance de la nature contractuelle du PARE, c’est la réforme de l’indemnisation chômage elle-même qui demande à être remise sur la table et rediscutée afin de permettre une réelle indemnisation chômage permettant, dans les meilleures conditions, une recherche d’emploi.
Loin de M. Chérèque qui parle de catastrophe, la CGTR se félicite de ce succès et suit avec attention l’évolution de la situation. C’est la lutte qui paye, et c’est pourquoi les travailleurs et leurs organisations se mobiliseront pour le 1er mai. Alors tous ensemble, pour un 1er mai à l’offensive".


Autres réactions

"Le SNU-TEFI se réjouit de ce premier succès"
"Le 15 avril 2004 est une date importante pour les 265.000 demandeurs d’emploi privés de leurs indemnités suite à la réforme UNEDIC entrée en application depuis le 1er janvier 2001, à l’initiative du MEDEF, CFDT, CGC, CFTC et agréée par le gouvernement", estime le SNU-TEFI-FSU/ANPE. "La justice a donné raison aux 35 chômeurs qui avaient décidé avec leurs organisations d’attaquer l’UNEDIC pour rupture de contrat. Ils sont en réalité plus de 265.000 demandeurs d’emplois à avoir été spoliés de leurs droits", souligne le communiqué.

Satisfaction et vigilance pour la CACEP
Revenant sur le jugement de jeudi, la CACEP (Coordination des associations contre le chômage, l’exclusion et la précarité) remarque "avec satisfaction une première sanction sur cette question des indemnisations que les ASSEDIC avaient imposé aux allocataires depuis le 1er Janvier 2004". "La vigilance doit rester de mise", estime la CACEP.


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