Ressources humaines

Salaires au mérite : avis de « risque social »

21 janvier 2008

Une étude révèle que les hausses de salaires individualisées, loin de stimuler les efforts, créent un sentiment d’arbitraire.

Les augmentations de salaires individualisées, attribuées selon le “mérite”, c’était déjà, de longue date, l’un des modes de management favoris du patronat. C’est désormais aussi, chacun aura pu l’entendre, le credo du chef de l’État qui fait du “mérite” pratiquement l’alpha et l’oméga de sa politique en matière sociale, au détriment de toute garantie collective. Rien de tel en effet qu’une bonne individualisation des relations sociales pour diviser le monde du travail et s’exonérer du devoir le plus élémentaire de justice sociale. Une majorité de cadres ne peuvent déjà compter que sur ce mode de revalorisation : selon une enquête de la CFDT, plus d’un cadre sur deux a reçu, en 2006, une augmentation individuelle ; un tiers seulement ont bénéficié de hausses collectives. Si la thérapie sarkozyste devait être menée à son terme, le virus se propagerait à l’ensemble du monde du travail. C’est dire tout l’intérêt de l’étude réalisée sur le sujet par le cabinet de conseil SRM Consulting, animé par Hubert Landier, spécialisé dans la « mesure et l’analyse du risque social » pour les “décideurs” des entreprises.
Les augmentations au mérite « sont supposées récompenser les efforts, les résultats, être réparties selon des critères aussi objectifs que possible et être clairement expliquées à chacun. Leur but serait de stimuler l’ardeur des salariés » ou de « les motiver », rappelle le cabinet, avant de constater : « Il y a loin de la théorie à la pratique. » Fort des audits réalisés dans une vingtaine de grandes entreprises de différents secteurs d’activité, à partir d’entretiens avec des salariés sous couvert de confidentialité, SRM Consulting relève en effet que « les choses ne se passent pas toujours comme l’imaginent les théoriciens de la méthode ». « Loin d’encourager les meilleurs, les augmentations de salaires individualisées au mérite suscitent fréquemment de violents mécontentements, au point parfois de constituer l’une des causes majeures de détérioration du climat social. » Et d’énumérer les raisons de ces mécontentements : « L’absence d’explications sur les raisons ayant motivé les mesures individuelles », « l’absence de critère objectif clairement connu », « l’existence de dérives, le "mérite" se confondant avec l’ancienneté ou faisant l’objet d’un "saupoudrage" », « les changements trop fréquents dans les critères d’attribution ou le montant jugé parfois ridiculement faible des mesures »... Au final, « loin de stimuler les efforts et de récompenser les meilleurs, le salaire au mérite a souvent pour conséquence de susciter un sentiment d’injustice ou d’arbitraire et de créer la zizanie au sein de l’équipe de travail », conclut le cabinet, en invitant les directions d’entreprise « à la plus extrême prudence ». À bon entendeur...

Y. H.


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