Seuil de pauvreté, salaire moyen, seuil de richesse : quelques pièges des modes de calcul

5 août 2008

En France, le seuil de pauvreté est égal à la moitié du revenu moyen (actuellement 645 euros par mois pour une personne). Le seuil de richesse est calculé, lui, en fonction des 10% des plus hauts revenus (actuellement 7.000 euros mensuels pour un couple). Ces calculs méritent quelques remarques :

a) Pour le “seuil de pauvreté”, le pourcentage de 50% du salaire moyen est tout à fait arbitraire. Si les statistiques françaises adoptaient le seuil retenu par les statistiques européennes qui est de 60% (toute personne qui ne dispose pas de 60% du salaire moyen est déclarée pauvre), on passerait de 4 millions de pauvres en France à 7 millions.

b) Un “seuil de pauvreté” tout comme un “salaire moyen” n’ont de sens que dans une société où la distribution des salaires est unimodale et progressive, par contre, dans une société à distribution bi-modale (société duale partagée entre très pauvres et très riches), ces calculs n’ont plus aucun sens. Imaginons une société composée, pour l’exemple, de 10 personnes : 5 gagnent 1.200 euros par mois, et cinq 12.000 euros mensuels. Le salaire moyen sera de 6.600 euros par mois, mais personne ne le gagnera. Plus on s’achemine vers des sociétés duales (mouvement lié à une précarisation des classes moyennes et une concentration des richesses chez les plus riches) et plus le salaire moyen (et aussi le seuil de pauvreté à partir duquel il est calculé) devient une abstraction vidée de sens.

c) Ces calculs ne prennent en compte que le salaire et pas les conditions de vie. Un propriétaire qui travaille à côté de chez lui peut survivre au seuil de pauvreté, pour un locataire qui doit payer son loyer et supporter des frais de transport (par exemple un crédit de voiture), c’est mission impossible. Voilà pourquoi, des personnes de plus en plus nombreuses se retrouvent SDF, tout en ayant un revenu régulier, mais modeste ; l’inflation des coûts du loyer leur interdit l’accès au logement. L’indicateur monétaire échoue donc à souligner la cumulativité des difficultés.

d) A l’intérieur du groupe qui dépasse le “seuil de richesse”, les écarts sont considérables. 8% de ces “riches” ont un salaire au moins 5 fois supérieur au seuil de richesse. En outre, la richesse se définit moins par un niveau de salaire que par des patrimoines dont la concentration est bien supérieure à celle des revenus. A l’intérieur du groupe des riches, 5% des ménages détiennent 50% du patrimoine total. Plus encore que pour la pauvreté, la seule approche salariale s’avère donc insuffisante.

Pascal Duret,
Professeur à l’Université, expert à l’Agence Nationale pour l’Evaluation de la Recherche et de l’Enseignement Supérieur


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