Tribune libre d’Agir contre le Chômage à La Réunion (A.C. Réunion)

Qui aura le courage de prendre cette initiative ?

23 juin 2005

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À l’occasion des journées de l’emploi qui se tiennent à l’ADPE ce mercredi et ce jeudi, il n’est pas inutile de rappeler que La Réunion compte un taux de chômage trois à quatre fois supérieur à celui de la Métropole.
Si on peut se réjouir que de telles initiatives voient le jour, nous savons que cela ne peut en aucun cas inverser durablement la tendance. Nous ne pouvons pas non plus oublier qu’en dépit de belles paroles, les méthodes utilisées par les gouvernements successifs n’ont jamais donné les résultats escomptés. Bien au contraire la politique menée ces dernières années a conduit à des reculs sans précédent : augmentation du chômage, régression des acquis sociaux, généralisation de la précarité, dérégulation des services publics, progression des inégalités, baisse du coût du travail, renforcement accru des contrôles et des sanctions sur les chômeurs, aggravation de la souffrance sociale. La liste n’est pas du tout exhaustive.
Le "non" au référendum sur le Traité de Constitution européenne à révélé l’ampleur du décalage entre les dirigeants politiques et le peuple. Mais on n’a pas l’impression que nos dirigeants ont pris la mesure du rejet exprimé par les électeurs. Si Jacques Chirac a écouté le message des électeurs, on n’a pas l’impression qu’il les a entendus. Ce n’est pas le colmatage d’un nouveau gouvernement avec les mêmes hommes, imprégnés de la même idéologie qui va changer quoi que ce soit à la situation. En tout cas ce n’est pas avec le Contrat nouvel embauche de deux ans permettant aux entreprises de se débarrasser du salarié n’importe quand et n’importe comment qui va amener une sécurité et un mieux être pour le travailleur.
La gravité du chômage nécessite des changements profonds : il faudrait appliquer une thérapie de choc pour provoquer le sursaut qu’attend le pays. Or, le gouvernement de De Villepin se contente de mesurettes, de petits pansements comme l’ont fait avant lui ses prédécesseurs et qui s’est révélé aussi inefficaces qu’inutiles, distribuant toujours autant de carottes aux patrons et davantage de bâtons aux demandeurs d’emplois.

Une politique dans le mauvais sens

Pour être efficace, la lutte contre le chômage passe impérativement par une relance de la consommation, l’augmentation des salaires, le relèvement de tous les minima sociaux, la réduction du temps de travail, le développement des services publics, la lutte contre la précarité, la baisse de l’âge des départs en retraite, la construction de logements sociaux en nombre suffisants etc... Bref, le contraire des politiques menées jusqu’ici. Ce n’est pas étonnant de voir l’échec des résultats.
D’autre part, même s’il ne faut pas mettre tout le monde dans le même sac, il faut que le patronat change d’attitude, qu’il arrête de rechercher le profit à tout prix et, à ce sujet, il est bon de rappeler qu’au cours des 25 dernières années, le MEDEF avec la complicité des gouvernements successifs ont remis en cause les statuts salariaux, la protection sociale ; ils ont précarisé l’emploi, accru la pauvreté, le chômage et l’exclusion. Et ce n’est pas fini. Nos médecins imaginaires que sont Chirac-Raffarin, De Villepin, Ernest-Antoine Seillère et le MEDEF continuent leurs pressions sur les travailleurs, ils pensent qu’un supplément de pédagogie et de sanctions amèneront les salariés et les chômeurs à accepter leurs réformes injustes : le contrat nouvel embauche de deux ans et le chèque emploi sont autant de coups de canif dans le code du travail, et contrairement à ce qu’on affirme, la flexibilité dixit la flexsécurité rapporte beaucoup d’argent au patronat mais crée de moins en moins d’emploi.
Il faut que le patronat arrête de casser le système de protection sociale au prétexte de créer des emplois alors que les emplois en question n’ont jamais été au rendez-vous. Il faut qu’ils cessent leurs agressions et leurs pressions sur les salariés. Leurs attitudes sont à la fois injustes, humiliants, provocateurs et inacceptables.
Nous savons également qu’une réforme des règles d’indemnisation du chômage est programmée pour les mois à venir afin d’entrer en application à partir du 1er janvier 2006. Une convention tripartite a été préparée, à la demande du ministère, par l’IGAS en liens avec les directions de l’ANPE, l’UNEDIC et l’AFPA, sans consultation des partenaires officiels.
L’objectif est de contraindre encore plus les chômeurs à accepter n’importe quel travail à n’importe quel prix, de créer les conditions d’une radiation massive des allocataires et de réduire davantage les indemnisations.
Comme un chiffon rouge, ils agitent le déficit bien réel de l’UNEDIC pour justifier la destruction des droits collectifs entamée depuis 20 ans. Le régime d’assurance-chômage financé par les cotisations salariales et patronales conçu pour indemniser un chômage accidentel est totalement inadapté pour indemniser un chômage structurel de masse et, il est évident que, protocole après protocole, convention après convention, un nombre de plus en plus d’allocataires se voient exclus de l’indemnisation. Il faut trouver de nouvelles sources de financement.

Le combat continue

Nous appelons les salariés et leurs syndicats, les chômeurs, les exclus et les précaires à s’emparer de ce problème, à débattre entre eux, à s’unir, à se mobiliser et à mener les luttes qui conviennent pour empêcher le patronat et le gouvernement de porter un nouveau mauvais coup aux salariés privés d’emploi. Nous espérons que les syndicats mettront tout leur poids dans la balance pour empêcher ce nouveau coup de force qui se prépare contre les chômeurs. Mais d’ores et déjà, nous leur assurons de notre soutien total dans ce combat.
En tout cas, nous pensions que le temps est venu de mettre tout le monde autour de la table afin de préparer un projet pour l’emploi durable et lutter enfin efficacement contre le chômage à la Réunion. La question est : Qui aura le courage de prendre cette initiative ?

Pour AC Réunion,
Jean-Pierre Técher


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