Les travailleurs contre la libéralisation des services

Solidarités portuaires

14 janvier 2006

Les travailleurs des ports européens sont actuellement très mobilisés contre la perspective d’un “retour” de la directive européenne de libéralisation des services portuaires, qui sera en débat lundi devant le Parlement européen. La solidarité des salariés du port de l’île à ce mouvement est entière.

La directive qui sera lundi 16 janvier devant le Parlement européen soulève contre elle depuis déjà plus de deux ans l’ensemble des travailleurs portuaires, des transports et de la manutention notamment. La “Bolkestein des mers” vise à donner aux compagnies maritimes le cadre légal qui leur permettrait de faire procéder au déchargement des navires par les moyens de leur choix, y compris par les équipages des navires ou par des personnels à terre non qualifiés. Ce texte est dénoncé comme une menace grave contre les conventions collectives des dockers et la convention 137 de l’Organisation internationale du travail (OIT), qui dit que le travail portuaire doit être effectué par les travailleurs portuaires immatriculés.
Les dockers de La Réunion sont pleinement associés aux mouvements qui secouent depuis cette semaine plusieurs ports européens. "Nous nous attendons à un rejet, par le Parlement, du texte revenu devant la commission le 22 novembre dernier" a déclaré à “Témoignages”, le secrétaire de la Fédération CGTR “Ports& docks”, Michel Séraphine.
Depuis le 6 octobre 2005, la dernière grande journée de mobilisation dans les ports européens, les travailleurs portuaires n’ont pas cessé d’alerter sur les dangers qui menacent leurs professions, du fait de cette circulaire.

Au-delà des salariés

Une très forte mobilisation, en novembre 2003, a fait reculer la commissaire européenne aux transports, Mme Loyola de Palacios, à l’origine d’une directive présentée comme l’équivalent de la directive Bolkestein pour les services portuaires. Son successeur, Jacques Barrot, a rencontré à la fin de l’année 2005, les représentants de plusieurs organisations syndicales et professionnelles, qui ont réaffirmé leur opposition au projet des ultra-libéraux européens. La deuxième mouture de la directive est revenue devant la commission européenne le 22 novembre dernier.
L’enjeu de ce rapport de force ne concerne pas seulement les salariés menacés dans leur emploi. Des organisations patronales - des bateliers, des pilotes, des armateurs... - demandent aussi le retrait de ce texte. En effet, elles s’opposent à ce que, sous couvert de “mise en concurrence”, la circulaire ne prépare en fait les conditions d’un contrôle de l’ensemble des activités portuaires par quelques gros consortiums, instaurant des monopoles de fait.

Mobilisation internationale

Plusieurs organisations internationales se sont réunies à Anvers le 21 décembre dernier - en particulier l’International Dockworkers Council et la European Transport Federation - pour examiner avec les syndicats et les partenaires sociaux (pilotes, armateurs, chambres de commerce européennes) les conditions d’un retrait de cette circulaire.
C’est maintenant aux parlementaires européens de se prononcer. S’ils repoussent une deuxième fois le texte, ce sera un nouveau recul important infligé au projet mondial de déréglementation des services.
Au port de la Pointe des galets, ce lundi, la mobilisation va se traduire par la tenue d’une assemblée générale de la fédération CGTR “ports & docks”, des distributions de tracts et des réunions d’information avec l’ensemble des représentants des professions portuaires. La faiblesse de l’activité portuaire en ce mois de janvier (saison cyclonique) ne permet pas aux salariés d’organiser une grève - comme c’est le cas actuellement dans plusieurs ports d’Europe - mais les dangers dont ils se sentent menacés sont les mêmes et leur solidarité est entière, a réaffirmé hier Michel Séraphine.
Dans notre prochaine édition, nous évoquerons plus largement les revendications des professions portuaires en lutte contre la directive.

P. David


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