La Commission des Affaires sociales du Sénat au Conseil général

Près d’un Réunionnais sur trois dépend d’un revenu minimum

13 septembre 2005

Hier, la délégation de la Commission des Affaires sociales du Sénat était au Conseil général. Sénateurs, élus et membres de la société civile ont débattu sur le thème des minima sociaux. La députée de La Réunion, Huguette Bello, est intervenue hier. Nous reproduisons ci-après ses propos. Les intertitres sont de “Témoignages”.

Saluant l’initiative de nos collègues parlementaires d’organiser une mission sur les minima sociaux, je souhaite d’emblée leur dire à quel point ils abordent une question particulièrement sensible à La Réunion.
D’abord parce que le “social” est étroitement lié à l’histoire contemporaine de La Réunion, que le changement de statut de 1946 a été revendiqué surtout pour mettre un terme aux discriminations sociales coloniales, que la marche vers l’égalité sociale a été longue, parsemée d’embûches, d’oppositions politiques et parfois de prévisions alarmistes sur les conséquences de l’application de telle ou telle mesure sociale.
De fait, ce n’est qu’en 2002, il y a donc à peine 3 ans, que l’on considère (même s’il subsiste toujours des disparités pour certains minima) que le processus d’égalité sociale est réalisé avec l’alignement, cette année-là, du RMI.

Le pouvoir d’achat diminue

C’est également un sujet sensible en raison du nombre très important de personnes couvertes par les minima sociaux (226.000 personnes), ce qui représente 30,6% de la population qui vit (ou survit pourrait-on dire) grâce aux minima sociaux.
C’est donc à un aspect fondamental de la société réunionnaise que vous avez décidé de vous intéresser, mes chers collègues.
L’importance des minima sociaux dans notre société est un révélateur du chômage massif que nous subissons et qui est dû au décalage entre la croissance de la population active et celle des emplois créés. Elle reflète aussi, malgré les apparences, la fragilité de notre société.
Dans ce contexte, les mesures relatives à l’emploi vont toutes, d’une façon ou d’une autre, avoir une incidence sur l’importance des minima sociaux. L’exemple de la fin des emplois-jeunes est, à cet égard, éloquent.
De la même façon, la baisse du pouvoir d’achat que nous constatons actuellement est vécue de façon encore plus difficile ici.
Pas un jour où nous ne soyons interpellés sur cette réalité qui frappe surtout les ménages les plus modestes qui sont les plus nombreux. À défaut d’un indicateur spécifique (le chariot-type de M. Breton n’est pas adapté à notre réalité) qui mesure précisément le coût de la vie, nous avons demandé à plusieurs familles percevant des minima sociaux d’établir leur budget mensuel. Je tiens (si vous le souhaitez) ces documents à votre disposition. Ils permettent de mesurer quel est le pouvoir d’achat réel des prestations sociales et de voir qu’il est effectivement en baisse.

Les Réunionnais luttent pour travailler

Le débat récurrent sur les minima sociaux est toujours lié, on le sait, à l’impact qu’ils exerceraient sur la reprise d’une activité. C’est un débat légitime quand il ne sert pas à stigmatiser les bénéficiaires de ces minima, qui, dans leur immense majorité, n’ont pas le choix.
Et à La Réunion, où le chômage atteint un niveau très important, "la question des trappes à inactivité est de second ordre", comme l’a relevé fort justement Mme Létard dans son rapport de mai dernier.
Même si elle est parfois avancée, l’idée que les bénéficiaires des minima ne souhaitent pas travailler ne correspond pas à la réalité. À preuve le succès des emplois-jeunes et les manifestations contre leur suppression, la détermination des planteurs pour continuer à cultiver la canne à sucre dans un contexte mondial difficile, les revendications de plus en plus nombreuses de jeunes (dans la rue, dans les journaux), pour travailler. Je pourrais multiplier les exemples. Et quand un dispositif ne rencontre pas son public, il faut en rechercher les causes dans le dispositif et non auprès du public. C’est le cas des CIVIS impossibles à mettre en œuvre à La Réunion, en raison du mode de financement. Le même scénario est à prévoir pour les contrats d’avenir du plan de cohésion sociale

Valeur du RMI en baisse

Pour conclure, 2 points :
Le 1er pour dire qu’une réflexion sur les minima sociaux devrait surtout s’attacher à améliorer ce qui doit l’être. Je pense ici au problème de la CMU complémentaire dont sont exclus quelque 20.000 bénéficiaires du minimum vieillesse et de l’AAH qui dépassent le plafond de quelques euros.
Je pense aussi à la mise en place de cet environnement qui facilite la reprise d’une activité comme par exemple des moyens de transport accessibles ou, pour les femmes, un dispositif de garde de leurs jeunes enfants.
Sans doute faudrait-il, et une fois pour toutes, réaliser l’égalité sociale, entre ici et là-bas, en alignant les prestations qui ne l’ont pas encore été.
Plus généralement, il est indispensable de rendre aux familles les plus modestes leur pouvoir d’achat avec une réévaluation immédiate des minima sociaux.
En 1990, le RMI mensuel équivalait à 67 SMIC horaires brut.
En 2004, cela correspond à 50 SMIC horaires brut. Le RMI a perdu 25% de sa valeur.
Le 2ème point de ma conclusion c’est que la priorité (y compris dans les débats sur les minima sociaux) est la création d’emplois. Aucune piste ne doit, ne peut être négligée. Nous avons, plus que partout ailleurs, l’obligation de concilier l’économie marchande et l’économie solidaire. Les opposer est un contre-sens sur la réalité de La Réunion. Car même si le secteur marchand est très dynamique en termes d’emplois, il ne suffit pas.


Des conseillers généraux de l’Alliance interpellent les sénateurs

RMI : l’État doit compenser le coût du transfert

Monica Govindin, Alain Zaneguy et Graziella Leveneur, conseillers généraux de l’Alliance, ont interpellé les sénateurs. Voici un communiqué de presse qui résume leurs propos.

"Nous, élus, sommes conscients de la volonté de l’État de transférer les dispositifs des minima sociaux de façon progressive au Département. À l’heure actuelle, nous pouvons déjà dresser de ce qui a été fait dans le cas du RMI.
Notre première question est la suivante :
Face à une dépense qui s’élève à environ 345 millions d’euros alors que l’État prévoyait une dépense de 334 millions d’euros, tout en sachant que la différence se justifie tant à la fois par la hausse du nombre d’allocataires que par le montant de l’allocation elle-même.
Mais aussi face au défi démographique que nous avons relevé (notamment en 2020 avec La Réunion du million d’habitants), comment notre département arrivera-t-il à faire face à ses dépenses ?
Notre deuxième question :
Pensez-vous qu’avec une armada de dispositifs (d’emplois aidés qui se succèdent, en passant par les CES, CEC, CIA, CEJ, qui ont été supprimés pour laisser place aux contrats d’accompagnement à l’emploi (contrats plus précaires) ...), nous soyons prêts à faire face à la situation de crise sociale particulièrement à La Réunion ; Autrement dit, les objectifs de l’actuel gouvernement à vouloir résorber la précarité sont-ils applicables au département de La Réunion et dans quelle mesure ?
Il semble qu’un appel à la vigilance de notre collectivité, quant au risque d’accroître son déficit suite au transfert de compétence, ne doit donc pas rester un vain mot et ce, même si le gouvernement s’engage à rembourser le déficit pour 2004.
Effectivement, cette compétence étant définitivement attribuée au Conseil général, il faudrait que par la suite, la collectivité réduise au maximum cet écart, de façon à ce qu’elle n’ait pas à tirer sur ses fonds propres pour payer les allocataires.


La délégation du Sénat à la Région

Rencontre avec le Groupe de travail régional de lutte contre l’alcoolisme

Hier, les sénateurs de la Commission des Affaires sociales ont rencontré le Groupe de travail régional de lutte contre l’alcoolisme. L’action de cette instance qui rassemble collectivités, État, société civile leur a été exposée par sa présidente, Catherine Gaud.

La Commission des Affaires sociales du Sénat a rencontré ce jour (Hier - NDLR) à la Région le "Groupe de travail régional de lutte contre l’alcoolisme" qui regroupe l’ensemble des acteurs concernés : État, Région, Département, Médecins, Associations, Industriels etc...
La présidente du Groupe de travail, Mme Catherine Gaud, vice-présidente du Conseil régional déléguée à la Prévention et à la Solidarité, a exposé aux sénateurs l’esprit dans lequel s’inscrivent les travaux du groupe de travail ainsi que les premières orientations qui découlent des 12 réunions qui se sont déjà tenues : les mesures préconisées, actuellement en cours d’examen et de validation, couvrent un champ très large, depuis la prévention, en passant par l’information, la réglementation, ou encore la commercialisation, la prise en charge médicale et sociale...
Comme leur collègue, la sénatrice de La Réunion, Mme Anne-Marie Payet, très impliquée dans ce combat, les sénateurs ont marqué leur intérêt à la démarche engagée. Ils ont notamment fait ressortir le caractère national de ce fléau qui touche également de nombreux départements en Métropole. À travers les différents échanges, ils ont contribué à enrichir la réflexion du groupe de travail dont les travaux sont aujourd’hui en voie de finalisation.


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