Nou lé kapab

Première rencontre de la jeunesse réunionnaise

7 décembre 2009, par Geoffroy Géraud-Legros

Nassimah Dindar et Paul Vergès ; respectivement Présidente du Département et Président de la Région, ont écouté les interventions des jeunes. ’Je vous ai entendus’, a déclaré Nassimah Dindar’. ’Prenez le pouvoir’, a conclu Paul Vergès.

• Paul Vergès, Président du Conseil régional

« Le moment est venu de la majorité citoyenne des jeunes »

Paul Vergès a salué dans la mobilisation de la jeunesse une initiative pour penser en Réunionnais les défis que doit affronter notre pays dans la période qui s’ouvre

Paul Vergès, Président du Conseil régional. (photo J.-F. N.)

Par leur dimension globale, les grands courants de l’évolution contemporaine appellent à un complet renouvellement des solutions mises en œuvre jusque-là. La Réunion, a rappelé le président de La Région, va subir de plein fouet les effets de la grande transformation du monde dans les domaines économique, climatique et démographique. Paul Vergès a ainsi souligné que la croissance de la population, qui devrait s’arrêter aux environs de 2050, va porter le nombre d’êtres humains à 9 milliards.

Des transformations décisives

Dans notre environnement, la population de Madagascar s’élèvera à 28 millions dès 2025, pour atteindre 43 millions en 2050 ! La génération qui atteint aujourd’hui l’âge adulte verra aussi une transformation profonde des rapports de forces géopolitiques. Géants démographiques, la Chine et l’Inde s’affirmeront aussi comme puissances politiques planétaires.
Dans ce monde bouleversé, les tâches de la jeunesse sont immenses et décisives. La Réunion, qui ne comptait en 1950 que 250.000 habitants, comptera 1 million d’habitants dans 15 ans. Le réchauffement climatique, qui annonce des catastrophes naturelles sans équivalent : cyclones gigantesques, montée des eaux… Enfin, l’économie mondialisée accélère les échanges… mettant en danger les productions locales traditionnelles, au premier rang desquelles la canne à sucre.

Inventer des solutions réunionnaises

À La Réunion, a rappelé le président de la Région, le développement durable passe par le traitement de la question sociale. Tous ceux qui ont les moyens de faire l’opinion, a souligné Paul Vergès, multiplient les paravents à une réalité implacable : faits divers, multiplication des fêtes servent à masquer les difficultés quotidiennes du plus grand nombre, frappés par la pauvreté et le chômage. Régler cet immense problème nécessite une approche totalement nouvelle, qui intègre enfin la dimension réunionnaise, et ne se limite plus à « imiter ce qui se fait ». Construire des grands projets de développement, tels le Tram-train ; réaffirmer le rôle des Réunionnais dans la maîtrise de leurs ressources — par exemple dans le domaine de la pêche ; inventer des solutions alternatives de traitement des déchets : tous ces secteurs peuvent être des secteurs d’emplois pour la jeunesse réunionnaise. Pour décider par elle-même où elle doit aller, la jeunesse réunionnaise doit savoir d’où elle vient, se réapproprier une histoire qu’on avait voulu lui cacher, et retrouver une mémoire longtemps occultée. Sous des applaudissements nourris, Paul Vergès a évoqué la nécessité de reconquérir le passé, et plus particulièrement le temps de l’esclavage, dont le spectre recouvre près de la moitié de notre histoire. Au nombre des outils du temps retrouvé, le chef de l’exécutif régional a évoqué l’édification de la Maison des civilisations et de l’unité réunionnaise.
La jeunesse du peuple réunionnais, a conclu le président Vergès, offre une opportunité immense et unique, pour engager notre société sur la voie d’une grande transformation. Les jeunes, qui sont plus du quart de la population de notre pays, ont aujourd’hui atteint « la majorité civique ». L’avenir leur appartient : ils doivent « prendre le pouvoir ».


• Nassimah Dindar, Présidente du Conseil général

« Alé di partou »

C’est avec une certaine émotion que la présidente du Conseil général s’est adressée à la jeunesse mobilisée lors de la première rencontre de l’AJFER.

Nassimah Dindar, Présidente du Conseil général. (photo Toniox)

« J’avais prévu de vous parler d’autre chose que ce dont je vais finalement vous parler », avertit Nassimah Dindar, prenant la parole à la suite du dernier intervenant de l’AJFER. « Je voulais vous parler de ce que nous faisons au Conseil général, de ce que nous faisons en tant qu’élus… Et je vous ai entendus vous exprimer tour à tour. Je vous ai entendus, et j’ai ressenti à quel point vous connaissez intimement les problèmes dont vous parlez. Je vous ai entendus, et j’ai entendu… l’excellence. Je vous ai entendus parler de La Réunion ».

« Rouler pour La Réunion »

« La gouvernance
 », explique la présidente du Conseil général, « installe des clivages ». Ceux-ci divisent le monde politique entre « Droite et Gauche », entre différents « systèmes », par lesquels des groupes tentent de conquérir pour eux-mêmes des avantages, d’occuper coûte que coûte des postes. Or, rappelle Nassimah Dindar, on peut être une femme ou un homme impliqué dans la gouvernance et « refuser les systèmes ». La présidente de l’Assemblée départementale en veut pour preuve son propre itinéraire : élue autrefois sur la liste conduite par Margie Sudre, « je ne connaissais pas bien le monde politique. J’ai entendu le discours du président Vergès sur le changement climatique, dont personne ne parlait alors »… et que refusaient d’écouter les femmes et les hommes de « système ». Aujourd’hui, ces constats et cette analyse sont reconnus par tous. « Il faut casser les systèmes » et « rouler pour La Réunion », ajoute Nassimah Dindar. « Votre rassemblement d’aujourd’hui dérange. Il dérange ceux qui sont confortablement assis, ceux qui sont bien installés dans les systèmes. Ce que vous avez dit aujourd’hui ici, je voudrais que vous alliez le dire aux quatre coins de notre île. Alé di partou ! ».

Geoffroy Géraud

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