Avec des manifestations samedi prochain à La Réunion comme en France

Semaine capitale pour la bataille des 35 heures

31 janvier 2005

Le débat parlementaire, qui s’ouvre demain à l’assemblée nationale sur la proposition de loi d’assouplissement des 35 heures, s’annonce pour le moins houleux. Il donnera le ton d’une semaine sociale particulièrement agitée dont le point d’orgue sera sans conteste la journée d’action du 5 février. L’ensemble des syndicats, du privé comme du public, donnent rendez-vous aux salariés pour défendre la durée du travail, l’emploi et les salaires.

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C’est mardi à l’Assemblée nationale que débutera l’examen de la proposition de loi déposée par l’UMP visant à "assouplir" la législation concernant la durée légale du travail hebdomadaire. Une réforme à laquelle s’oppose une très large majorité de l’opinion publique en France. (voir encadré)
Composé de quatre articles, le texte prévoit un assouplissement des conditions d’utilisation du compte épargne-temps (CET), la possibilité pour les salariés d’effectuer des "heures choisies" au-delà du contingent légal d’heures supplémentaires et une prorogation, pour trois ans, du régime dérogatoire dont bénéficient les petites entreprises.
L’examen de cette proposion de loi, qui doit se poursuivre jusqu’à jeudi, devrait donner lieu à des débats houleux, l’opposition ayant d’ores et déjà averti que ses députés seraient "extrêmement virulents sur la question des 35 heures".

Une grande journée de protestation samedi

Les opposants au "détricotage des 35 heures" se feront également entendre tout au long de cette semaine dans la rue et sur leurs lieux de travail. De nombreuses initiatives sont prévues un peu partout. Ces actions devraient converger samedi - à La Réunion comme en France - dans une grande journée de protestation à l’appel de la quasi totalité des confédérations syndicales.
CGT, FO, CFDT et CFTC, mais aussi la FSU, l’UNSA et l’Union syndicale Solidaires appellent les salariés du public et du privé, ainsi que les demandeurs d’emplois, à manifester pour protester contre ces nouvelles remises en cause de leurs droits, ainsi que pour défendre le pouvoir d’achat et l’emploi.
En France, galvanisés par le succès de la mobilisation dans le secteur public mi-janvier, où fonctionnaires et enseignants notamment étaient massivement descendus dans la rue, les syndicats ont prévu d’imposantes initiatives dans les grandes villes de France.

Une mobilisation multiforme

Du côté de la fonction publique, la série d’entretiens bilatéraux entre les syndicats et le cabinet du ministre Renaud Dutreil prend fin ce lundi, où sera reçue la fédération FO des fonctionnaires.
Ces rencontres, proposées par le ministre au soir de la mobilisation de fonctionnaires le 20 janvier, ont porté sur la formation professionnelle, la fusion des corps ou la refonte de la grille indiciaire notamment. Mais la question salariale demeure au coeur des revendications des syndicats.
Ceux-ci écriront en début de semaine à Renaud Dutreil pour lui demander de "réouvrir sans délai les négociations salariales".
En France, les syndicats du groupe sidérurgique Arcelor feront également l’actualité puisque la CFDT doit décider, aujourd’hui, si elle utilise son droit d’opposition, avec la CGT, contre l’accord sur les 35 heures signé par trois syndicats minoritaires (FO, CFE-CGC et CFTC).

La santé aussi à l’ordre du jour

Du côté de l’assurance maladie, les "incidences prévisibles", sur les mutuelles, de la réforme engagée par le ministre de la Santé, Philippe Douste-Blazy, seront exposées à la presse, ce lundi, par le nouveau directeur général de la Mutualité française, Daniel Lenoir, ex-directeur de la Caisse nationale d’assurance maladie (CNAM). Une réforme qui pose de nombreux problèmes aux mutuelles et à leurs adhérents. (voir encadré)
Le même jour, aura lieu une nouvelle séance de négociations entre la direction de l’hospitalisation (ministère de la Santé) et les syndicats de praticiens hospitaliers, sur le statut et la rémunération de leurs astreintes.


Selon un sondage en France

77 % des salariés contre le changement du temps de travail

À l’approche de l’examen à l’Assemblée nationale de la réforme de la loi sur les 35 heures, "Le Journal du dimanche" a effectué un sondage qui affirme que 77% des salariés souhaitent conserver leur temps de travail actuel.
Alors que le gouvernement ressasse sans arrêt que la masse salariale veut une réforme pour lui permettre d’être plus flexible au niveau de ces horaires, le sondage affirme pour sa part que seulement 18% aimeraient pouvoir travailler plus. 20% des salariés du privé et 15% des salariés du secteur public.
D’après ce sondage, 74% des salariés du privé et 81% des salariés du secteur public ne souhaitent pas de modification de leur temps de travail actuel.
Autres chiffres fourni par ce sondage : 60% des salariés du privé ne pensent pas que leur entreprise va renégocier prochainement l’accord sur les 35 heures, tandis que 24% d’entre eux pensent qu’elle va le faire.


Le président de la Fédération des mutuelles de France

"On veut culpabiliser les assurés sociaux"

Président de la Fédération des mutuelles de France, Jean-Paul Panzani
voit dans la nouvelle convention médicale "un début de concrétisation
d’une médecine à deux vitesses". Voici la première partie de l’entretien qu’il a accordé au journal “l’Humanité” du 24 janvier dernier.

o Première traduction en acte de la réforme de l’assurance maladie, la convention médicale suscite inquiétude parmi les assurés et mécontentement parmi les médecins. Comment percevez-vous l’état d’esprit des mutualistes ?

Jean-Paul Panzani : Il y a plus que de l’inquiétude et de la déception.
On est dans un des plus mauvais scénarios que nous puissions prévoir.
Le mouvement mutualiste avait misé sur un parcours de soins autour d’un
médecin traitant, permettant un accès de qualité des populations au
système de santé, au moindre coût pour les intéressés comme pour la
collectivité.
Un des grands groupements de la Fédération des mutuelles de France, les Mutuelles de Provence, à Marseille, avait déjà institué depuis des années, à partir des centres de santé, l’idée de la coordination des soins autour de médecins généralistes. Là, avec la nouvelle convention, ni les médecins, ni les patients ne sont véritablement incités à jouer le jeu du parcours qualitatif des soins coordonnés. Les assurés sont confrontés à un maquis administratif, technique, tarifaire, sans précédent.
Il y a un début de concrétisation d’une médecine à deux vitesses puisque les dépassements tarifaires sont autorisés pour les médecins spécialistes du secteur I. Il n’y a plus d’égalité, de réciprocité des droits entre les patients et les professionnels. Pour les premiers, c’est un régime de pénalités qui se renforce : l’assuré paye d’abord la franchise de un euro sur chaque acte, et, s’il ne suit pas le parcours de soins, il peut avoir une
majoration du ticket modérateur, et ensuite, troisième niveau de
pénalisation, il subit un dépassement tarifaire.
Par contre, on a octroyé pas mal de libéralités à certains professionnels de santé, en particulier à des spécialistes. Nous sentons que nous sommes dans un système très marqué idéologiquement, politiquement.

o Le ministre Douste-Blazy dit vouloir "responsabiliser" les assurés avec un tel système...

- En réalité, on veut rendre la population coupable de tout. On vit sur le complexe de culpabilisation. La seule façon de responsabiliser les assurés, c’est de leur permettre d’être des acteurs de leur santé et du système de soins.

o La Sécu va envoyer à chaque assuré un relevé de ses dépenses.

- On est dans une logique inacceptable pour les mutualistes. On sait que 5% de la population occasionnent 60% des dépenses d’assurance maladie. Ce sont les maladies graves. Et on va les culpabiliser ?! Et ceux qui sont en bonne santé vont voir qu’ils ne coûtent rien. C’est la meilleure façon de casser le système solidaire.
Autre problème : les professionnels de santé ont de légitimes
inquiétudes quant à leur valorisation matérielle et morale. Or, la
convention n’aborde pas la question de la démographie médicale et de la
juste répartition des médecins sur le territoire. Quant à leur
rémunération, on a de nouveau privilégié le paiement à l’acte. On sait
pourtant que, pour une prise en charge de qualité, il faut imaginer un
autre mode de rémunération ; nous plaidons pour le forfait.

(à suivre)


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